35. Flat & Drive

2 minutes de lecture

"Où devons-nous aller, nous qui errons sur cette terre désolée, en quête du meilleur de nous-même ?"
Mad Max : Fury Road

Il y a des moments où on se sent crevé. Voilà, j'ai atteint mon plat pays intérieur et c'est morne plaine à perte de vue. Après avoir passé cinq semaines à m'imaginer grimpante et sautillante, au finish je suis... rampante. Étendue façon flaque. Comme un cycliste malheureux dont le pneu est à plat et qui se fait doubler par tout le peloton. Le podium lui échappe un peu plus avec chaque concurrent qui le dépasse sans un regard.

J'ai l'impression d'être dans la réserve, pas très loin de la panne sèche. Une panne d'inspiration, d'idée, de motivation. Dans cet état pas très agréable, je n'ai plus rien à sortir. La "page blanche" est l'expression consacrée. Je me sens vidée.

C'est un entre-deux bizarre, cette fin de radiothérapie. Au lieu du soulagement attendu, il me reste une peau rouge et douloureuse que je crème et surcrème, un état semi-léthargique dont je n'arrive pas à me débarrasser malgré mes ébrouements nerveux et puis l'attente des tests à la rentrée. Je suis fa-ti-guée. Fatiguée à en pleurer, tellement que je n'en dors plus. C'est un cercle vicieux et agaçant, je me claquerai à chouiner comme ça. Trop d'efforts, flûte.

Les Trolls m'ont secouée répétitivement et m'ont maintenue, à force de marathons de films d'été, de Mastermind, de disputes et de câlins. Je le leur ai bien rendu à coup de cahiers de vacances, de missions quotidiennes et de bisous. Cette partie de moi a continué à fonctionner au carburant anthropophage de l'amour maternel.

Je me suis imposée le sauvetage du poisson rouge et le lasurage des volets pour me prouver que j'étais encore là, enfouie quelque part dans cette mélasse post-radio. Des réalisations positives et nécessaires. Puis mes dernières onces de motivation ont séché sur les volets avec la lasure anthracite et j'ai laissé le chantier en plan. Quand enfin il n'y a plus eu d'obligations, d'horaires et de rendez-vous, ma coquille urbaine et mécanique qui fonctionne en auto-pilote a ramassé tous ces morceaux flasques de moi-même sur le sol. J'ai embarqué mes Trolls qui piaffaient d'impatience, mon chien et notre nécessaire de survie. On est partis.

Au bord des vacances, à un saut de courage et des heures de route. Rejoindre l'océan et les montagnes, ces infiniment géants qui ressourcent et donnent librement, où l'on peut puiser des forces, de l'énergie, des envies. J'ai besoin de grosses vagues, de panoramas grandioses ; j'ai besoin de grand, de très grand, d'un souffle d'exceptionnel pour décoller cette apathie gluante de mon petit moi recroquevillé.

J'ai reçu des consignes de tout le monde : repos et détente. OK. Mon corps est 100 % d'accord. Mais le cordon cerveau-tripes est tendu comme un string et vibre nerveusement. Quelque chose couve. J'ai l'aisselle qui pèle, je fais ma mue du nichon, peut-être de la maladie. Je suis sur le point de tourner une page et elle me parait très lourde, sûrement le poids des rayons qui m'écrase.

Ma résolution est toujours là, taciturne. Mes stratégies, plans et manigances sont aussi en mode silencieux. Le honey badger doit faire la sieste, ou il se tape un petit coma.

Il va falloir se relever, reprendre la route.

J'espère retrouver un vieux magazine de développement personnel chez mon beau-père qui offrira des réponses à mes questions existentielles. Surtout : et maintenant, quoi ?

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 5 versions.

Vous aimez lire J'arrive dans 5 minutes ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0