Dans les méandres de mes peurs, affolée par ces coeurs autour de moi, avant toi mon amour, avant toi j'étais paumée.

Avant toi mon amour j'étais cette femme peu sûre d'elle, terrorisée par les gens, vivant chaque nouveau jour comme un jour de pluie. Avant toi mon amour, la vie n'avait pas plus d'intérêt que le trépas, je la voyais avancer mais sans moi. Avant toi mon amour je ne savais pas quel sens donner à tout ça. Tout ça, avant toi.

Et un jour tu as posé tes yeux pour moi, tu es venu t'asseoir juste à côté, ton odeur de patchouli et tes yeux noirs, tu m'as dit bonjour et tu as suivi ce cours, dans ce grand amphithéâtre.

Et tu as recommencé, le lendemain et les jours suivant, ta présence était devenue mon repère, ma bouée, ton odeur la raison de me lever chaque matin. Petit à petit, tu m'as fait sourire, puis rire, puis rougir. Nous avons partagé nos cours, nos soirées, frôlé nos mains, puis nos bouches. Tu me trouvais parfaite, brillante, belle, je croyais que tu mentais, mais tes yeux étaient sincères.

Un jour tu m'as offert un cadeau, c'était des clefs, tu avais trouvé un appartement pour nous deux, j'étais folle de joie. Tu as été d'une telle prévenance, t'occupant de mes affaires, de mon emménagement, de la résiliation de mon ancien contrat, impatient que nous créions notre cocon de bonheur.

Je repenserai toujours à ces secondes de félicité, elles couleront à jamais dans mes veines comme une fontaine de jouvance, oh mon amour, si tu savais comme je t'aime.

La porte de cet appartement s'est refermée sur tout ça. Tu t'es rendu compte que je n'étais pas si parfaite, tu as commencé par releverdes petits détails sur le ton de l'humour : quelques cheveux qui traînaient au sol, ou sur le matelas de notre lit. Puis de l'humour en dégoût : tu n'aimais pas ça, c'était dégueulasse, j'étais dégueulasse. Tu as relevé la moindre salissure, j'ai osé te taquiner sur ta maniaquerie. Que n'ai-je fait? Nous étions à table et tu as tout renversé par colère, si j'aimais tant que ça le bordel, et bien j'étais servie.

Je suis restée assise, jusqu'à ce que tu claques cette foutue porte "pour aller te calmer". Je suis restée sous le choc, puis après quelques petites minutes si longues j'ai tout nettoyé.

Tu es revenu, j'étais blottie en boule dans notre lit et tu es venu t'accroupir à mon chevet, tout ton être trahissait ton malaise, tu t'es excusé de t'être emporté de la sorte, c'est que c'était un traumatisme pour toi, ton père te frappait si tu n'étais pas propre à souhait.

Oh mon amour, je suis désolée, si j'avais su j'aurais été plus attentive, je n'aurais rien laissé traîné.

Alors je tentais de faire attention à chaque acte, pardonne-moi mon amour, je ne voulais pas faire autant d'erreurs. Je ne voulais pas oublier cette lettre importante dans la boîte aux lettres, je ne voulais pas t'alourdir de mes inquiétudes, tu avais raison mon amour, il vallait mieux que j'arrête mes études, je n'arrivais pas à tout gérer, je n'en étais pas capable. Merci pour ta patience mon ange, je voulais vraiment m'occuper de notre foyer au mieux et te rendre heureux comme tu m'as rendu heureuse.

Mais je suis nulle en vrai, regarde, je t'ai encore fait du mal hier, tu es rentré si fatigué, je ne pensais pas que tu avais besoin de silence, je voulais juste te parler. Ce message sur mon téléphone, c'était juste une personne de la famille, je ne te trompe pas tu sais, je ne t'aurais jamais trompé, j'avais coupé les ponts avec les autres, je ne voulais pas que tu t'inquiètes, c'était ma famille je t'assure, je ne voulais pas te blesser.

Oh je suis si nulle mon amour, je m'en veux tellement de te décevoir autant, je voulais être parfaite pour toi comme tu me voyais au tout début mais je ne le suis pas. Oh pardonne-moi je t'en prie. Pardonne-moi.

Je ne resterai pas, je te le promets, voilà des mois que je te déçois, je ne te blesserai plus jamais, je ne te décevrai plus jamais.

Mourir, c'est te libérer.