Demasquage

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  • Chapitre 12 : Démasquage

 

Quelques minutes après le départ des deux notaires, les sept, plus dépités que jamais, se réunissaient encore une fois. Marcel prit la parole.

-       Simone… ma très chère Simone… Je n’ai pas l’habitude de dire ce genre de chose mais vous êtes notre dernier espoir. Je crois que si au bout de sept tentatives, il n’est pas mort… nous serons obligés de…

Pause.

-       De quoi ?

-       De l’achever à…

Pause.

-       A l’arme blanche !

Sursaut collectif.

Jamais. Au grand jamais les sept n’avaient du perpétrer un crime à l’aide d’un arme blanche. L’idée même les répugnaient : ils étaient des meurtriers, certes, mais des empoisonneurs purs et durs, envers et contre tous. Pourtant… pourtant, le notaire/juriste/banquier les poussait à une des pires extrémités possibles. C’était extrêmement risqué de le tuer à l’arme blanche : si jamais on découvrait que François n’était pas mort de mort « naturelle », ils pourraient bien finir définitivement derrière les barreaux. Surtout, c’est dégoutant, tout ce sang qui coule des plaies et suinte des entailles.

-       Nous pourrions organiser un accident, peut-être ?

Hortense avait pali, et faire cette remarque la fit passer de blanc à presque transparent. Elle grelotait terriblement malgré son manteau de fourrure. Simone, quant à elle, ne disait rien. C’était son tour : elle réfléchissait intensément pour trouver l’idée avec un grand I qui lui permettrait de supprimer la cible.

-       Laissez-moi d’abords essayer.

-       Si vous le voulez…

-       Je vous conseille de le faire dès demain.

Même Madeleine était troublée par les paroles de Marcel. Elle devenait presque compatissante, moins agressive. Elle aussi avait perdu de sa volonté et de sa hargne envers ses collègues.

-       Demain ! S’il n’est pas mort après être passé chez moi, nous… nous le… oh, je ne sais pas…

Effondrement de Simone.

Francis s’approcha de la pauvre femme qui se mettait à pleurer. Tuer quelqu’un avec une arme, quelle abomination. Tous se sentaient faibles à cette idée. C’est pourquoi Francis réconforta la candidate.

-       Courage, Simone. Vous… euh, tu dois être forte ! Tu peux y arriver !

* * *

-       Une chose me rassure dans cette visite.

-       Laquelle ?

-       C’est la dernière que je dois effectuer.

-       Comment ça ?

« Encore un « comment ça ?

-       Pendant une semaine, je suis allé vous voir, un par un, jour par jour. Vous êtes la dernière personne à rencontrer. Voilà tout !

« C’est sur. J’ai juré que je serai la dernière personne à qui vous parlerez !

-       Un peu de thé ?

« C’est une manie chez eux.

-       Pourquoi pas ?

François se dit que le thé de Simone, ou plutôt d’Adelaïde, avait la réputation d’être le meilleur. Cette fois-ci, pas de mauvaise surprise au café ou au Jin. Un vrai bon thé !

Etrangement, ce fut Simone qui partit en direction de la cuisine, puis en revint avec le plateau.

-       Adélaïde est en congé, aujourd’hui.

« Je crains que le thé ne s’en ressente…

-       Je crois que vous en avez souffert, du thé. J’espère que celui-ci vous réconfortera. Je l’ai fait moi-même.

Simone versa délicatement le thé dans les tasses. Elle n’eu pas besoin de demander ni pour le lait, ni pour le sucre. Elle lui tendit la tasse en souriant.

Devant tant de gentillesse, François fut un peu gêné de ses préjugés sur la préparation de son hôtesse. Il attrapa la tasse rapidement, souffla dessus, puis avala une gorgée.

            « C’est sans doute la plus gentille de toutes…

-       Tiens ! Tant que j’y pense. Pourquoi m’avez-vous fait venir ? Pas juste pour prendre le thé ?

-       Non, non. Ne vous inquiétez pas.

Nouvelle gorgée de thé.

-       En tout cas, il est très bon.

-       C’est du thé blanc à la framboise.

-       Du thé blanc ?

-       Oui ! Le thé vert est fait avec les feuilles, le thé blanc avec les fleurs.

-       J’en apprends tous les jours. C’est délicieux ! Félicitations !

François finit sa tasse, puis la déposa sur le plateau. La maitresse de maison lui tendit une boite de chocolats de couleurs plus ou moins foncés, certains emballés de papier aluminium. François en prit un qui avait une forme de fleur, sans doute au miel. Il remercia ensuite Simone, qui déposa la boite près de la théière. Elle but sa tasse de thé, puis la déposa. Elle alla ensuite vérifier le pouls de François qui venait de s’affaisser sur son fauteuil.

-       Mort. Enfin…

Affalement de Simone.

Bien qu’elle fut rassuré de ne pas devoir le tuer « grossièrement », elle frissonnait, comme après un grand stress. Elle porta sa main au visage, soulagée.

Levée de Simone.

Elle attrapa le combiné, puis sorti son calepin pour vérifier les numéros de ses collègues. Elle n’avait pas une bonne mémoire des numéros de téléphone. Ayant trouvé la bonne page, elle s’apprêtait à composer celui de Hortense quand elle entendit un ronflement dans le salon.

Elle lâcha brusquement le combiné, extrêmement pâle. Elle se rua pour regarder de plus près le soi-disant cadavre, et fut contrainte de constater sa vie.

Elle se releva immédiatement et mit sa main sur le bas de son visage. Elle respirait difficilement désormais en songeant aux conséquences de son échec. Elle resta immobile, puis prit d’une fureur soudaine, elle renversa le dessus de la table basse. D’un revers du pied, elle envoyer valser en l’air sucrier, théière, cuillères et pot de lait. Elle avait envie de frapper tout ce qui l’entourait, de détruire, réduire en miettes, désintégrer à mains nues toutes ces choses, tous ces objets qui n’avaient pas réussi à exécuter leur tache, pourtant simple, de tuer François.

De rage, elle se mit à hurler sur le non-mort.

-       Abruti ! Crétin ! Tu n’aurais pas pu mourir ! TU N’AURAIS PAS PU CREVER ! Combien de fois on t’a empoisonné ? Combien ? Tu le sais, toi ? Pauvre débile ! Tu ne te doutais de rien, mais il a fallu que tu… que tu… survives… A cause de toi, on va devoir de poignarder, te vider de ton sang ou dieu sait quoi ! C’est ça, continue de dormir, comme si je ne te parlais pas ! Tu n’as jamais été qu’un sinistre pantin !

Fonte en larmes de Simone.

François s’était réveillé au moment même où le service à thé rencontrait le sol. Il avait gardé les yeux fermés, mais avait tout entendu. Il se leva, blême lui aussi, puis considéra la femme en pleurs devant lui.

-       Bien. J’ai tout entendu, si vous voulez savoir, dit-il calmement. Je vous laisse à vos complots.

En sortant de la maison, il se contenta d’ajouter.

-       Dois-je préciser qu’il n’est pas nécessaire de venir demain ?

-       Sortez ! SORTEZ IMMEDIATEMENT DE CHEZ MOI !

Claquage de la porte.

 

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