Acte I, Scène 2

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LA LUMIÈRE, seule.

LA LUMIÈRE, seule, le regard fixé sur le public, ne bouge pas, les mains jointes devant elle. Une aura lumineuse l'entoure, mais la scène s'obscurcit à mesure qu'on s'éloigne du centre.

Quel éclat, Soleil, mon père ! Comme ta chaleur m'a touchée, transpercée, et a traversé la mince pellicule de peau qui m'enveloppe. Et sous ce feu que tu as jeté sur moi, je me suis sentie... Vivante !

Elle part d'un joyeux éclat de rire, et se redresse, esquissant quelques pas de danse.

Alors qu'à mon tour je chauffais le monde, consciente de rien si ce n'était la clarté qui était la mienne et de ses infinis bonds sur la surface des choses, je n'avais pas idée de l'effet produit par tes rayons.

Quelle beauté, Soleil, mon père ! Tout s'est illuminé : la pierre, de mille petits reflets se revêt, et les ardoises de ces toits te renvoient à ta propre magnificence ! Là-bas, sur cet étal, les fruits gorgés de ton attention te remercient de tes soins, et les floraisons citadines des fenêtres s'épanouissent fièrement sous ta caresse.

Elle s'arrête un instant, interdite, les sourcils froncés.

Suis-je mauvaise, de dédaigner le chagrin de mon frère, de devoir mourir pour revivre encore ? Je n'ai rien montré de ma liesse. Je craignais de le peiner. Mais demain, je ferai de ma joie un pansement à ses douleurs, et mon rire deviendra panacée de ses maux.

Quelle merveille, Soleil, mon père ! De ces pieds, je foule le sol et les pavés. J'en perçois les rugosités et les aspérités à chaque pas que je fais. Et sur mon corps, ce tissu glisse et épouse mes mouvements. Je suis bien plus petite, limitée à cette forme palpable, et pourtant, l'infini me semble accessible. D'une main je touche, d'un regard, j'embrasse, de mes lèvres, je savoure, d'une inspiration, je m'enivre !

Elle tourne sur elle-même, sa robe blanche formant une cloche autour de ses jambes.

Je vais rencontrer d'autres personnes, découvrir la mélodie de leur voix, et explorer les mystères de leur existence. Chaque geste me deviendra familier, et à mon tour j'accomplirai ces choses étranges que seuls les humains font. Tirer chaque matin sur un lit défait un drap tendu et parfumé pour masquer les traces de la nuit... Ou encore, laisser l'eau couler sur leurs joues, puis les essuyer avec un tissu. Mais je les essuierai, pour qu'elles coulent encore ! Et ensuite, je sourirai, pour chasser toute cette !... Je n'ai plus peur, désormais.

Sur le point de poursuivre, elle s'interrompt, et regarde autour d'elle. La lueur qui inondait la scène se rétrécit de plus en plus, jusqu'à ne former autour d'elle qu'un cercle étroit.

Mais que se passe-t-il... Père ? Reviens à moi ! Quelle est cette obscurité qui m'encercle ? Je n'avais jamais rien vu de tel. Quand j'entre en un lieu, elle me fuit. Quand je me détourne, elle s'étale hors de mon regard, suit mes pas et les épouse, sans jamais les effleurer pourtant... D'où vient cette audace nouvelle ? Comment est-ce possible ?

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