Chapitre 26 - Partie 2

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  Dès qu'elle sortit de mon champ de vision, je reportai mon attention sur le commandant. Son malaise transparaissait dans ses muscles et son visage crispés.

  –Altesses, je suis vraiment désolé pour le comportement de ma belle-mère.

  Il s'agissait donc de la mère de Magdalena... Elle ne l’avait évoquée qu’une paire de fois en ma présence, cependant je ne l’aurais jamais imaginé… ainsi.

  –Allons, commandant, je vous ai dit que tout allait bien, assura Kalor. Vous pouvez vous détendre.

  Les épaules du mari de Magdalena s'affaissèrent et cette fois-ci, il parvint enfin à nous poser sa question.

  –Que nous vaut l'honneur de votre visite ?

  –J'aurais aimé voir Magdalena, expliquai-je. Est-ce possible ?

  –Oui, bien sûr. Si vous voulez bien me suivre, Princesse. Altesse, je vous en prie, mettez-vous à votre aise, ajouta-t-il à l'intention de Kalor.

  J'adressai à ce dernier un sourire qu'il me retourna, puis emboîtai le pas au commandant. Il me guida au premier étage, traversa le palier, puis poursuivit sa route dans les escaliers menant au second. Juste avant de m'engager à mon tour sur ces marches, je perçus deux voix étouffées par une porte. Freyja demandait à Frigg de se calmer, alors que la mère de Magdalena affirmait que le feu était en train de regarder les livres de son salon. Parlait-elle de Kalor ? Les Lathos héritaient leur pouvoir de leur mère et Magdalena était une Liseuse, donc Frigg en était aussi une. Elle pouvait très bien savoir ce que Kalor faisait sans être dans la même pièce. Quant à cette appellation, elle devait avoir lu dans son esprit qu'il était l'Élémentaliste du feu. À moins qu'elle ne l'ait découvert dans celui de sa fille ou de Freyja.

  Et lorsqu'elle déclarait que je ne parlais pas, était-ce sa façon de dire qu'elle ne pouvait accéder à mes pensées ? Peut-être ne faisait-elle aucune différence entre les paroles exprimées et ce qu'elle lisait dans les esprits. Cela me peinait mais elle ne semblait pas capable de réflexions très poussées.

  Situé sous les combles, le deuxième étage avait de belles poutres apparentes et ne comprenait que deux pièces de part et d'autre du couloir. Le commandant se dirigea vers celle de droite et toqua doucement à la porte.

  –Magda, ma chérie, tu es réveillée ?

  –Elle dort ? m'étonnai-je. Je ne voudrais pas la déranger.

  Le battant s'ouvrit sur Magdalena.

  –Vous ne me dérangez pas du tout, Madame, me sourit-elle. Alors je vous en prie, entrez. Merci Karl.

  Il déposa un rapide baiser sur sa joue, puis redescendis retrouver Kalor. Magdalena se décala sur le côté pour me permettre d'entrer dans la pièce. La chambre à coucher. Le tableau accroché au mur, au-dessus du lit, attira tout de suite mon attention. Il représentait le couple Raspivitch dans leur tenue de mariage. Le peintre avait parfaitement réussi à retranscrire leur bonheur. Vêtue d'une magnifique robe avec une longue traîne, un col bateau et un corsage très travaillé qui lui allait divinement bien, Magdalena rayonnait. Je ne l'avais jamais vu avec un tel sourire. Même à travers la toile, je ressentais que ce jour avait et le plus beau de toute sa vie.

  –Nous allons bientôt fêter nos quatre ans de mariage, m'annonça-t-elle.

  Je baissai les yeux vers elle et mon regard se posa sur ses cheveux. Ils étaient encore plus courts que dans mon souvenir. Cependant, ils avaient à nouveau été coupés pour égaliser sa chevelure et atténuer le massacre de l'Horloger. Voyant que je les fixais, Magdalena soupira.

  –Madame, ne vous inquiétez pas pour mes cheveux. Je m'estime heureuse de m'en être sortie avec seulement une coupe plus courte.

  –Comment allaient les autres ? m'enquis-je.

  –Berta et Edwige allaient plutôt bien. Ottilie aussi, pour une femme prisonnière d'un corps d'enfant.

  Mon cœur se serra à ces mots.

  –Comme l'Horloger a été tué, elle ne pourra plus jamais retrouver son âge, avouai-je dans un murmure.

  –Je sais. (Quelques secondes passèrent avant qu'elle reprenne la parole.) Cela va être très dur pour elle, mais elle est en vie et c'est le plus important. Et n'oubliez pas qu'elle n'est pas seule : son petit frère va pouvoir l'aider.

  –C'est vrai.

  Même si sa situation me pesait toujours, ce rappel l'allégea un peu.

  –Et Hermine ? continuai-je. As-tu eu des nouvelles ?

  –Non, Karl m'a dit que les équipes sur place étaient toujours en train de la chercher. Je pense que vous serez au courant avant moi s'ils la retrouvent. Bien qu’il soit rentré au palais avec vous, votre mari dirige en partie les opérations.

  –Je vois... et toi, comment vas-tu ?

  Ses lèvres se soulevèrent en un doux sourire.

  –Maintenant que je vous ai devant moi, bien. Vous m'avez fait vraiment peur dans le manoir.

  Mal à l'aise, je me frottai le bras.

  –Je suis désolée, cela n'avait jamais été mon attention. J'essayais de trouver un moyen de nous faire sortir et tout a dégénéré si vite. J'ai eu très peu de temps pour réfléchir. Pour ne pas dire pas du tout.

  Son sourire retomba et elle m'observa de haut en bas.

  –Et vous, comment allez-vous ?

  Je baissai les yeux, gênée par son inspection. Elle avait l'air de voir toutes les blessures que mes vêtements ne couvraient pas, même celles cachées par le maquillage.

  –Je ne suis pas au meilleure de ma forme, admis-je, mais je vais mieux.

  Sauf quand Arès est dans les parages.

  Un frisson me traversa à cette pensée et mes doigts se resserrèrent sur la sacoche. Magdalena dut penser que c'était dû à ma faiblesse car elle m'invita à m'asseoir sur le lit.

  –Non, ce n'est pas le peine. Je peux rester debout, assurai-je.

  –S'il vous plaît, insista-t-elle.

  J'abandonnai les armes et m'installai au bout du matelas. Magdalena prit place à côté de moi. L'agitation de mes doigts sur le cuir de mon sac attira son regard.

  –Que se passe-t-il ? me demanda-t-elle avec douceur.

  Je serrai mes mains pour les empêcher de gesticuler ou trembler et pris une profonde inspiration. Elle avait beau connaître ma véritable identité, l'idée de lui parler de quelque chose qui y était lié me nouait la gorge. Je ne m'étais jamais confiée à personne à part à Giulia et Marco. Et encore, même eux ne savaient pas tout.

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