30. Victorious

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"Si tu travailles avec un marteau-piqueur pendant un tremblement de terre, désynchronise-toi, sinon tu travailles pour rien."
Jean Claude Van Damme

Alors OK, je n'ai pas gagné la guerre. Ne nous excitons pas. Mais je viens de remporter une victoire qui pèse. Une victoire qui me donne du temps et de l'espérance de vie. Un espoir de tenir plus longtemps que prévu. Mon timer personnel, celui que je ne regarde pas et auquel je ne pense jamais jamais non non non, m'indique trois ans et demi. Si je peux le régler sur huit ans ou un chouilla plus, cela m'arrangerait pas mal.

Voilà, j'ai reçu le verdict du TEP scan, celui qui devait vérifier la zone à fukushimer à coup de rayons. Ma radiothérapeute était "à peu près certaine" que mon ganglion fraîcheur Narta n'était plus touché et qu'on pouvait ignorer mon dessous d'aisselle pour la radiothérapie à venir. Mais moi, j'étais "complètement sûre" qu'il fallait mieux vérifier, merci beaucoup. Du coup, prescription de TEP scan, attente de quinze jours, passation de TEP scan, attente des résultats. On se rend compte avoir passé un cap au niveau acceptation de la maladie quand on est blasé par un TEP scan.

Et le résultat...Tadaam !! Disparition complète des hypermétabolismes.

Traduction : les zones qui clignotaient, il y a un peu plus d'un an et demi, comme des guirlandes de Noël au contact du produit glucido-radioatif (sein, rachis, peau... et jackpot trois organes touchés !) ne brillent plus. Parce qu'il n'y a plus de cellules cancéreuses visibles, en tout cas pas d'amas assez gros pour créer une réaction au produit.

Nettoyator. C'est moi. Je l'ai vandammisé, nettoyé à la Léon, je l'ai dégommé, éclaté, je lui ai fait sa fête, je lui ai niqué sa race. C'est un hydre à tête qui repousse, mais pour le moment, il pleure sa mère.

Alors oui, je me réjouis. Je me délecte. Je me vautre dans la satisfaction. Je me roule dedans et elle me recouvre de mille paillettes comme si j'étais Claude François en habit de lumière. Je mets ce moment en boite, je le conserve précieusement pour en respirer le parfum quand j'aurai des coups de mou. Mes organes ne s'allument plus au TEP mais mon moral brille brille brille.

Et comme dirait mon oncologue, le moral c'est important.

Je vais en avoir encore plus besoin maintenant que la pool de sélection est passée. Le vrai match commence et il ne faut pas se relâcher. J'ai un nouveau challenge, un jeu auquel Coco mon oncologue sera une participante active à l'insu de son plein gré. C'est un petit divertissement que j'affectionne, il m'est arrivé d'y jouer au travail pendant des réunions très sérieuses et très chiantes, histoire de décompresser un peu : il faut placer un mot dans la conversation. Chaussette, vomis, patate.... On se débrouille, il faut le placer et que son propos ait un sens quand même. Et surtout, il ne faut pas éclater de rire.

Cette fois ce n'est pas moi qui dois placer un mot, c'est Coco. Sauf qu'elle n'est pas au courant, mais ce n'est pas grave, je suis joueuse comme ça. Donc, sans que je lui donne d'indice, que je lui pose de question, que je dirige la conversation... punaise, ça va être dur... il faut qu'elle me dise le mot :

R... oui ça commence bien par un R, vas-y continue... Ré.... punaise tu chauffes Coco... Rém... oh là là ça brûle, vas-y Coco, t'y es presssssque !!!

Rémission.

Vous êtes en rémission, Madame B.

Voilà, j'avais prévenu, je ne suis pas une fille ambitieuse mais j'ai un premier objectif bien prétentieux au vu du point de départ. Alors je vais bosser encore plus dur, je vais l'atteindre ce putain de taux de cétonémie, je vais libérer ces punaises d'émotions, je vais me les fabriquer ces muscles et je vais m'inventer ma propre croyance car je pense que je suis sur le bon chemin.

J'ai une vie qui m'attend, un cycle à reprendre, une revanche à savourer parce que je ne suis pas qu'une patiente du cancer. Je suis une maman, une épouse, une fille, une sœur, une amie, une collègue qui survit activement façon kick-boxing dans ta face au cancer et je vais tout recommencer, sauf que tout sera différent. J'ai du pain sur la planche.

En attendant, ce soir, je savoure ma victoire.

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