Lundi 11 novembre / 3

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Emmanuel

Bordel, entre tendresse et intensité. J'adore. J'adore ces changements de rythmes. Si je pouvais... Mais ce n'est pas raisonnable. J'entends Julie pouffer et je regarde l'état du lit. Les draps sont défaits, le matelas a même quitté son emplacement. Un coussin est par terre, l'autre sous le ventre de ma maîtresse qui penche dangereusement par-dessus le lit. La pauvre ne doit pas être bien confortablement installée. Je me redresse, la prends dans mes bras et l'embrasse tendrement. Qu'est-ce que j'aime nos rencontres !

Mais elles ont une heure de fin, et si lors de notre premier rapprochement, nous avions pu passer la nuit entière ensemble, ça ne pouvait plus être le cas. J'avais toujours promis à Charlotte de rentrer dormir et Julie n'accepterait pas qu'elle s'inquiète ou que nous changions l'organisation familiale.

Le sérieux revient, avec la douceur. À la sortie de la douche, je retrouve Julie une nuisette sur le corps et les pantoufles de l'hôtel au pied.

— Tu restes là pour la nuit ?

— Oui. Demain, je retourne à Lausanne, cela m'évitera quelques kilomètres. Et j'ai bien envie de m'endormir avec ton odeur.

— Je croyais que le mercredi, tu bossais de chez toi.

— Oui la plupart du temps. Mais avec ce rendez-vous aujourd'hui je n'ai pas pu finir ce que je devais et comme les enfants sont chez Tim cette semaine, j'en profite.

Je passe à côté d'elle pour rejoindre la chambre et commencer à me vêtir. Je dépose un baiser sur ses lèvres, elle entoure mon corps et se blottit contre moi. Je la serre fort et embrasse ses cheveux. Les séparations ne sont jamais très simples, même si elle ne me fait aucun reproche, je sais, je sens qu'elle aimerait revivre toute une nuit avec moi.

— Les fleurs... c'est Patrick qui me les a offertes. J'ai accepté de boire un verre avec lui hier soir.

Merde !

— OK. Et ? Tu m'en parles parce que...

Elle recule légèrement son visage et me fixe de ses magnifiques yeux bleus avant de prononcer ce que je redoute depuis que je la connais.

— Ce que tu m'offres est génial, mais cela ne me suffira pas sur du long terme. Tu t'en doutes.

Je refuse d'acquiescer même si oui... je le sais depuis le début.

— Manu, tu as une femme, des enfants, une vie de famille. Quand je rentre le soir, je n'ai personne une semaine sur deux. Coucher avec toi, j'adore... Mais je ne suis pas...

— Tu m'as dit que tu n'étais pas prête à vouloir t'approcher d'un mec.

— Et c'était vrai. Et je ne suis toujours pas prête à lui faire une place dans ma vie, mais...

— Donc c'est sérieux avec ce type ?

Je la lâche et m'éloigne. J'aimerais qu'elle se taise, qu'elle ne m'en parle pas, qu'elle ne soit pas en train de me dire ce que je crains.

— Lui ou un autre. Pour l'instant, je n'en sais rien. Oui, c'est trop tôt, je ne lui ferai pas une vraie place dans ma vie. Mais je n'aime pas être toute seule. Tu peux comprendre, non ? Que parfois, j'aimerais avoir de la compagnie pour une sortie au...

— Et donc ? Nous deux... Tu vas me virer ? l'interrompis-je.

— Je n'en suis pas là. Je voulais simplement te dire que...

— Un mec te tourne autour. C'est bon j'ai compris. Tu me diras quand je devrais me trouver une autre occupation les mardis soirs.

— Eh oh ! Tu vas te calmer, oui, s'énerve-t-elle.

Je balance mon t-shirt sur le lit et me retourne brusquement. Je crois que mon regard l'effraie parce qu'elle a reculé d'un pas. Je m'en veux de réagir de la sorte, mais je ne supporte pas l'idée de la perdre.

— Ben quoi ? Moi, je me partage entre toi et Charlotte, mais toi... le jour où un mec entrera dans ta vie, tu me jetteras. J'ai bien compris.

— Charlotte accepte et tu n'as pas à lui mentir, mais si un jour je rencontre quelqu'un...

— Je refuse.

Elle marque une hésitation, soulève un sourcil et me fixe avec étonnement avant de grogner :

— Mais t'es qu'un égoïste en fait. Tu refuses que je sois heureuse.

— Si. Bien sûr que je veux que tu...

— Non ! Tu viens de dire l'inverse. Tu penses vraiment que je vais pouvoir me contenter d'un petit coup vite fait, une fois par semaine encore longtemps ?

— Vite fait... t'es gonflée. On a passés trois heures ensemble.

— Oui, et tu t'habilles et tu repars retrouver ta femme. Ce n'est pas un reproche Manu, mais...

— Ah ouais ? Alors c'est quoi si ce n'est pas un reproche ?

Julie

Pourquoi refuse-t-il de comprendre ? Pourquoi rend-il cette discussion aussi compliquée ? Je ne lui ai jamais promis l'exclusivité. Même si je ne pensais pas pouvoir rencontrer quelqu'un si vite et surtout avoir envie de m'en rapprocher. Tim avait bien bousillé ma confiance et l'aventure que Manu me proposait semblait un bon compromis, sans oublier qu'une attirance incroyable nous habitait et devenait de plus en plus difficile à ignorer.

— Tu aurais préféré que je te mente, que je sorte avec Patrick et que tu l'apprennes par les enfants ?

— Donc tu l'envisages sérieusement ? Tu as couché avec lui ?

— Manu !

— Quoi ? Je n'ose pas non plus savoir si tu m'as fait courir un risque ?

Je ferme les yeux une seconde et secoue la tête totalement dépitée. Comment peut-il penser que j'aurais eu cette imprudence ? Comment peut-il imaginer que je puisse coucher sans lui en avoir parlé avant. Je ne vais pas lui raconter chaque sourire échangé, mais un pas aussi important...

Je ne me voyais pas me partager ni expliquer la situation à Patrick, puisque c'était lui qui semblait se rapprocher le plus d'un futur compagnon.

Impuissante, je regarde Manu rassembler ses affaires, finir de se vêtir puis s'avancer vers la porte sans prononcer un mot. Je le rattrape juste avant qu'il déverrouille la serrure et le retiens :

— Manu, ne part pas fâché, s'il te plaît.

— Tu voudrais peut-être que je saute de joie, soupire-t-il.

— Non, mais que tu m'accordes au moins un regard et un baiser.

Ma voix tremble un peu et il a dû le remarquer. Il me tourne le dos, mais ses épaules s'affaissent. J'espère un retournement. Je l'imagine le visage penaud, le sourire au bord des lèvres et son regard amoureux se poser sur moi. Je rêve de sa bouche sur la mienne et de sa langue s'engouffrant pour un dernier échange digne d'un baiser de cinéma.

Je retiens mon souffle une seconde, mais il renonce et grogne un « Je peux pas » avant de quitter la chambre.

La porte ouverte, un courant d'air me glace, à moins que cela ne soit la froideur de mon amant qui m'achève. Je le regarde partir, incapable de lui promettre plus que ce que je lui ai déjà promis. S'il ne veut pas comprendre...

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