Jeudi 6 juin / 3

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Charlotte

Zut, j’y suis allée un peu fort là. Julie est cramoisie. Son visage s’effondre, elle baisse la tête, ferme les yeux et je vois bien qu’elle essaie de répondre sans réussir à formuler ses mots. Charlotte… diplomatie !

— Excuse-moi Julie, ça ne me regarde pas.

— Je… j’ai jamais… enfin tu vois… J’en parle jamais.

— A personne ?

— Avec ma sœur… au début. Y a longtemps… Mais plus aujourd’hui.

— Je comprends, en plus on se connait à peine. Les vacances disais-tu ? Pour nous, dix jours en Italie. Et vous ?

— Trois semaines dans un camping, dans le sud-ouest de la France. Je me réjouis. Les enfants s’amusent tellement à la plage et les activités du camping plaisent à tous. Tim passe son temps à faire du sport, et me laisse bouquiner tranquille.

— Mais ça signifie… repas sous tente, vaisselles, ménage, rangement…

— Il est plus souple, surtout avec le sable. Une année, nous avions loué une maisonnette… ce fut l’enfer à chaque grain de sable apporté à l’intérieur. Au moins au camping, le sable y en a partout, même lui en ramène dans notre lit. Et c’est plutôt du camping luxe. On loue toujours un bungalow pour huit personnes, ainsi on a bien assez de place. Apparemment, cette année j’aurai même droit au lave-vaisselles.

Waouh… non mais sérieux !

Rien ne change face à son quotidien. Sauf peut-être les horaires. Et encore. Je vois bien Tim debout aux aurores pour faire du sport avant les grosses chaleurs. Faut que je change de sujet, je commence à sentir trop d’antipathie face à son mari. Il plait à Manu, elle semble amoureuse… qui suis-je pour juger ? C’est comme si quelqu’un se permettait de me faire des remarques sur mon rythme de masturbation. D’ailleurs ce matin, sous la douche, hummm le petit jet d’eau juste sur mon clito… je retiens un frisson, ferme les yeux… Changement de sujet, c’est plus prudent.

— Et tu penses qu’avant les vacances, on pourra vous inviter chez nous ? Vous semblez avoir des week-ends surchargés.

— Le mois de juin est très pris, oui. Beaucoup d’anniversaire dans la famille.

— Et un vendredi soir ? insisté-je.

— Tim ne rentre jamais avant 21h le vendredi. Il aime clôturer sa semaine au calme sans plus aucun collaborateur et pas avoir de retard en arrivant le lundi. Nous n’avons que dimanche prochain de libre, sinon ça sera septembre.

— Ce dimanche ? Nous sommes à la montagne avec Manu.

— Tant pis…

— Et si vous veniez avec nous… juste pour une nuit ?

— En famille ?

— Non… seulement Tim et toi. Chaque année, mes parents louent un chalet en Valais pour quelques semaines et nous en font toujours profiter. Avec Manu on s’accorde quelques week-ends par année pour nous retrouver, histoire d’entretenir la flamme et ne pas être que des parents mais aussi redevenir mari et femme, l’espace de quelques heures.

— Et les enfants ? Vous en faites quoi ?

— Ils seront avec mes parents justement. On les emmène chez eux vendredi soir, on passe samedi, dimanche rien que tous les deux et le soir ils nous rejoignent avec Marion et Maxime. Mes parents restent ensuite trois semaines et se régalent de randonnées dans les Alpes.

— C’est tentant. Un week-end entre adultes, soupire Julie. Je ne sais pas si je pourrais confier mes enfants à mes parents… tous les trois, ça fait beaucoup.

— Même pour une nuit ?

Je sens que Julie hésite. Même si j’envisageais ce week-end plein de sexe avec mon homme et que forcément si on a des invités ça ne sera pas pareil, j’ai envie de mieux les connaître et peut-être… les décoincer un peu.

Au même moment, le téléphone de la maison résonne et Julie s’empresse de répondre.

Julie

Un week-end entre adultes, pourquoi pas, mais est-ce une bonne idée de me rapprocher de Manu ? C’est trop tôt. Je pense qu’après l’été ça serait bien plus prudent.

Je décroche le téléphone et réponds à ma belle-mère.

— Dimanche, nous pensions aller voir le match de Philippe, le neveu de Tim. Sais-tu qu’il est en demi demi-finale ? Est-ce que vous nous accompagnez ? me demande-t-elle après les salutations d’usage.

Philippe est aussi mon neveu, il me semble, mais je ne dis rien. Et sincèrement, passer un après-midi en plein soleil à observer deux adolescents échanger des balles par-dessus un filet, très peu pour moi. Je sais que Tim ne voudra pas non plus, par contre Tristan adore le tennis, c’est sans doute la seule activité qui l’éloigne des écrans. Et j’ai l’impression qu’il idolâtre un peu Philippe. Mais entraîner tout le monde au bord d’une enceinte de terre battue me semble être une mission impossible. Que faire ?

Je jette un coup d’œil à Charlotte avant d’expliquer :

— Nous venons d’accepter une invitation pour ce week-end, j’en suis désolée, Cécile. Par contre, si vous voulez bien prendre Tristan avec vous, il en sera ravi.

— Comme le match est en Suisse Allemande, nous partirons le dimanche aux aurores. Nous ne le prendrons que s’il passe la nuit ici.

Je souris, même si j’ai un peu le sentiment de me débarrasser d’un de mes enfants, je jubile de ne pas devoir supporter les remarques de ma belle-mère tout un après-midi. Puis je me rends compte que Charlotte n’a pas manqué une syllabe de ma conversation et sourit comprenant que je viens d’accepter sa proposition. Je conclus mon téléphone en organisant les détails avec ma belle-mère puis rejoins mon invitée.

— Génial ! Vous venez alors !

— Attends… il faut encore convaincre Tiph’ et Théo de passer la nuit chez mes parents et amadouer Tim. Ce n’est pas gagné.

— Mais toi, tu en as envie ?

Je plisse les yeux et imagine à voix haute cette escapade.

— Deux jours sans les repas à préparer, les activités à organiser, les histoires à lire le soir, les chamailleries pour se doucher...

— Rassure-moi… les enfants te lâchent les basques de temps en temps ?

— Oui, oui, mais rarement les trois en même temps. Je crois même que ce n’est jamais arrivé.

— Et pourquoi tes beaux-parents ne les prendraient pas tous ? s’étonne Charlotte.

— Jamais ! Elle m’a assez reproché de vouloir une famille nombreuse. Un à la fois, chez eux. Mes parents sont plus disposés mais leur appartement n’est pas très grand et ils voyagent souvent. J’essaie d’organiser ça et te redis.

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