Chapitre 13

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J’émerge.

Combien de temps j’ai dormi ? Où je suis ?

J’en ai aucune idée. J’ai une espèce de mal de crâne, on peut dire qu’il a envoyé la dose.

Je suis allongée sur le canapé d’un salon, je suis habillée, au moins ça.

J’essaie d’essuyer mon front en sueur, mon bras est bloqué. Plutôt menotté.

Je tire pour voir à quoi je suis accrochée, c’est pas fixe, y’a quelque chose qui vient. Je regarde par-dessus le canap’.

Oh mon Dieu… je suis menottée à un cadavre.

Un homme, la gorge ouverte gît à côté de trois autres personnes.

Madoff, qu’est-ce que t’as fait ?!

Je me traîne par-dessus le corps et m’approche des trois autres. C’est horrible, une femme et deux ados, égorgés sauvagement se vident de leur sang sur le parquet.

J’ai envie de gerber.

Ce mec est un malade.

J’entends du bruit dans la cuisine.

Madoff pénètre dans le salon et se fige devant moi.

- C’est quoi ce bordel ?! J’ai la gorge serrée, je suis tellement choquée, c’est un filet de voix qui sort de ma bouche.

- C’est ton bordel désormais.

Je connais ses méthodes, ça sent pas bon du tout.

- Ne fais pas ça, je le supplie.

- Trop tard ma Lucy, c’est terminé pour toi.

- Mais ces gens…cette famille…t’es un monstre.

- Ah non, le monstre c’est cette fille déséquilibrée qui a sonné chez une charmante famille.

- Arrête…

- Qui a sorti un couteau de boucher et a tranché la gorge d’un père sans histoire.

- Je t’en prie…

- Elle s’est aperçue qu’il n’était pas seul, elle est rentrée dans leur petit nid douillet.

Je pleure, c’est un vrai carnage, mes larmes se mélangent au sang sur mon visage. Je suis couverte de sang. Leur sang.

- Elle a ensuite tranché la gorge de son épouse aimante et s’est assise.

Je ne dis plus rien. Plus rien ne sort.

- Leurs enfants sont rentrés de l’école, elle a fait preuve d’humanité en leur évitant de devenir orphelins.

- Pourquoi tu fais ça ? je lui demande mais connais la réponse.

- Fallait pas me laisser Lucy. On était bien tous les deux, on formait un beau duo.

C’est un monstre, c’est pour des actes immondes comme celui-ci que j’ai mis un terme à notre relation.

- Maintenant tu vas payer.

Il range son flingue dans sa mallette.

- J’ai appelé les flics. J’ai signalé la présence d’une femme louche dans l’immeuble. Tes empreintes sont partout. Sur les corps, l’arme du crime, la porte, les murs. Ils vont arriver d’une minute à l’autre.

Sur la table du salon est posé le couteau de boucher.

- J’aurais pu te tuer, mais je préfère que tu penses à moi durant le restant de tes jours derrière les barreaux.

Je sens la colère monter en moi.

- Je t’aime Lucy. C’est pour ton bien. Je te protège de tes mauvaises fréquentations.

Il parle surement de Lapin.

- Il va payer pour ça. Je t’ai épargnée. Lui, je ne lui dois rien.

Il accroche sa mallette à son poignet, ouvre la porte d’entrée.

- Courage Lucy…

Et il sort de l’appart’.

Je ne bouge plus. Il est parti. Je suis vraiment dans la merde. J’entends par la fenêtre une sirène de police. Ils ont fait vite pour une fois. Faut que je m’active.

Je tire sur le corps. Il est trop lourd.

Je le traine comme je peux jusqu'à la fenêtre. Je lutte. Il doit peser au moins soixante-dix kilos.

Je trébuche, me relève et regarde dehors. Y’a une deuxième voiture de flics qui vient de se garer. Faut que je me casse, mais ce mec est trop lourd, je suis foutue.

Á moins que…

Je m’appuie sur la table et chope l’arme du crime.

J’ai pas le choix, faut que je me dégage. J’attrape le couteau de boucher à pleine main, le lève, et l’abat de toutes mes forces sur l’avant-bras du pauvre type.

Je l’entaille.

J’entends les portières des flics claquer. Ils vont monter.

Dépêche-toi Lucy.

Je coupe l’avant-bras qui me résiste. Ça gicle de partout. Je scie. Un petit jet de sang m’arrose la joue.

Ça craque, je tire, ça vient.

Ça y est, je suis libérée. Faut que je me casse.

Couverte de sang et le bras du type qui pendouille à ma menotte, c’est pas le moment de croiser quelqu’un. Je sors de l’appart direction les escaliers.

Je passe devant l’ascenseur. Il s’arrête à l’étage. La porte s’ouvre. Pas de bol…

Je me retrouve nez à nez avec un flic. Du moins, ils étaient deux avant que mon genou ne fracasse le « paquet » du premier qui s’affale par terre en couinant.

Je n’y suis pas allée de main morte.

Son collègue, surpris, sort son flingue et le pointe sur moi.

Je suis foutue.

Il me regarde bizarrement.

Bon ok, y’a de quoi, il se retrouve quand même en face d’une nana couverte de sang qui vient de castrer son pote.

- Lucy ? me fait le flic.

Mais d’où il connait mon prénom. Je le regarde.

Je le connais c’est …

- Philip ? je dis un peu hésitante.

Il sourit. C’est bien lui. J’ai décidément pas de bol.

Faut que je tombe sur le seul flic avec qui j’ai passé ma scolarité.

Un autre jour, ça ne m’aurait pas dérangée, il était plutôt sympa, mais pas aujourd’hui bordel, pas maintenant. Il baisse son arme, me regarde des pieds à la tête et doit se dire, tiens, elle a un avant bras accroché à son poignet puis fait le rapprochement avec l’appel stipulant une femme louche dans l’immeuble.

Son visage se durcit, il a compris et pointe à nouveau son flingue sur moi.

Pas le temps de réfléchir. Je le pousse.

Il trébuche et lâche son arme. Il m’entraine dans sa chute et on se fracasse par terre.

Il panique, voit son flingue un peu plus loin. Se jette à plat ventre pour tenter de le récupérer.

Je lui tire les jambes, passe par-dessus lui et me jette à mon tour.

Loupé. Je suis trop courte.

J’envoie le bras, le morceau de viande accroché à mon poignet agrippe le flingue, je le ramène vers moi et le prends en main.

Je me relève aussitôt, le pointe sur Philip et tire.

- Pardon !

Et tire.

- Pardon !

Et tire.

- Pardon !

Et tire une dernière fois.

Le pauvre, ça fait trop de peine de le voir chialer de douleur. Je suis sympa, j’ai juste visé les jambes et les genoux.

Je vide le reste du chargeur pour briser mes menottes. Enfin libre.

Dommage, c’était pratique cette petite extension de bras. Son collègue, toujours à terre, les couilles en morceaux, a repris son souffle et gueule.

- Á l’aide !! Elle est armée !

Fait chier. Je balance l’arme et prends les escaliers. J’entends des pas. Y’a du renfort, je suis cuite.

Réfléchis ! Réfléchis ! Une idée me vient. Je n’ai rien à perdre, je tente le tout pour le tout.

J’enlève mes fringues, m’essuie le visage avec.

Je me retrouve en soutif et string. Je me frotte les yeux, respire un bon coup et descends les marches en pleurant. Quatre flics sont plantés devant la porte de l’immeuble pour sécuriser les lieux. J’arrive en courant toute paniquée et quasiment nue.

- Au secours, j’ai entendu des coups de feu.

Un des flics me demande de me calmer.

- J’ai eu peur…je suis sortie… j’ai paniqué…

- Ne vous inquiétez pas madame, venez par ici.

L’agent enlève sa veste pour me la poser sur les épaules.

Il tente de me rassurer et m’accompagne devant son véhicule.

- Gardez la veste, asseyez-vous à l’intérieur, vous êtes en sécurité.

Qu’il est charmant.

- Merci Mr l’agent, je dis en surjouant la fille apeurée et rassurée d’être tombée sur un agent aussi bienveillant. Il m’installe sur la banquette arrière, me dit de ne plus m’inquiéter et rejoint ses collègues devant l’immeuble.

L’oscar de la meilleure actrice est décerné à…Lucy !

J’enfile la veste. Je fouille les poches.

Un Mentos. Cool.

Á la cerise. Beurk.

Y’a autre chose. Les clés de la caisse.

Merci Mr l’agent, vous êtes bien aimable. Désolé les gars, mais y’a urgence. Je me faufile devant, allume le contact et démarre à toute allure.

- Putain, la fille ! Faut pas la laisser s’échapper, elle a tué toute une famille, hurle un flic se tenant l’entrejambe qui, décidément a bien repris son souffle.

Je mets le turbo. Je suis déjà loin.

Sacrée soirée, et ce n’est que le début.

J’arrive chez Lapin, je me gare un peu à l’écart. Faudrait pas attirer la flicaille. Je sors de la caisse, j’entends siffler. Je me retourne. Un clodo avachi par terre sirotant sa vinasse, me lance tout souriant.

- Eh ! Jolie fliquette, j’ai été vilain, tu veux pas m’embarquer ? Je mérite une grosse correction.

Je lui fais un clin d’œil. Je ne peux pas lui en vouloir de mater un agent des forces de l’ordre en string.

Je m’approche, lui envoie les clés et lui dis.

- Va la garer dans un coin peinard, je me refais une beauté et je te fais une fouille complète.

Il les attrape, regarde la caisse, me regarde et me fait son plus beau sourire édenté.

Je me barre, faut pas que je traine, j’ai perdu assez de temps. On a encore du pain sur la planche.

Je rentre dans l’immeuble. J’en profite pour me regarder dans le miroir du hall d’entrée.

J’ai une sale gueule.

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