Chapitre 5

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Jonas

Le téléphone dans ma poche vibre. C’est Dominik, mon bras droit.

—Oui ?

—Désolé de te déranger patron, mais on a un léger souci avec la devushka[1].

—Tu peux être plus précis ? On en a plusieurs. Et puis t’as qu’à la foutre sous une douche glaciale si elle ne se soumet pas, tu connais le protocole.

—Oui, mais non, en fait, il ne s’agit pas d’une des prostituées, mais … de mademoiselle Pavlenski.

—Tu déconnes ? Elle ne peut pas faire grand-chose, Dominik, putain, elle est ligotée.

—Si… justement, elle vient de tuer… de… de tuer Lazarev avec… avec un simple… fil, je crois.

Je me fige. Je sens ma tension monter, ma colère m’envahir, étouffant ma gorge, faisant pomper ma jugulaire. Je serre le poing si fort que mes jointures blanchissent.

—Non, mais tu te fous de ma gueule, Dom ?! Elle s’est enfuit ?! Elle est où ?!

—Elle est attachée, patron ! Ne t’inquiète pas ! Elle est sur le lit, elle n’a pas fui. J’ai eu le dos tourné une minute et…

—Et ? le coupé-je sèchement. Ne te fous pas de moi ! Elle n’a pas tué Lazarev en étant attaché au lit ! C’est quoi ce bordel ?!

—Je crois que tu devrais venir voir…

—Putain…! T’avais une tâche, une putain de tâche, c’était de la surveiller. La meuf est coulée au lit et elle réussit à tuer un de mes meilleurs hommes ? Avec un fil, en plus ?! Ah putain, tu me fous en rogne ! Laisse-moi terminer ce que j’ai à faire, et j’arrive !

—D’accord… fait-t-il en se sentant stupide.

—Hé, Dom !

—Oui ?

—Ne la laisse pas te tuer pendant ce temps ! Crétin !

En rompant la communication, je vois mon reflet dans la fenêtre teintée en face de moi. Avec mon long manteau noir, mon col remonté à la nuque et mon masque de crâne noir. De l’autre côté de la vitre se trouve une pièce d’observation, un peu comme si j’étais dans une salle d’interrogatoire au poste de police. Excepté que je me trouve dans une chambre froide, au sous-sol de l’immeuble. L’étage souterrain ressemble à un couloir d’hôpital psychiatrique, avec une vingtaine de chambres d’isolements. À l’intérieur de ces cachots se trouvent des clients qui ont accès à leur fantasme les plus sombres… Grâce à moi.

Je détiens non seulement une boîte de nuit à l’étage, mais dans ces caves se trouve mon véritable petit empire de la prostitution, qui constitue l’essentiel de ma fortune. Tous les autres étages de l’immeuble contiennent des chambres pour le business. Une sorte d’hôtel de luxe avec des filles de qualités. Toutefois, le sous-sol est réservé à une clientèle bien plus tordue et sous haute surveillance. On retrouve le Monster, sur le dark Web. J’offre ici tous les fantasmes les plus pervers, sordides, interdits. Si quatre ou cinq gars qui rêve ensemble de commettre un viol collectif un vrai et non simulé, ils n’ont qu’à me verser l’argent, je leur trouve une victime selon leur critère et âge, et j’enferme la fille dans une des cellules d’isolement. Si un homme veut commettre un meurtre, il peut le faire ici, sans jamais craindre la prison. Je protège son identité et je fais disparaître les corps. Les clients qui ont un fétichisme, même le plus spécial, seront comblés au Monster. Tout ce qui est illégal et qui empêche l’humain d’assouvir ses pulsions en société, moi je l’offre. Le client paye très cher. Et ils affluent de partout dans le monde. La règle d’or sur le port du masque permet de protéger l’anonymat de chaque personne qui pénètre au Monster. Que ce soit un sénateur, une célébrité, un homme marié : dans mon établissement, il peut être tout ce qu’il veut et son crime est protégé par le club.

Pour faire encore plus d’argent, mon frère aîné, Jaylen -un vrai psychopathe et tueur en série d’aussi loin que je me souvienne- m’a parlé de la nécrophilie sur le dark Web. Pas les scénarios et simulation. Du réel. Alors j’ai conçu une chambre froide spécialement pour les adeptes. Je m’assure que le corps est mort 30 minutes avant l’arrivée du client. Question de fraîcheur. Et il en dispose comme il le veut. Ça coûte 200 000 pour une nuit. Il ressort d’ici après une bonne douche, retourne auprès de sa famille, embrasse ses enfants avant d’aller au lit, pendant que mes hommes s’occupent de nettoyer le tout. Si un type a toujours rêvé d’enfiler un masque de Pennywise ou encore de Michael Myers et de torturer et d’assassiner une victime, c’est ici qu’il pourra le faire. J’offre la chance à tout humain de commettre un crime, peu importe sa nature, sans jamais être puni, pour peu qu’il ait de quoi payer son forfait. Les gens autour qui n’ont pas conscience de l’existence d’un tel endroit seraient ébahis de constater la popularité de ce réseau et à quel point les hommes sont tordus, même ceux que l’on soupçonne le moins.

Et avant que Dominik m’appelle, je m’apprêtais à tuer cette jolie et délicieuse petite proie, que deux de mes gardes plaquent contre la table d’autopsies dans cette chambre froide, identique à une morgue. Excepté que partout dans les locaux et même le couloir, l’éclairage est rouge. Rouge sang pour immerger les clients dans une ambiance la plus gore possible.

Pendant que mes hommes la maintiennent alors qu’elle se débat et hurle, je me dirige vers ma table d’instruments et commence à enfiler des gants. J’entends ma respiration sous ce masque. J’adore ce moment, celui où je m’apprête à tuer. Donner une mort par injection létale, c’est bien, mais j’avoue préférer les étrangler ou les battre à mort. Mais comme un client paye pour la nécrophilie, la fille ne doit présenter aucune marque corporelle, elle doit rester belle, telle une poupée de glace. Alors je dois toujours rappeler à mes gardes d’y aller doucement quand ils l’empoignent, pour éviter de laisser des hématomes ou des bleus. Je garantis toujours au client un cadavre impeccable, alors qu’il en soit ainsi.

Ils finissent par sangler son corps pour être sûr qu’elle ne puisse plus bouger et ensuite, l’un d’eux lui met un bâillon en boule de silicone dans la bouche et l’attache derrière sa tête. À cet instant, plus aucun cri ne parvient à mes oreilles. Comme à l’habitude, c’est le moment où je peux prendre mon téléphone, mettre l’application qui lance la musique dans la pièce -question de mettre un peu d’ambiance-. Je mets toujours la même chanson. Je trouve qu’elle apporte une touche théâtrale lorsque je tue. Alors je mets « Dernière danse » le remix de Nicebeatzprod. C’est comme écouter une mauvaise chanson, traumatisante, qui grave la mémoire de la victime avant de mourir. Ou c’est comme un tueur en série qui a une chanson fétiche qu’il met toujours lorsqu’il découpe sa victime. Dans ma tête, ce sont toujours des chansons un peu singulières. Enfin bref…

La musique se diffuse, j’inspire doucement et expire calmement. Avec ce contraste de la chaleur de mon corps et la froideur de la pièce, une buée fuie de mon masque.

Je fais craquer mon cou, pour enlever les raideurs à ma nuque et m’empare ensuite de cathéters. Je fais signe aux deux gardes qui ont terminé de mettre des électrodes et de s’écarter de la demoiselle. Ils s’exécutent aussitôt.

En m’approchant d’elle, je fais quelques pas de danse. À me voir aussi joyeux avec l’aiguille dans la main, la meuf hurle sous son bâillon. Je place une main près de mon oreille, lui faisant signe que je n’entends rien du tout. La pauvre petite gazelle sans défense n’a que dix-neuf ans. Mes hommes l’ont épiée durant plusieurs jours avant de procéder à son enlèvement dans son lit, alors qu’elle dormait paisiblement au côté de son petit ami. Un petit ami mort d’une balle dans la tête, pour ne laisser aucun témoin, soit dit en passant. Son corps de déesse est entièrement nu. Comme pour chaque victime qui se retrouve sur cette table de bistouris, je passe le bout de mes doigts gantés le long de sa cuisse, juste pour la voir frissonner de terreur. J’approche mon visage masqué de sa peau et inspire délicatement. J’ai toujours trouvé que la peau d’une femme sentait divinement bon. Spécialement sans parfum ou crème. La chair, les cheveux, la sueur, la moiteur de la terreur, il y a quelque chose qui m’allume. Elle est toute fraîche. Mes hommes l’ont passé sous un jet violent et glacial dans la pièce d’à côté. Ce qui a laissé ses lèvres et ses mamelons d’une teinte violacée et une peau laiteuse.

—Eli-za-ve-ta… chuchoté-je, en approchant mon masque au-dessus d’elle tout en passant une main dans ses cheveux.

La musique la rend folle. Non seulement elle est forte, mais elle joue à répétition. C’est fait exprès. Ça augmente l’état de panique et désoriente les victimes.

Au son de ma voix sous ce masque, avec cette touche horrifique, ses tétons durcissent et son corps tremble. Elle se démène sous les sangles, mais elle ne peut pas fuir.

C’est une belle blonde aux yeux bleus pétillants, avec des petits seins et une silhouette très mince, comme la formulé le client dans le contrat. Ce physique me plaît moins. J’ai toujours été attiré par les filles badass qui me résistent, qui ont du répondant. Les femmes tatouées me font grave bander. Seyv apparaît dans mes pensées et je chasse aussitôt les images de son corps parfait, son sourire qui me tue et l’effet qu’elle provoque sur moi.

Mes doigts tremblent et je sens mon sexe vouloir bondir juste à revoir la scène où elle se fait baiser par cinq mecs. Ouff… Je ne sais pas pourquoi je deviens tout bizarre quand je pense à elle. Une sueur froide coule sur ma nuque et je deviens vite déconcentré. J’ai deux fantasmes dans la vie : le viol et le candaulisme. Non seulement Seyv me plaît physiquement, mais elle s’est fait violer sous mes yeux et je n’ai pas pu tenir dix minutes sans éjaculer dans mon pantalon.

Parti dans mes pensées, la musique, lointaine alors, ressurgit à mes oreilles comme si on en avait monté le son d’un coup, tandis que je reviens à ce que j’étais en train de faire. La victime pleure sur la table. Faut que je reste concentrer, merde !

—Normalement, j’injecte un sédatif pour que la victime s’endorme avant le processus de mise à mort. Sauf que, ça, c’est quand je me sens d’humeur, tu vois ? Mais là… je suis énervé. Il y a une nana là-haut, dans mon penthouse qui a tué un de mes hommes. Et je suis très, très, mais très en colère. J’aimerais la buter cette pute, mais pas tant qu’elle m’est utile. Par contre, je peux la punir pour ce qu’elle a fait. Elle ne recommencera plus jamais après ce que je vais lui faire.

La jeune femme n’en n’a rien à faire de ce que je raconte, elle ne m’écoute même pas sous cette musique envahissante et sous ses cris étouffés.

Je mets en place les deux cathéters, un sur chaque bras, puis m’empare d’une seringue pour procéder au protocole de Chapman qui s’appuie sur un trio de médicaments puissants. Je commence par la première injection de pentobarbital, ce qui plonge aussitôt la victime dans l’inconscience. Ses larmes roulent sur ses tempes. J’en profite pour replacer ses cheveux et maintenant qu’elle est dans les vapes, d’enlever les sangles avant qu’elles ne marquent son corps. J’écarte un peu ses jambes, pour que le client soit excité dès qu’il passera la porte. Mes deux gardes restent de marbre et attendent que je finisse. Mais j’ai soudainement un problème avec ma queue qui n’arrête pas de palpiter dans mon pantalon. Je dois replacer mon érection puisqu’elle se coince rapidement au niveau de ma ceinture. Je crois que j’ai hâte de punir Seyv. Une fille comme ça, qui est dure à soumette, m’envoie un défi qui m’allume. Elle n’a peur de rien, elle me regarde et contrairement à toutes les autres, celle-ci à la rage au ventre et semble avoir un caractère bien trempé. De plus, elle est rusée. Mais surtout, c’est la plus belle femme que j’ai jamais vue de ma putain de vie. Elle a des petits points de pigmentations sur le nez et aux pommettes qui me font craquer, de magnifiques yeux émeraudes et son tatouage à la hanche droite qui longe sa cuisse. Un tatouage composé de roses noires épineuses comme le mien sur mon cou, avec un crâne noir. On dirait même que c’est mon masque qu’elle a sur la peau. J’aime tout, même sa collection de tatouages qui dessine chaque partie de son corps. Je pourrais aussi parler de ses cheveux longs, soyeux, son visage parfait, d’une pure divinité, tel un ange et telle une diablesse à la fois. Et que dire de ses seins parfaitement bombés que j’ai envie de caresser et de lécher.

Merde…

J’ai envie de la baiser, maintenant. Quand elle m’a dit que si je ne l’avais pas violée moi-même c’était sans doute parce que j’avais une micro-bite, elle m’a bien fait rire. Ça me donne encore plus envie de lui montrer mon manche, elle va regretter ses paroles très vite.

—Patron ? Le 100 mg de bromure de pancuronium, me mentionne un de mes gardes alors que j’étais perdu dans mes songes, encore.

J’injecte le deuxième liquide, ce qui paralyse la victime et arrête sa respiration. Je peux passer à la dernière seringue, le chlorure de potassium, ce qui engendre un arrêt cardiaque.

Sur l’écran de l’électrocardiogramme, tout démontre qu’elle est morte. Plus aucun signe vital, pas même un faible pouls.

Je peux retirer les électrodes de ses bras, ses jambes et à sa poitrine. Elle est prête à satisfaire mon client. Il pourra entrer ici, avec sa carte de membre dans vingt minutes et faire tout ce qu’il veut d’elle. J’ai déjà retrouvé un corps démembré et constaté que le mec s’était masturbé avec tous les membres détachés. Chacun son truc. Habituellement, la chambre froide reste toujours celle la plus propre, alors que dans les autres cellules d’isolement, on retrouve toujours les murs éclaboussés de sang.

Je retire mes gants et les balance dans la poubelle. J’arrête la musique avec mon téléphone et un de mes gardes enlève mon manteau. En sortant de la chambre froide, je sens aussitôt une chaleur agréable m’envahir. Mes gardes vont s’occuper d’accueillir le client qui passera par une porte privée et de lui rappeler le temps qu’il possède avec le cadavre. Pendant ce temps, je longe le couloir aux nombreuses cellules d’isolement, jusqu’à ce que j’atteigne l’ascenseur. J’utilise ma clef personnelle pour faire remonter l’ascenseur jusqu’au dernier étage : mon penthouse.

Dès que les portes s’ouvrent, je me trouve dans mon grand hall d’entrée fermé, je pousse les deux grandes portes de bois. De l’autre côté, se trouve mon salon sur la droite et sur la gauche, un pan de mur complet est recouvert d’écrans qui me donnent une vue d’ensemble sur la boîte de nuit via des caméras de sécurité et qui tapisse tous les recoins de mon établissement. Tout droit, au fond du penthouse, il y a ma cuisine, mais ce qui m’intéresse, c’est ma chambre au bout du couloir à gauche. Dès que je donne un coup dans la porte, ma botte passe près de toucher une flaque de sang.

Putain… Il ne déconnait pas Dominik, il avait raison…

Il y a du sang qui a giclé partout : au sol, sur les murs, les draps de mon lit et… Seyvanna en est recouverte, alors qu’elle porte mon t-shirt blanc.

Je retire doucement mon masque. Mon regard fusille Dominik qui est assis sur un de mes fauteuils en cuir, arme braquée sur la nana.

Ce qui attire mon attention juste après, c’est que la fille de Barron Pavlenski, me fait un clin d’œil provocateur comme pour me dire « Tu veux jouer avec moi ? Alors prépare toi à un adversaire de taille » Elle tient encore ce fil étrangleur qui sort de je-ne-sais-où.

Putain, elle est tarée… Incroyablement belle et bandante, mais tarée. Ça ne me déplaît pas… Il n’y en a pas beaucoup dans son genre. Si elle est ici, c’est qu’elle est mon pion le plus précieux qui va me servir à gagner un jeu de pouvoir. Autrement, je la tuerais sans hésiter. Même s’il y a ce truc qui me plaît chez elle : sa folie…

[1]Devushka, mot russe qui veut dire « fille »

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