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La nuit était tombée. Malgré la chaleur, l’air restait doux et apaisant. J’appréciais cette tranquillité que seuls procurent les nuits d’été.

Déjà, de longues minutes étaient passées où je n’arrivais toujours pas à comprendre tout ce chambardement, ce trouble naissant que je qualifierai d’affection effroyable, voire même d’aversion pour le genre humain. Un tourment que je voulais chasser, au plus vite, les mauvaises vibrations de ma tête.

Alors, afin de me libérer de toute cette pagaille émotionnelle qui empoisonnait mes pensées, rêveur, je me mis à scruter le ciel afin d’y admirer les étoiles. Tout en les regardant, je pensais à Jiznée.

« Où es-tu, ma belle ? » me dis-je à moi-même. « As-tu toujours cette peine au fond des yeux ? Et d’où viens-tu, au juste ? Comment as-tu pu venir là, dans « la claire fontaine », au sein même du DEUS EX MACHINA ? Pourquoi ces paroles ? En quoi puis-je t’aider ? »

Soudain, alors que je m’étais encore une fois légèrement perdu dans mes pensées, bien que plus douces, une légère brise souffla en ma direction effleurant mon visage d’un parfum qui ne m’était pas inconnu.

Dans l’air, petit à petit, une nuance nouvelle s’était mélangée à celle de cette tiède soirée d’été. Et c’est là, dans ce que je croyais être un rêve, c’est là que je reconnus le parfum de Jiznée, ce doux parfum à la senteur de pétale de rose.

D’un coup, je me retournais, regardais derrière moi, mais rien. Je me dis que sa présence ne devait pas être loin.

Puis, comme envouté par une magie un brun musicale qui, au son d’un piano me jouait une douce mélodie dans ma tête, je m’assoupis d’un sommeil inattendu où un rêve des plus étranges allait prendre forme au DEUS EX MACHINA, dans la forêt boisée de mes sapins majestueux.

Là, au cœur de ce songe révélateur, je fis la rencontre d’une diseuse de bonne aventure et de son chien.

Je me représentais comme souvent allongé dans l’herbe regardant, rêveur, la cime des arbres, tout heureux de profiter du soleil matinal qui par sa douce chaleur apportait gaité à mon cœur.

Un soleil qui allait bientôt, dans le ciel encore éblouissant, être éclipsé par la lune.

Alors, peu à peu la lumière se fit discrète. Et c’est là, au moment même où l’occultation de l’astre divin commençait que je sentis une langue me lécher le visage.

Dès lors je me ragaillardis, debout sur mes jambes. Ce n’était autre qu’un gros chien aux poils longs, un bobtail à la couleur sablée. Pris par la peur, je reculais de deux mètres, pensant que j’allais être mangé. Puis, je vis que le chien ressemblait plus à une peluche qu’à un monstre affamé.

« N’ayez pas peur. N’ayez aucune crainte, jeune homme, Domino est aussi inoffensif que je le suis moi-même ». Je voulais bien le croire puisque la personne qui s’adressa à moi se trouvait une vieille femme rabougrie, si âgée que je lui aurais donné une centaine d’année.

« Vraiment ? Rassurez-moi, il n’est pas méchant ?

— Évidemment. A-t-il l’air d’être méchant ?

— Non. Bien au contraire il a l’air d’être un gentil chien. » Intrigué par sa présence, je lui posais une question en toute logique.

— Qui êtes-vous, madame ?

— Je m’appelle Dolorès Paille. Mon nom t’est inconnu ?

— Oui.

— Pourtant je connais très bien le tien.

— Désolé, mais cela me semble improbable.

— Joseph Dedzer, c’est bien ton nom, n’est-ce pas ?

— En effet. Mais comment pouvez-vous le savoir ?

— Grâce à ta mère. D’ailleurs je viens lui rendre visite. C’est que nous sommes amies ta mère et moi.

— Amies ? Mais c’est impossible. Je ne vous connais pas. Ma mère m’aurait tout dit si elle avait une amie. Comment pouvez-vous la connaître ?

— Regarde à ta montre, nous sommes Samedi et le Samedi ta mère te cache bien des choses.

— Comme quoi ?

— Les services que je lui rends.

— Excusez ma curiosité, mais quel genre de services pouvez-vous bien lui rendre ?

— Ceux d’y voir plus clair sur son avenir.

— Plus clair sur son avenir ? Dois-je en déduire que vous êtes voyante ?

— Ta déduction est exacte.

— Vous prédites l’avenir donc ? Comment puis-je être sûr que vous ne me mentez pas ?

— Au fond de toi tu le sais très bien, Joseph. Tu as ce don.

— Vous vous méprenez. Je ne suis en rien la bohémienne Esméralda de « Notre dame de Paris ».

— Je vois que tu as des connaissances, moi j’en ai d’autres à t’offrir.

— Vous m’intriguez. Cependant, je pense que tout ce que vous me dites sont en réalité des balivernes. Rien d’autre.

— Balivernes, dis-tu ? Ne sois pas si craintif, à ce jeu-là tu pourrais bien perdre celle que tu recherches.

— Qui vous dit que je recherche une personne, au juste ?

— Cette personne, ne serait-ce pas la belle Jiznée ? Jiznée, c’est bien son nom, n’est-ce pas ?

— Oui, comment le savez-vous ?

— Ah, mais c’est que je suis voyante, Joseph. L’aurais-tu déjà oublié ?

— Non, bien sûr que non ! Seulement j’aimerai être septique, mais au vrai vous excitez ma curiosité. Dites m’en plus.

— Sais-tu que tu n’es pas le seul à la chercher ? Sais-tu que tu n’es pas le seul à l’aimer ?

— Quoi ? Qui d’autre que moi ? Dis-moi, qui l’aime en secret ?

— Itane.

— Itane ?

— Itane Bel. Itane le magnifique.

— Qui est-ce ?

— C’est celui aussi que tu recherches depuis la nuit des temps et qui te fait si peur.

— Je ne recherche quiconque, mise à part Jiznée.

— Prends garde à Itane. Itane est mille fois plus fort que toi.

— Alors, il n’est pas si fort que vous le croyez, car je ne suis pas fort moi-même.

— Détrompe-toi, Joseph, ici sur cette terre tu es de loin le plus fort. Personne ne peut t’égaler. Ton aura est bien plus puissante que n’importe qui. Tu es l’élu.

— L’élu ? Mais de qui ?

— Tu aimerais être celui de Jiznée, mais c’est de Itane dont tu es l’élu.

— Ce sont des mensonges, des inepties.

— Prends garde à toi ! Bientôt sonnera l’heure de la mort de ta bien aimée !

— Mais, ma parole, tu es folle !

— Si je suis folle, tu es le roi des fous.

— Moi ? Fou ?

— Et plus encore !

— Qui a-t-il de plus fou qu’un fou en ce bas monde ?

— Peut-être bien le monde, tiens !

— J’en ai assez entendu. Allez-vous-en. Partez où vous aurez à faire à la toute-puissance de mon courroux ! »

Sur ces derniers mots, la femme s’en alla, d’une démarche affaiblie, disparaissant dans la noirceur de cette journée à l’allure de nuit et cela sans demander son reste.

À cet instant, je me réveillais l’air ahuri.

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