Chapitre 10. Gustave / Old friends

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Old friends, old friends,

Sat on their parkbench like bookends

A newspaper blown through the grass

Falls on the round toes

of the high shoes of the old friends

Le soleil illumine le préfa. Chaque jour le printemps s’installe, sans gêne, et depuis le retour de Vincent, je me sens plus léger. Quel type génial : tout le monde doit l’adorer !

Ô soleil accepte

tendre prière caresse

mes illusions

Je regarde par la porte entrouverte et vois un homme en gilet jaune avec un casque. Un gilet jaune, ici ?

L’homme se rapproche et je l’accueille :

— Guillaume !
— C’est moi Gustave !
— On ne s’est pas vu depuis
— Que tu as tout abandonné à Centrale.
— Que viens- tu faire ?
— Je suis l’ingénieur en chef du CEMAGREF ! Ton père m’a dit que tu étais dans le coin.

Je commence à me demander si Pearl n’a pas raison, quand elle parle de la bonté de God : revoir Guillaume c’est un rêve devenu réalité.

Mais je ne vais pas en parler à mon père. Il m’a avoué que la providence avait pour nom le téléphone : devant ma déprime, il a appelé Vincent à la rescousse.

Mais là Guillaume c’est vraiment un heureux hasard.

Rapidement, je lui raconte la ZAD, il me confie que, lui aussi, a rêvé de tout envoyer balader et de vivre pour la poésie, mais que c’est impossible.

Je lui réponds que je le comprends. Guillaume vient d’un petit village paumé du jura, où il n’y a plus de travail. Toute sa famille ne vit que grâce à lui !

Il ajoute :

— J’aime ce village, c’est perdu dans la montagne comme chez moi.
— Et, ce boulot ?
— Mitigé, la cheffe ne veut pas tout dire.
— On te cache des choses ?
— Oui, mais quoi ?

Je l’embrasse et le raccompagne, avant de retrouver Vincent.

Je crains pour la santé de Monsieur le Maire, la place de la mairie est un joyeux bazar, des dizaines de camions et de voitures stationnent, dans un désordre indescriptible.

On crie, on chante, on danse, on s’interpelle et l’omniprésente odeur du cannabis m’accompagne.

Je retrouve, difficilement, le van de Vincent.

Parmi tous ces véhicules aux dessins extravagants, le van noir est presque sobre. J’entends quelques riffs, je cogne à la vitre,

Vincent finit par sortir : il a sa tête des mauvais jours, Souriante, Pearl m’embrasse sur la joue.

Je lance l’attaque :

— Il en fait une tête ton homme !
— Il a bad sleep, le poor.

— Cela ne va pas avec la boulangère ?

— Disons que ...

— La demoiselle n’apprécie pas tes vêtements dispersés un peu partout, tes joints et la musique toute la nuit ?

— C’est cela.

— Moi aussi, j’ai fini par préférer Anne-Sophie.

On éclate tous de rire.

Je lui demande :

— Alors ce compromis ?

— Je joue le jour, dans le van.

— Et elle ?

— Elle ne passe plus l’aspirateur à 6 heures du matin, dit Vincent, en éclatant de rire !

— Oui c’est honnête.

— Non le trouble c’est Stéphane, murmure Pearl.

— Stéphane ?

— Elle veut dire Sébastien, le beau gosse, brun sportif, me répond Vincent.

— Oui il me voit like an ice cream !

— Bref il bave, ironise Vincent.

— J’ai dit : no, my man c’est Vincent.

— Pourtant, avec moi...

— No Gustave, just once, pour Vincent et le Future, mais never again !

— Bon je vous laisse.

Je ne sais pas pourquoi la dernière réplique de Pearl m’a rendu un peu triste.

C’est étrange, toute cette joyeuse ambiance me rend mélancolique, avant Anne-Sophie, c’était ma vie, là j’ai l’impression de remettre de vieilles chaussures.

Je m’éloigne, le bruit diminue, je sors du village. J’adore la montagne mais je n’apprécie guère les stations, je continue mon chemin et je tombe sur les remonte-pentes abandonnés.

Je ferme les yeux, j’imagine les gosses, le bruit, Une voix me sort de ma rêverie :

— Un peu triste tout cela ?

— Sébastien ?

— Et toi c’est Gustave ?

— Oui, disons que maintenant , il n’y a plus rien pour les jeunes

— Je vais partir, chercher du boulot

— Et une femme.

— Ici, il n’y a que des oiseaux de passage.

— Comme Pearl ?

— Pour moi, c’est une hirondelle de passage, pas pour Vincent.

Sébastien s’éloigne, le sourire aux lèvres, et je me demande : suis-je en enfer ou au paradis ? Je caresse mon haïku.

Paradis de rouille

nature vient sublimer

acier oublié

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