Chapitre 21 : Jenna

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- Tu veux venir chez moi ?

Si Lynn savait où j'habitais, il n'avait pas encore mis les pieds dans l'immeuble. Lorsqu'on se voyait et qu'il me raccompagnait, il ne faisait toujours que me déposer à la porte. Quand nous passions plus que la soirée ensemble, la nuit, voire le week-end, nous nous étions toujours retrouvés chez lui, pour le moment. Or ce soir-là, après cette première répétition à laquelle j'avais assisté, j'avais envie de rentrer chez moi.

Je le vis hésiter, puis finalement, il accepta. Nous quittâmes donc le local assez rapidement et il nous conduisit jusqu'à l'appartement. Il faisait froid, le vent était coupant, et je n'étais pas fâchée d'arriver. Mais je reconnaissais qu'avec la moto, on allait bien plus vite d'un endroit à un autre et que c'était aussi plus agréable que les transports en commun.

Il gara la moto à l'abri d'un mur, puis me rejoignit. J'avais ouvert la porte et la retenais, tout en restant à l'abri du hall d'entrée. Alors que nous montions les deux étages, il eut un petit sifflement d'admiration :

- Mazette ! C'est classe, ici, baby.

- Ce n'est pas moi qui ai choisi l'appartement, mais mes parents, expliquai-je. Mais je reconnais que ça a du standing.

- Ouaip, c'est ça. Du standing. Ca doit coûter une blinde, le loyer...

Je haussai les épaules. Il avait certainement raison, mais je ne m'occupais pas de cela : c'était mon père qui avait tout organisé pour la location, et même pour que je puisse avoir un box pour ma voiture. Je n'avais pas à gérer cet aspect de ma vie quotidienne, juste à m'occuper de mes études et de quelques à-côtés, comme la nourriture, mes vêtements, les ouvrages et le matériel dont je pouvais avoir besoin à l'école.

Nous arrivâmes sur le palier, j'ouvris la porte et nous entrâmes. Il insista un peu pour frotter ses bottes sur le paillasson, comme s'il avait craint de salir l'intérieur.

- Laisse tes bottes et ton blouson, là, dis-je en désignant le porte-manteau fixé au mur et les étagères où je rangeais mes propres chaussures.

Et je me débarrassai moi aussi de mon blouson, accrochai mon manteau qui se trouvait à chaque voyage dans le coffre de la moto, et retirai mes bottes. Je frissonnai encore du trajet et je proposai alors :

- Tu veux un thé ? J'ai pas très chaud.

- Si tu veux, baby, j'connais un bon moyen de te réchauffer...

Je souris et le laissai m'enlacer. Ses bras m'entourèrent, ses lèvres se posèrent sur les miennes et très vite, je n'eus plus froid du tout.

- C'est où, ta chambre ? C't'un vrai palace, ici, baby, j'vais m'perdre... me murmura-t-il à l'oreille d'un ton enjoué.

- Viens, dis-je en lui prenant la main. Ce n'est pas si grand que cela, même s'il y a une pièce de plus que chez toi. Là, le salon, la cuisine à ta droite et ma chambre donne sur le petit couloir au bout, à gauche. Et la salle de bain à côté.

Il me lâcha la main, s'avança vers la grande fenêtre pour jeter un œil au-dehors. Il eut un nouveau sifflement admiratif :

- T'as une belle vue, baby. T'es pas dérangée par les voisins en face...

- C'est vrai, reconnus-je. C'est très calme. J'ai besoin de ce calme aussi pour bien travailler, le soir, faire mes révisions.

- T'es studieuse, aussi. C'est bien. C'est vrai qu'c'est important, l'endroit où on bosse, pour se sentir bien.

Je le fixai un moment. Il était toujours devant la fenêtre à regarder au-dehors. Je saisis l'occasion :

- Tu ne m'as pas dit encore où tu travaillais, Lynn, fis-je d'un ton innocent, comme si je lui avais demandé s'il voulait une tasse jaune ou une rouge - tout en me doutant qu'il aurait répondu noire.

- Où j'travaille ? Tu connais maintenant, baby. C'est la salle de répét'. T'as vu qu'c'est sécurisé, on peut y laisser les instruments, même si Stair et Ruggy préfèrent ramener leur basse et leur guitare à chaque fois. J'comprends, ce sont de bons instruments et pour Stair, sa basse, c'est une semi-collector. Faite main, par un luthier. Et c'est bien isolé, on dérange pas les voisins, comme ton parc, là, il te dérange pas non plus.

J'eus un petit sourire : Lynn et son art de noyer le poisson, de ne pas répondre à une question quand il n'en avait pas envie.

- Ce n'est pas le seul endroit où tu travailles, fis-je remarquer.

Je savais que j'insistais un peu, mais je voulais vraiment le connaître encore mieux. Et je me doutais bien que les cachets dans les bars ou les petites salles ne suffisaient pas à le faire vivre au quotidien, il me l'avait d'ailleurs déjà laissé entendre. Je le vis lever légèrement les sourcils, avant de les froncer un peu plus, puis baisser brièvement les yeux avant de se tourner vers moi et me fixer. Puis il se rapprocha de moi, comme un lion s'approchant de sa proie. J'en frémis.

- T'es bien curieuse, baby... fit-il en me prenant dans ses bras. J'croyais qu'tu voulais que j'te réchauffe...

- C'est vrai, reconnus-je en passant mes bras autour de son cou. Mais pourquoi tu ne veux pas répondre à ma question avant ?

- Pff... lâcha-t-il en soupirant. T'es têtue, baby.

- Oui, un peu, lui souris-je. Têtue et un peu curieuse, je le reconnais. Mais c'est parce que j'ai envie d'apprendre à mieux te connaître. Cela dit... si tu ne veux pas me répondre, je ne me vexerai pas.

- T'as gagné. Mais te moque pas de moi, hein...

- Je n'en ai pas l'intention, dis-je soudain sérieuse.

- J'bosse pour un supermarché. J'commence tôt l'matin, 5h. J'décharge les camions de livraison. Rangement dans l'entrepôt, puis après, j'prépare des chargements plus petits, des grands cartons quand même, sur des palettes, pour les collègues qui placent les marchandises en rayon. C'est pas épanouissant, c'est mal payé, mais ça a un avantage : à 13h, j'ai fini ma journée et j'peux passer l'après-midi à répéter. Puis c'est un contrat fixe, j'vais pas m'retrouver sans rien du jour au lendemain.

- Je comprends. Il n'y a pas de sot métier, Lynn, et ce que tu fais, ça rend service à d'autres.

- Ouais, bof.

- Mais je comprends aussi que tu sois très motivé pour faire avancer le groupe, pour pouvoir vivre de ta musique, de votre musique. C'est un bel objectif.

Il sourit doucement. Je me hissai sur la pointe des pieds pour l'embrasser longuement. Il me serra un peu plus contre lui, puis je l'entraînai vers ma chambre.

Avant qu'on se déshabille l'un l'autre, je lui soufflai :

- Tu vas me quitter tôt demain matin, alors profitons-en.

**

Et nous en profitâmes vite. J'adorais être avec lui pour la nuit. Je ne regrettais nullement de l'avoir choisi, qu'il soit mon véritable premier petit ami, celui avec lequel j'avais été jusqu'au bout. J'adorais faire l'amour avec lui, j'avais le sentiment aussi que nous étions sur la même longueur d'onde, passant de la tendresse à la fougue, de l'aventure au plaisir le plus intense.

Il savait éveiller mon corps, faire battre mon cœur follement, pour que je n'aie plus qu'un désir : ne plus faire qu'une avec lui.

Et ce soir-là ne dérogea pas à la règle, bien au contraire. Et je dirais même que nous allâmes encore au-delà de ce dont j'avais commencé à prendre l'habitude.

Après notre première étreinte, alors que je somnolais un peu, savourant encore de le sentir tout contre moi, appréciant tout à la fois la douceur de sa peau, le côté piquant de sa barbe, la fermeté de ses muscles, son odeur légèrement musquée, il me souffla à l'oreille :

- Y'a pas à dire, baby, l'est confortable aussi, ton lit.

J'éclatai de rire, tournai la tête vers lui. Son petit trait d'humour l'avait franchement amusé et il souriait de toutes ses dents. Puis il me demanda :

- J'peux m'prendre une douche, baby ? Comme ça, d'main matin, je file, j'te réveille pas...

- Ok, si tu veux.

Je me levai avec lui, pour lui sortir une serviette de l'armoire, puis je retournai me blottir sous les draps. Je n'étais pas mécontente qu'il ait accepté de venir : moi aussi, j'avais envie de retrouver notre odeur, les parfums de notre amour, dans mes draps.

Alors que j'écoutais l'eau ruisseler sur la paroi de la douche, de l'autre côté du mur, je songeai à ce qu'il m'avait enfin avoué, ce travail qu'il faisait. Et je mesurais encore plus ce qu'était sa vie, je comprenais aussi qu'il vivait vraiment chichement, qu'il ne faisait pas de dépense superflue. Et que c'était aussi peut-être une des raisons pour lesquelles on ne se voyait pas plus en semaine : il n'aurait pu m'offrir plus qu'une sortie dans un pub. Je me promis alors de tout faire pour payer ma part et la sienne plus souvent, si tant était qu'il me laisserait faire. Il avait sa fierté aussi, et ce ne serait sans doute pas facile de passer par-dessus. Malgré mes tentatives, il avait toujours refusé que je règle nos consomations. Il faudrait que je m'y prenne autrement, j'allais y réfléchir. Mais, de même que je l'éprouvais pour Ally qui travaillait pour se payer ses études, je ressentis aussi beaucoup d'admiration pour lui, pour sa volonté, son courage, cette façon qu'il avait de vouloir "s'arracher" et qu'il partageait très certainement avec les trois autres membres du groupe, car même sans les connaître encore bien, je me doutais qu'ils vivaient eux aussi un peu à la manière de Lynn. Ruggy habitait chez sa mère, Stair peut-être encore chez ses parents, je n'en étais pas certaine, mais cela me semblait plausible. Snoog, je l'avais entendu dire, avait sa propre piaule. Ce qui ne m'étonnait pas vraiment, compte tenu de son mode de vie et de "consommation" de groupies après les concerts. Il avait besoin de sa propre liberté. Et il y avait sans doute aspiré au moins aussi fort que Lynn, je le devinais.

**

- Et si tu t'occupais de moi, baby ?

Je tournai mon visage vers Lynn, un peu étonnée. Il m'avait rejointe après sa douche et nous avions repris nos caresses. Je n'avais finalement plus du tout sommeil.

- Comment ça ? demandai-je.

- T'as pas envie de t'occuper de moi ? fit-il en réponse, son petit sourire se dessinant au coin de ses lèvres.

Je le fixai, toujours incrédule. Qu'est-ce qu'il entendait par "s'occuper de lui ?".

- Caresse-moi, baby, me dit-il avec tendresse. J'ai envie de sentir tes mains sur moi.

- Ok.

Je m'exécutai et fis courir mes mains sur ses bras, son torse, dessinant chacun des muscles que je sentais rouler sous mes doigts. Son regard devenait plus sombre, plus brûlant. Le désir grandissait dans mon ventre et ma respiration s'accélérait : il n'y avait pas que lorsque lui me touchait que je pouvais être excitée. L'inverse était vrai aussi.

- Continue, baby, c'est super bon, m'encouragea-t-il.

Mise en confiance par ses mots, je me décidai à l'embrasser aussi, un peu partout. Puis je me couchai sur lui, pour pouvoir poursuivre mes caresses et mes baisers plus facilement. Il me laissait faire, sa main passait simplement de temps à autre sur mon bras ou dans mes cheveux. Quand mon visage se posa sur son ventre, que mes lèvres caressèrent ses abdominaux bien fermes, il me souffla :

- Plus bas, baby.

Je descendis un peu, tout en restant sur son ventre.

- Encore plus bas, insista-t-il en poussant doucement ma tête vers son sexe.

Je relevai mon visage et le fixai, les yeux ronds, pas du tout certaine de ce qu'il voulait vraiment :

- Tu veux que...

- Ouaip. C'est ça que j'veux, baby.

- Mais...

- Mais quoi ? Je viens de prendre ma douche, je suis propre comme un sou neuf !

Je comprenais maintenant, mais j'hésitais vraiment. Et pour tout avouer, cela me rebutait un peu. Je déglutis et dis :

- Mais je l'ai jamais fait !

- Je sais bien qu'tu l'as jamais fait ! répliqua-t-il, un peu attendri. Mais justement ! T'as pas envie d'essayer ? Moi, quand j'te lèche là, t'adores ça, non ?

Je hochai la tête : oui, c'était vrai. J'adorais ça. Et je compris alors que ça pourrait être bon pour lui aussi. Et je devais bien reconnaître que c'était finalement assez tentant. Je reposai alors ma tête sur son bas-ventre et commençai à caresser son sexe déjà durci.

- J'vais te guider, baby, me dit-il avec douceur. Faut qu't'apprennes...

Et j'appris, me laissant guider par ses mots, ses gestes, mais aussi ses réactions. L'entendre gémir et soupirer, c'était gratifiant. J'en ressentis un étonnant sentiment de joie, que je ne m'attendais pas à éprouver. Puis j'appris aussi à lui mettre un préservatif et je compris alors que c'était là un vrai moment d'échange et de partage. Que le plaisir, ça pouvait se donner de bien des façons. Et qu'il allait adorer quand j'allais me sentir plus en confiance et prête à prendre bien des initiatives...

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