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— Tu veux voir de la vraie magie ? Regarde attentivement, me dit le guérisseur en indiquant la petite bougie parfumée posée au centre de la table.

Il passa sa main au-dessus et une flamme apparut au bout de la mèche. Une odeur de mandarine se diffusa lentement autour de nous. J'ouvris de grands yeux étonnés. C'était impossible ! Puis je me repris. Il devait y avoir un truc comme pour tous les tours de magie, j'en étais certaine. Mais quoi ?

— C'est une illusion ? demandai-je avant de souffler la bougie.

La mèche continua à fumer quelques secondes. Jake refit le même geste pour la rallumer.

— Non, ce n'est pas un simple tour. C'est une vraie flamme.

— Mais comment alors ? Expliquez-moi.

— La réponse se trouve dans un ouvrage de chimie, dit-il avec un sourire. Une fois que tu m'auras dit comment ça fonctionne, je t'apprendrai à le faire aussi.

— Parce que je peux faire ça ? demandai-je, surprise. Et ce livre, où est-il ?

— Quelque part dans l'une des caisses en bas. Je te le donnerai tout à l'heure. En attendant, si je te parle de génétique, sauras-tu suivre ?

— Je vais essayer…

— N'hésite pas à m'interrompre si tu ne comprends pas. C'est important.

L'ADN compose notre matériel génétique. Il est contenu dans le noyau des cellules. Lorsqu'une cellule doit se diviser, l'ADN est condensé en chromosomes. Pour faire simple, les chromosomes sont donc une suite de séquences codant pour des protéines et de séquences non codantes. Les séquences codantes sont les « gènes ». On appelle « allèles » les différentes versions d'un même gène. Tu me suis toujours ?

J’acquiesçai. Je notai pourtant dans un coin de ma tête d'aller revoir toute la théorie une fois rentrée à la maison. Un samedi fait de biologie en somme.

— Ces allèles nous sont transmis par nos parents, continua Jake. Nous possédons donc deux copies d'un même gène. Un allèle peut être dominant, c'est à dire qu'il sera le seul à déterminer le caractère pour lequel il code. S'il est récessif, on ne verra pas son effet en présence d'un allèle dominant. Il faudra alors que deux allèles récessifs soient présents pour constater le phénotype.

— Mais pourquoi est-ce que vous me dites tout ça ? demandai-je.

— Je veux te parler d'un gène particulier. Il n'est pas actif chez la plupart des gens. Et il code pour quelque chose de très spécial. C'est ce que nous appelons le « don ». C'est assez difficile à expliquer mais disions simplement que cela permet une utilisation plus poussée du cerveau.

— Comme allumer une bougie ?

— Oui, par exemple. Mais pas seulement. La bougie est en réalité un exercice assez simple. Ce gène est donc dominant. Il est le privilège de certaines familles et se transmet de génération en génération. Ceux qui possèdent ce don sont désignés comme des sorciers.

Cependant, il arrive quelquefois, de plus en plus souvent dans notre monde moderne, que le gène en question subisse une mutation spontanée. Il devient alors récessif.

— Et c'est un problème ? demandai-je.

— Seulement pour ceux qui comptent sur le don pour acquérir des privilèges ou un poste important. Quand leurs enfants sont incapables du moindre acte magique, la lignée perd de sa force. Et puis, il y a les personnes comme toi.

— Comme moi ? fis-je étonnée. Que voulez-vous dire ?

— Je me suis un peu renseigné sur toi et tes parents. Je sais qu'ils sont tout à fait comme le reste de la population. Mais toi, tu es différente. Tu as hérité du don en obtenant deux allèles récessifs.

Je ne comprenais plus rien. Si cela avait été le cas, je l'aurais bien découvert en vingt ans d'existence, non ? Je n'avais jamais rien fait qui sorte de l'ordinaire et, à ce que je sache, personne dans ma famille n'avait manifesté de pouvoirs particuliers. Je ne pouvais pas être une sorcière.

— Je crois que vous vous trompez de personne, dis-je en souriant. Je n'ai rien de spécial. Je suis juste une fille qui a fait une erreur en achetant un stupide livre sur une brocante.

Je m'apprêtais à partir quand Jake me retint par le bras.

— Ne t'en vas pas comme ça, jeune fille. Demande à tes parents de te raconter l'histoire de ta famille, veux-tu ? Je pense que tu apprendras beaucoup de choses intéressantes. Et maintenant viens, je crois que tu as un livre à lire.

Je me rappelai de la bougie. Pouvais-je réellement faire pareil ? Pourquoi cela m'arrivait-il à moi ? J'avais eu une vie normale, joyeuse et qui me convenait. Je me retrouvais à présent sans études, sans travail et sans plus aucun repère. Pourtant, au fond de moi, je savais que je pouvais arranger la situation. Le voulais-je vraiment ?

Je me posais ces questions en redescendant silencieusement dans la boutique sombre du sous-sol. L'endroit ne me parut guère plus accueillant. A la lueur des ampoules de la galerie, je pouvais distinguer le désordre et la saleté qui régnaient dans la librairie.

— Je crois… dis-je doucement en levant les yeux. Je crois que vous auriez bien besoin d'aide pour remettre tout cela en état.

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