En route vers la campagne

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FACE A LA MEEEEEEEER ! J’AURAIS DÛ GRANDIR !

FACE CONTRE TEEEEEEEEERRE ! J’AURAIS PU MOURIR ! (1)

Je n’en peux plus ! La conductrice hurle à tue-tête une musique de Calogero et Passi, enfin, la reprise d’Ultra Vomit, un groupe de métal français. Les vitres de la voiture tremblent sous l’assaut des basses alors que nous filons sur des routes de campagne à plus de 100km/h … et… moi seule m’en inquiète ! Symphonie rit aux éclats à l’arrière tandis que je me cramponne à ma ceinture.

  • Et bien, claire ? Tu m’as l’air un peu pâlotte !
  • Fais-moi desceeeeeeeeeeendre !!
  • Jamais !
  • C’est un enlèvement !
  • Totalement.

Comme pour appuyer ses dires, sa petite-amie, cette traîtresse, m’enserre soudainement de ses bras afin de me clouer au siège. Je pousse un cri ou se mêle stupeur et colère. Mon visage se tourne à moitié vers elle.

  • Toi, remets ta ceinture ! Espèce de glandue !

Elle secoue vivement la tête sans se départir de son air amusé. Mon courroux sera terrible, du moins si on en ressort vivantes. Une idée germe soudainement dans mon esprit.

  • RADAAAAR !!! Hurle-je en pointant du doigt l’avant de la voiture.

Hélène écrase la pédale de frein, nous faisant passer de 108 à 80 km/h en trois secondes ! Je peux sentir mon siège plier lorsque Symphonie s’y écrase. C’est au tour des deux autres de paraître tout droit sorties d’une attraction d’horreur, et à moi de m’esclaffer. Symphonie se remet en place en marmonnant des choses incompréhensibles. Le ‘’clips’’ que fait sa ceinture sonne comme une douce mélodie à mes oreilles.

  • Mmmh. Tu nous l’as vexée. Constate Hélène en jetant un rapide regard à l’arrière.
  • Elle avait qu’à mettre sa ceinture. Je suis tout sourire, tend même un chocolat à Symphonie en signe de paix, mais elle m’ignore. Pour combien de temps ?

La musique se termine, Hélène coupe son IPod pour nous laisser un peu de calme. Nous traversons actuellement une forêt, seules sur la route. J’ouvre la fenêtre en passant à moitié la tête à l’extérieur. Je ferme les yeux et laisse le vent jouer avec mes cheveux. Un début de somnolence me prend. J’aurais presque l’impression que tout va bien. Mon esprit s’envole avec les feuilles alors que remonte à mon esprit une berceuse que me chantait ma mère pour m’endormir étant petite.

De - main, le jour s’ra là, et les oiseaux, chanteront leur joie.

Tes paupières d’or, s’ouvriront, sur le Soleil, et sur sa chanson.

Ferme les yeux, c’est merveilleux, et dans tes rêves, toutes les fées,

Viendront te réveiller.

Fais dodo …

Pourquoi tu dors pas ?

Mmmh - Mmmmmh - Mmh - Mmh - Mmmh - Mmh - Mmh – Mmmh (2)

Je souris mentalement. Elle adorait Bénabar. Les chansons qui racontent une histoire étaient ses préférées, et donc fatalement les miennes également, même si je m’étais orientée vers le rock ces dernières années.

Je finis par rentrer dans l’habitacle. Je fais rire les deux femmes. J’ai les cheveux dans tous les sens et une expression béate sur le visage. Je m’attelle à les remettre en ordre lorsque je vois un petit mot être passé de l’arrière à l’avant. Je tente de l’intercepter pour ne pas déconcentrer Hélène, mais elle est plus agile que moi et l’attrape de deux doigts. Je suis une fille chiante en voiture et je déteste particulièrement quand elles communiquent par écrit alors qu’elle conduit ! Je grogne en croisant les bras pour leur faire comprendre que je désapprouve. Symphonie me tapote amicalement la joue alors qu’Hélène se met à rire tout en froissant le papier qu’elle jette dans une petite poubelle déjà bien remplie de mots similaires.

  • Ce que j’ai dit à l’inspecteur pour qu’il ait l’air d’un cadavre ? Sans quitter des yeux la route, elle attrape la main de Symphonie posée sur son épaule qu’elle serre fort alors que sa voix devient glaciale. Je lui ai dit, avec le plus grand calme, que s’il devait encore arriver quoi que ce soit à l’une de vous deux, surtout ma folle-dingue personnelle, je lui couperai les couilles avant de les lui faire bouffer.

Nous la regardons sans rien dire. Elle n’a pas l’air de plaisanter. Symphonie pousse brusquement une sorte de miaulement qui se veut mignon en cherchant à lui embrasser le cou. Elle aura tenu moins d’une minute avant de détacher sa ceinture ! Une vraie enfant… Je soupire en les regardants se chamailler, renonçant à faire remarquer que la voiture roule en zigzag sur une ligne droite.

Le soleil commence à se faire bas sur la ligne d’horizon. Nous roulons depuis deux heures, plus la pause que j’ai obligée Hélène à prendre. Elles ont échangé leur place. J’avais bien proposé de prendre la relève, mais elles ont décliné. J’ai senti une réticence à l’idée que je prenne en main un volant, mais je n’ai pas insisté. Je suis considérée comme une chose fragile, je l’ai accepté.

La batterie de l’IPod s’est vidée, nous sommes donc en charge avec Hélène de chanter l’une après l’autre, ordre de Symphonie ! J’ai accepté à la condition que tout le monde porte sa ceinture. Je viens de terminer une chanson de Jeanne Cherhal. Je ne suis pas très fière de mon timbre de voix, préférant laisser Hélène chanter. Cette dernière a raté sa vocation selon Symphonie. C’est vrai qu’elle a une impressionnante culture musicale et une très belle voix. Mon amie m’avait confié un soir que c’était ce qui la faisait le plus craquer chez elle. Pour s’accorder avec l’ambiance de la fin de journée, elle s’est orientée sur des chansons douces, presque des comptines. Actuellement, elle chante la complainte du Geek de la série Noob.

(…) Mon clavier azerty est tatoué sur mon front, ma joue et mon menton.

Mon perso immobile m’attend depuis longtemps

Oh Ooooh Ooooooh Ooooooh Ooooooh (3)

Nous sommes sous le charme. Je commence même à m’assoupir lorsque la voiture amorce un ralentissement.

  • Enfin arrivées ! Bienvenues chez mes anciens, les jeunes !

Hélène sort la première en allant se jeter dans les bras de deux personnes âgées venues nous accueillir. C’est la première fois que je les rencontre. Ils embrassent également Symphonie, puis vient mon tour. J’ai le droit à 15 000 remarques sur ma tenue, tout ce qu’on leur a raconté sur moi, mais également le beau temps ou l’état de la politique française. Je les écoute en souriant. La grand-mère s’inquiète pour un rien. Elle demande à Hélène si la route était bonne, il paraît que des sangliers traversent les voies en ce moment. Elle morigène Symphonie en découvrant son bandage au bras. Cette dernière essaye de la faire taire alors que nous échangeons un regard gêné, avant qu’elle ne se concentre sur moi.

  • Ma pauvre fille ! Qu’est-ce qui est arrivé à ton cou ?! Elle se saisit de mon menton pour me forcer à relever la tête. Je ne m’y attendais pas et en oublie de réagir.

Elle observe ma balafre à l’aide des lumières extérieures. Hélène récupère son attention en apportant nos affaires à l’intérieur. Une fois seules, Symphonie me sert fort contre elle, ayant visiblement peur que je sombre à nouveau. Je ne lui oppose pas de résistance, me laisse faire, la tête ailleurs. Tout paraît si calme ici… Si noir…

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(1) : https://www.youtube.com/watch?v=5IvzpNw4PHU

(2) : https://www.youtube.com/watch?v=zAoO52K-7Mo

(3) : https://www.youtube.com/watch?v=q9_15FFHhj0

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