CHAPITRE 5 : LE NOUVEAU MONDE

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Les premiers rayons du Soleil commencent seulement à colorer l’horizon de rose et d’orange quand Lucie sort de sa torpeur. Elle ouvre la fenêtre et s’imprègne de l’air glacial qui lui pique le visage et emplit ses poumons. Un instant le temps s’arrête et un sourire se dessine sur ses lèvres. Elle laisse la sérénité du monde qui s’éveille la submerger et l’absorber jusqu’à ce qu’un grommèlement dans son dos vienne briser cette minute de quiétude.

- Ferme cette foutue fenêtre, ça caille ! maugrée Sarah. T’as vraiment un problème.

Lucie n’a pas le temps de réagir que les carreaux claquent contre l’embrasure en un courant d’air et que Thomas se retourne sous sa couette.

- Elle a raison, ça ne se fait pas de réveiller les gens comme ça.

- Vous ne voulez pas vous taire un peu ? proteste Mathieu, réveillé par tout ce brouhaha. Qu’est-ce qui vous prend à tous ?

- La petite nouvelle a réveillé tout le monde en ouvrant la fenêtre, explique Charlotte en baillant.

- Dites, les interrompt Aurore, les couleurs là-haut, c’est le Soleil qui est en train de se lever ?

- Tout à fait, confirme Lucie.

- On est fin décembre, le Soleil se lève à presque neuf heures ! s’écrie Aurore. On devait partir de bonne heure. Qui avait la charge du réveil déjà ?

- Euh c’est moi… marmonne Charlotte en rougissant. Je n’avais pas fait attention qu’on est dimanche et que mon réveil est réglé pour sonner qu’en semaine. Je suis désolée…

Tous se lèvent et rangent leurs affaires le plus rapidement possible puis avalent un petit-déjeuner nourrissant préparé par Gérard. Ils chargent leurs bagages dans la voiture de leur mentor et lui disent au revoir. Ils reviendront le chercher plus tard, quand il aura fini de régler ses affaires ici.

Les sept jeunes, les sept étoiles, s’avancent dans le champ enneigé. Loin de tout, au milieu de la montagne et du silence, ils s’apprêtent à quitter tout ce qu’ils connaissent, tout ce qu’ils ont toujours cru connaître, leur monde. Ils ont toujours eu l’impression de ne pas y avoir leur place mais devoir le quitter les tourmente, les effraie, les terrifie. Tandis que Lucie se détache légèrement du groupe, ils se prennent la main et échangent mutuellement des regards qui se veulent réconfortants mais qui ne font que trahir leur angoisse commune.

La jeune louve ferme les yeux et pense à son village, à ses parents, à son clan. Une douce chaleur nait dans son ventre, dans sa poitrine et grandit jusqu’à l’habiter entièrement. Elle tend une main devant elle et laisse l’énergie courir le long de son bras et s’échapper de son corps pour créer un cercle d’or de la taille d’une personne. Dans ce halo se dessine une forêt. La magicienne se retourne, le sourire aux lèvres, les invite à la suivre et s’engouffre dans cette chaude lumière.

Aurore inspire une grande goulée d’air et s’avance à son tour, rapidement suivie de Mathieu et des deux cousines. Laura et Thomas hésitent encore une seconde puis, main dans la main, passent le portail.

Leur première vision de ce nouveau monde est une forêt sombre, peuplée de pins immenses laissant à peine passer la lumière. Seul le bruit de leurs respirations vient troubler le silence qui règne dans cet endroit. L’odeur de la mousse et des feuilles mouillées leur emplit les narines et les apaise un moment : ce nouveau monde ne semble guère très différent du leur.

Ils prennent quelques minutes pour observer leur nouvel environnement. Une sensation étrange les habite. Ils se sentent plus légers, à leur place et en même temps ils ne peuvent se défaire de l’idée qu’ils ne devraient pas se trouver là. La magie qui sommeille au creux de leurs cœurs se réveille, reconnaît ce continent où elle a vu le jour, palpite chaleureusement dans leur poitrine, leur confère le sentiment d’être plus vivants et plus puissants que jamais. Ils se détendent et laisse la joie et l’excitation les envahir petit à petit.

- Bienvenue chez moi, chez vous, murmure Lucie. Vous êtes de retour à la maison. Vous avez manqué à beaucoup de monde.

Dans la forêt silencieuse un oiseau vient se poser sur une branche près d’eux et gazouiller quelques notes mélodieuses qui les accompagnent tandis qu’ils se mettent en route, guidés par Lucie. Ils sont arrivés près du village de la jeune femme et n’ont pas besoin de marcher longtemps pour voir les premières huttes se dessiner au-travers des branchages. Comme l’a décrit l’Animalingua, pas un bruit ne s’élève des petites chaumières, ce qui donne à ce lieu un air abandonné et lugubre.

Une fois sur la clairière centrale, la jeune femme aux cheveux marron aux reflets roux renverse la tête en arrière et pousse un hurlement. Immédiatement le village semble s’éveiller, de l’agitation se fait voir dans les maisonnettes, des gens se regroupent sur les porches en chuchotant.

En brandissant son pendentif à bout de bras Lucie s’exclame :

- Je suis de retour. J’ai retrouvé l’étoile d’Eliane. J’ai retrouvé les étoiles perdues.

Une rumeur se propage dans la petite assemblée, les visages s’éclairent, des sourires se dessinent. Quelques enfants s’approchent des nouveaux venus, aussitôt suivis de leurs parents. Le petit groupe est dévisagé, scruté de haut en bas puis accueilli chaleureusement par le clan qui s’anime. Soudain la foule s’écarte pour laisser passer une jeune femme ressemblant trait pour trait à Lucie. Son corps athlétique uniquement recouvert de peau de bêtes, elle se tient droite face à celle qui a trouvé sa place parmi les Sept. Elles font la même taille et leurs yeux ont la même teinte ambrée. Leur seule différence réside dans leur chevelure ondulée : la première arbore une chevelure rousse, flamboyante, tandis que la seconde possède des cheveux marron foncé à peine éclaircis par quelques reflets roux.

- Lucie, ma sœur, je suis tellement heureuse que tu sois de retour !

- Ambre, comme tu m’as manqué…

Les deux sœurs, les larmes aux yeux, s’embrassent affectueusement. A peine se séparent-elles que l’ordre est donné d’organiser un banquet et de vêtir convenablement leurs hôtes. Leurs habits de l’autre monde sont bien trop voyants et risqueraient de leur attirer des ennuis.

Le peuple Animalingua s’est toujours montré discret et n’a jamais souhaité vivre autrement qu’en harmonie avec la nature, et principalement avec la forêt. Mais depuis la fin de la guerre la Forêt Enchantée n’a fait que se flétrir et mourir à petit feu, ce qui a causé le déclin de ce peuple, aujourd’hui appauvri et en manque de ressources. Il est rare de trouver autre chose que des baies, des feuilles et des racines sur la table. Et dans les garde-robes les seuls vêtements qui ont moins de quinze ans ont été confectionné avec les peaux d’Animalinguas morts de faim, de vieillesse ou de maladie.

La misère n’a pourtant pas entamé la générosité de ce peuple qui, pour la première fois en vingt ans, peut enfin montrer son sens de l’hospitalité, de la solidarité, la richesse de son âme. Pour la première fois en vingt ans les rires fusent, les chants s’élèvent et se mêlent à la fumée du feu de camp qui s’envole au-dessus des cimes. Le repas est frugal mais aux yeux de tous c’est un immense festin, le premier d’une nouvelle ère.

Devant les yeux émerveillés de leurs hôtes, Aurore prend un bol de baies dans ses mains et se concentre, comme elle le fait lors de ses entraînements depuis un an. Un halo lumineux vert entoure ses mains et les baies qui se transforment, pour le bonheur de tous, en fruits sucrés et juteux.

Confiante, elle se lève et transforme le reste de baies et de racines présents sur la table en fruits et en légumes sous les applaudissements du village entier.

A la fin de la soirée, la jeune femme prend une pomme sur la table et l’enterre au centre de la clairière. Les mains posées sur le petit monticule de terre, elle ferme les yeux et le halo vert réapparait. Quelques instants plus tard un magnifique pommier sort du sol et étend ses longues branches chargées de fruits.

Aurore se relève et déclare :

- Je ne peux malheureusement pas faire plus pour vous pour le moment mais je tiens à vous remercier pour tout ce que vous avez fait pour nous aujourd’hui. Je ne veux plus qu’aucun d’entre vous ne meure de faim. Ce n’est pas grand-chose mais cet arbre vous apportera des pommes tout au long de l’année, quels que soient le temps ou la saison. Je sais que vous avez senti sur moi l’odeur des Elfes et pourtant vous m’avez témoigné la même affection qu’à chaque membre de ce groupe, alors que vous ignoriez totalement qui j’étais. Je saurai m’en souvenir, je vous l’assure. Et même si je ne peux pas encore saisir tous les enjeux de votre mésentente, j’espère que ce geste permettra également de calmer quelque peu les tensions qui divisent nos deux peuples. Je n’ai jamais rencontré personne de mon peuple. A dire vrai, il y a un an j’ignorais même que j’avais du sang elfique dans les veines, mais sachez qu’en ce qui me concerne, mes origines ne troubleront jamais ma vision ; pour moi vous êtes des amis, peu importent mon sang et mon ascendance. Je suis l’une des Sept Etoiles, l’une des descendantes d’Edomon, mon devoir, mon but, est de veiller sur tous les peuples, pas de nourrir de vieilles rancœurs. Si vous avez besoin d’aide, je tâcherai de toujours vous apporter mon soutien du mieux que je le peux.

Un silence empli d’admiration et d’émotion répond au discours de la jeune femme jusqu’à ce que les chefs du clan, les parents de Lucie et d’Ambre, s’approchent d’elle et l’invitent à les suivre dans leur foyer.

L’intérieur est très rustique et sobre. Les seules richesses de la famille semblent être quelques fourrures recouvrant les bancs et les lits.

Lyssandre et Azélia sont des chefs très proches de leur peuple. Tout comme leurs prédécesseurs ils ne se sont jamais coupé de la réalité dans laquelle vivent les leurs, ils n’ont jamais cherché à accumuler les richesses aux dépends de la population. Ils se sont contentés d’être des guides, parfois des juges, à l’écoute des autres. Et en ces temps difficiles cette tâche est loin d’être aisée…

Tandis que Lyssandre prépare des infusions pour Azélia et Aurore, les deux femmes s’asseyent sur le banc recouvert de fourrures qui fait office de canapé.

Azélia a connu Lorine il y a de nombreuses années de cela. A une époque elles étaient même très proches toutes les deux. Elle conte avec nostalgie le récit des aventures qu’elles ont vécu côte à côte. Les jeux dans les bois, les entrainements au combat, les premières amours, les compétitions de tir à l’arc... Grâce à Lorine, Azélia était devenue la première Animalingua à manier l’arc de mémoire d’Elfe. Son peuple chassant sous sa forme animale et étant pacifiste, rares étaient ceux qui se servaient d’une arme autre que le lance-pierre.

La Grande Guerre les avait finalement séparées pendant de longues années. Elles ne s’étaient revues que vingt-deux ans auparavant, quand Lorine était venu trouver Azélia pour lui demander de l’aide. Elle était enceinte et avait besoin de cacher son enfant à son mari. Mariée depuis plus de cent-vingt ans au roi des Elfes, Ilinaël Ier, leur amour s’était fané et elle avait cédé à l’adultère. L’enfant qu’elle attendait n’était pas l’enfant d’Ilinaël. Pire, l’enfant n’était même pas d’un autre Elfe et elle craignait pour la vie de ce petit être à venir. Ilinaël pouvait avoir des penchants violents, et malgré ses pouvoirs elle savait qu’elle ne pourrait pas toujours protéger le fruit de ses entrailles. D’autant que les Mariquais avaient déjà entrepris de traquer les Sept et leurs familles. Par conséquent elle avait demandé à Alézia, sa plus grande amie, de prendre soin de l’enfant jusqu’à sa majorité.

- Aurore, ta mère ne m’a jamais révélé qui était ton père. Je sais seulement qu’il était humain. Je suis navrée de ne pas avoir pu tenir ma promesse auprès de ta mère, les choses ne se sont pas déroulées comme prévu… Elle aurait été très fière de celle que tu es devenue.

- Ma mère ? Lorine ? Mais Gérard, notre mentor, nous a dit que les Sept étaient nos grands-parents. Il n’a jamais dit que Lorine était ma mère…

- Je connais Gérard. Au vu de sa relation avec Lorine, il était forcément au courant de la situation. J’ignore pourquoi il t’a caché cette information, il avait sûrement ses raisons.

- Qu’est-il arrivé à ma mère ?

- A ta naissance, Ilinaël a compris que son mariage avait été bafoué. Il a été pris d’une rage terrible et a profité que Lorine était affaiblie pour la tuer. Il a pleuré des heures sur le corps de sa dulcinée. Quand il s’est enfin ressaisi il t’a cherchée afin de te faire subir le même sort. Mais tu avais déjà disparu : un serviteur avait été témoin de la scène par hasard et t’avait enlevée afin de te protéger. D’après ce que m’a dit Gérard à l’époque, sa compagne et lui avaient fui l’Inckya le jour-même pour s’installer dans l’autre monde, loin de la folie meurtrière de ton père. Ton père a étouffé l’affaire en accusant les Mariquais du meurtre de ta mère et de ta disparition. Il a joué les maris éplorés et le peuple a longtemps été en deuil. Aujourd’hui encore, ton triste anniversaire est commémoré par les tiens. Lorine était une souveraine adorée de tous et, de ce que j’ai vu de toi, tu lui succéderas dignement.

- Comment sais-tu tout cela ?

- J’ai tout vu… J’étais dans la chambre lors de ta naissance, cachée sous ma forme féline. Je n’ai pas réussi à intervenir malheureusement et mon amie est morte sous mes yeux. Tu as été sauvée et j’ai préféré faire confiance à ce serviteur plutôt que de m’exposer : si j’avais été découverte, les Elfes de toute la Forêt Enchantée auraient tenté de me faire la peau et nous auraient potentiellement déclaré la guerre. Quelques jours avant de mourir, Lorine m’a donné une boîte pour toi. Je ne l’ai jamais ouverte.

Azélia se lève et farfouille dans une malle. Elle en sort une boite en bois agrémentée de fer forgé qu’elle donne à Aurore.

A l’intérieur elle y découvre une cape elfique ornée d’une délicate broche en argent et pierres précieuses, un diadème doré, une bague et une lettre pliée en quatre.

« Aurore, ma fille,

Si tu lis ces lignes cela signifie probablement que je suis morte. Félicitations pour être devenue l’une des Sept.

Je suis désolée de ne pas avoir pu être là pour tous les moments qui ont comptés pour toi, de ne pas avoir été une bonne mère. C’est ma faute c’est vrai, je n’ai pas tenu la promesse faite lors de mon mariage, je ne t’ai pas donné les bonnes cartes pour te lancer dans la vie. J’ai essayé de rattraper cette erreur, j’espère sincèrement que mes efforts auront porté leurs fruits et que tu auras eu une vie heureuse, entourée de personnes aimantes. J’aurais été tellement fière de te voir grandir, de te tenir la main sur ce chemin, de t’entendre m’appeler « Maman », de te serrer contre mon cœur. J’ai toujours rêvé d’être mère…

Ton histoire ne fait que commencer. J’ignore si tu as eu la chance de grandir auprès d’Alézia comme je lui avais demandé ou si tu as été envoyée dans l’autre monde, avec les enfants de mes amis, mais je sais que tu trouveras ce message. Du moins je le souhaite de tout mon cœur. Je sais que tu deviendras une grande femme, c’est dans ton sang. J’espère que tu vivras autant d’aventures que j’en ai vécues, que ta mémoire débordera d’anecdotes à conter à tes enfants et petits-enfants au coin du feu, que ta vie sera remplie de joie et de bonheur, que tu seras plus comblée que je ne l’ai jamais été. Marie-toi par amour, tu es la seule à pouvoir savoir quelle est la personne qui te conviendra le mieux pour le restant de tes jours. Je t’aime ma fille, même si je ne te connais pas. Je t’aime de tout mon cœur, de tout mon être. Je t’aime comme j’ai aimé ton père, du premier jour jusqu’au dernier. Je t’aime comme je n’ai jamais pu aimer mon mari. Et malgré les conséquences, je ne regrette rien. Je suis heureuse d’avoir aimé ton père. Aussi courte que fut notre romance, elle a donné tout son sens à mon existence. Je suis heureuse de t’avoir donné la vie, que tu sois sa fille. Et si je te connaissais aujourd’hui, je serais heureuse de contempler celle que tu es devenue.

Je te souhaite une merveilleuse destinée. Je ne peux malheureusement pas voir celle que tu deviendras mais mon amour t’accompagnera toujours. Je ne peux pas non plus te révéler l’identité de ton père : si quelqu’un venait à découvrir ce papier, il serait dans une bien sombre tourmente. Je suis toutefois persuadée que tu le retrouveras, ton cœur te guidera. Ton cœur te guidera toujours, quelle que soit la situation, fais-lui confiance, écoute-le.

Puissions-nous un jour nous retrouver dans le royaume des cieux.

Je t’aime,

Lorine

P.S. : Le diadème que tu trouveras dans ce coffret m’a été offert par ma mère à ma majorité. Elle l’avait reçu par sa mère au même âge. Puisse la tradition se perpétuer. J’aurais aimé te voir le porter, j’espère qu’il te siéra autant qu’à moi. Tu dois être une magnifique jeune femme aujourd’hui… Il faut que tu saches que j’étais Reine des Elfes de la Forêt Enchantée. Mon mari, Ilinaël n’est devenu Roi qu’à la suite de notre mariage. Cela signifie qu’à ma mort, la couronne te revient. Il peut assurer la régence jusqu’à ta majorité mais ensuite, le pouvoir te reviendra. Je doute qu’il consente à te le donner : tu n’es pas sa fille, tu n’es qu’à moitié Elfe et tu as probablement disparu des radars un bon moment. Peu importent ses arguments, tu es mon unique enfant, ce trône est ton droit de naissance et nul ne peut te l’enlever. Le peuple te soutiendra. Ne laisse personne t’intimider ma princesse, je veillerai toujours sur toi. »

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