6. Disparue

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Maëlle, une jeune violoniste est en train de jouer devant la Tour Eiffel. Elle a pris l’habitude d’y venir tous les jours pour se faire un peu de sous. Aujourd’hui il y a du monde qui l’écoute, elle est aux anges. Avec son violon, elle se sent forte. Rien ne peut l’atteindre !

Tout d’un coup un grand bruit se fait entendre. Elle regarde vers le ciel et n’en croit pas ses yeux... Un avion fonce droit sur elle. Il est énorme et se rapproche à une telle vitesse... ! Après une demie seconde de tétanie, l’instinct de survie prend le dessus. Elle empoigne son violon par le manche et court comme elle n’a jamais couru. Le choc de l’avion qui s’écrase sur la Tour Eiffel la projette par terre. Elle n’ose pas se retourner. Elle a peur de ce qu’elle va voir, elle sait qu’elle ne pourra jamais l’enlever de son esprit... Des cris, des hurlements et des plaintes se font petits à petits entendre parmi les piétons qui étaient au pied de la Tour Eiffel. Maëlle sait qu’il faut qu’elle aille voir si elle peut aider les gens blessés. Alors elle prend son courage à deux mains et fait volte-face. Ce qu’elle voit est une scène qu’on n’est pas censé voir dans une vie... uniquement dans les films. C’est un carnage. L’avion n’est plus qu’une épave... Il s’est cassé en plusieurs morceaux et est dévoré par des flammes. La partie avant n’existe tout simplement plus. Seule une petite partie à encore une forme qui peut faire penser à un avion. Au sol, des dizaines et des dizaines de personnes sont à terre, mortes ou vivantes. La Tour Eiffel quant à elle, a totalement disparue.

Maëlle s’approche. Tout à coup, elle voit une jeune femme qui essaye de sortir de l’avion en flamme. Elle se précipite à son secours. C’est Margaux qui essaye tant bien que mal de s’extirper de l’appareil. Elle n’a même plus peur et sens à peine la douleur. Pourtant, elle a bien vu sa jambe couverte de sang. C’est là qu’elle voit Maëlle qui court vers elle. Ça y est, elle est sauvée. Le cauchemar est terminé. Elle s’effondre en larmes dans les bras de Maëlle et pense à ses parents qu’elle va bientôt pouvoir serrer dans ses bras. Elle a des milliers de choses à leur dire. Mais une chose est plus importante que les autres : « Je t’aime ».

Julio ouvre les yeux. Est-il est mort ? Oh mon dieu non ! Il peine à comprendre ce qu’il voit. Devant lui, il y a des flammes, des câbles qui pendent, des débris de partout. Des gens crient. Il sursaute. Anna. Où est Anna ? Il se détache en hâte et se lève. A côté de lui, le siège d’Anna a disparu. Il se retourne... L’arrière de l’avion n’est plus là non plus. Une femme lui agrippe le bras. Il laisse échapper un hurlement... Une douleur lancinante l’irradie au niveau de l’épaule. Mais la femme hurle. Elle a perdu son fils. Julio essaye de la faire sortir « Il faut sortir d’ici... Il faut sortir... ». Mais la jeune femme se débat, elle s’accroche aux sièges, elle pleure. « Je vais chercher votre fils, mais il faut que vous sortiez ». Deux passagers viennent au secours de Julio, prennent la femme avec eux et la traîne dehors.

Julio se déplace comme il peut dans ce qu’il reste de la cabine. Il enjambe des corps sans vie, détache des ceintures, aide quelques passagers à sortir mais il doit se rendre à l’évidence... Peu d’entre eux ont survécu. Et aucune trace du petit garçon de la jeune maman... Ni d’Anna. Il hurle aussi fort qu’il le peut le prénom de la jeune hôtesse mais personne ne lui répond... « Anna !! ANNA !!! ANNAAA !!! ». Il retourne tout ce qu’il trouve mais rien. Le feu gagne du terrain, il peine à respirer et à voir quelque chose à cause de la fumée. Il faut qu’il sorte. Mais il ne peut se résigner à sortir sans elle... Il hurle une nouvelle fois. Sans réponse.

C’est là qu’il aperçoit un tout petit garçon. Il le reconnaît tout de suite : c’est à lui qu’Anna avait ramené un bout de nuage. D’ailleurs, il tient toujours son gobelet au creux de ses mains. Il est recroquevillé entre deux sièges, tétanisé. Julio s’approche de lui : « Hey ! Je m’appelle Julio. Tu viens avec moi ? Je pense qu’il y a ta maman qui t’attends dehors ! ». Le petit bonhomme écarte les bras et Julio le cale sur son épaule valide. C’est ensemble qu’ils sortent de la carlingue en flamme.

La jeune femme qui avait agrippé le bras de Julio quelques minutes plus tôt se précipite sur lui en pleurant. Elle lui arrache presque le petit garçon et le serre dans ses bras en s’écroulant sur le sol. Elle ne le lâchera que quelques minutes plus tard, quand les pompiers viendront vers eux pour faire les premiers soins.

Quelques mètres plus loin, on peut apercevoir le bout de l’appareil. La cabine arrière où de nombreux passagers s’étaient réfugiés. Il ne reste presque rien... Le peu qu’il reste se consume sous les flammes. Un homme pourtant en sort. Incroyable. Il semble être le seul survivant de l’arrière de l’avion. C’est Sandro. Il est blessé mais vivant. Comme à son habitude, les premiers mots qui sortent de sa bouche sont des jurons. Il appelle à l’aide « Venez me chercher bande d’incapable, je suis blessé ! ». Quelques personnes, témoins de l’accident accourent vers lui. Le jeune homme est désagréable, il se tord dans tous les sens en insultant tous ceux qui ont le malheur de le toucher.

D’un coup, un gros bruit. Un bout de l’appareil vient d’exploser. Un corps tombe à terre. C’est celui de Camille. Un homme accourt vers elle, mais il ne peut que constater le pire... La jeune hôtesse de l’air est morte. Elle est à peine reconnaissable suite à l’explosion. L’homme pose une couverture sur elle comme pour la protéger du chaos qui l’entoure. Elle est partie en direction de son dernier voyage : rejoindre les plus belles étoiles.

Les sirènes de pompiers qui arrivent en hurlant couvrent la voix de Julio, toujours à la recherche d’Anna. Il inspecte méticuleusement chaque recoin. Elle peut être n’importe où... L’une des ailes a été projetée plusieurs mètres plus loin alors que dire d’un corps aussi frêle que celui d’Anna.

Il croise Margaux, toujours prostrée dans les bras de Maëlle. Mais il ne peut pas s’arrêter. Il passe derrière l’avion, enjambe des dizaines de débris, de corps, de choses qu’il ne veut absolument pas imaginer... D’un seul coup, il entend au loin un pleur d’enfant. Il court en direction des pleurs et découvre Nina, la petite fille dont la maman est décédée dans l’avion. La jeune enfant est couverte de sang et c’est avec horreur que Julio découvre qu’il lui manque une jambe. Il la prend aussi doucement qu’il peut et se dirige atterré vers l’un des camions de pompiers qui vient tout juste d’arriver. Les secouristes descendent en hâte du véhicule et prennent immédiatement la petite fille en charge. Julio, lui, se retrouve seul avec l’image d’Anna qui le hante. Il s’empêche de penser au pire, mais commence à avoir du mal à rester positif...

Il a l’impression d’être dans une autre dimension. Tout le monde s’agite autour de lui ; les pompiers qui font leur possible pour secourir les blessés, les gens qui crient de douleur ou d’effroi, les policiers et les journalistes qui commencent à affluer. Alors qu’il regarde cette scène surréaliste, il aperçoit un bout d’uniforme. Le même que le sien.

Anna !

Il se précipite vers elle, le cœur battant à tout rompre. Lui qui n’a jamais été croyant, envoie une prière discrète au ciel. Pourvu qu’elle soit vivante. Il ne peut pas la perdre. Pas elle. Pas maintenant. S’il-vous-plaît... Pourvu qu’elle soit vivante. Faîtes qu’elle soit vivante.

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