Les talons aiguilles

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L'heure des talons aiguilles.

Quand il n'y a plus personne dans le lycée, et que la pendule vient de sonner, vient l'heure des talons aiguilles. Ils sillonnent les pavés, faisant résonner les espaces vides d'un son sec et répété. Menaçants, ils surveillent, curieux, ils inspectent, arpentant sans relâche les couloirs du bâtiment. Tac, tac tac. Un écho sur le sol froid. Ils montent et descendent les degrés, sans relâche. Et s'ils rencontrent une paire de semelles plates et usées, se traînant nonchalamment le long des salles de classe, ils la chassent de manière impitoyable. Parfois, c'est une autre paire de talons hauts qu'ils sont amenés à rencontrer. Alors ils se tournent autour, s'examinent l'un l'autre. Et se quittent souvent en bonne entente, dans un double retentissement. Taca tac taca tac, taca tac .

Enfin, les talons aiguilles se retrouvent à nouveau seuls à arpenter leur royaume. 

Mais bientôt, une sonnerie stridente traverse l'air, rompant le silence fractionné qui s'était installé. Les portes s'ouvrent, et des centaines de talons divers affluent dans les couloirs et dans le hall. C'est une jungle dans laquelle les talons aiguilles disparaissent, entre des ballerines sautillantes, des baskets flamboyantes qui avancent de manière assurée, ou bien encore des escarpins noirs qui s'approchent timidement de jolies rangers usées. Les talons claquent, les espadrilles frissent, le tout dans une cohue incroyable de semelles qui se croisent et s'entre-croisent, dans un capharnaüm de formes et de couleurs.

La sonnerie retentit de nouveau. Et le brouhaha du hall commence déjà à s'éloigner. Chacun se rend là où il doit désormais être.  Des talons compensés se hâtent, frénétiques. Les portes se referment dans un bruit mat. Silence. La pendule tourne. Dans une heure, ce sera à nouveau le même vacarme désordonné. Comme tous les jours. Pour le moment, les pavés se taisent. Ils attendent. Quelque part dans un couloir sombre, des ballerines jaunes. Silence. Tac tac tac tac. L'heure des talons aiguilles est revenue. 

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