Retour à la réalité

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- Mathis ? Mais qu'est-ce que tu fais là ? Dis-je étonnée de le voir.

- T'as pas vu mes messages ? Dit-il en montant à l'étage.

Je regarde mon téléphone, hébétée. Je l'allume et vois que j'ai reçu dix notifications de Whatsapp. Ce matin... Pendant que je m'envoyais en l'air.

- Haaa mais si ! T'as déjà fait mon lit ! Merci M'man.

Hein ? Comment ça son lit ? Je lis les messages. Je ne comprends rien. Je relis.

"Je rentre à la maison"

"Problème avec Amélie"

"Me demande rien"

"J'ai plus les clés"

"Haaa si c'est bon ! J'ai"

"XD"

"Tu dors ?"

"Pourquoi tu réponds pas ?"

"T'es au boulot ?"

"Je démarre"

Avant de pleinement intégrer ces informations, j'entends du bruit à l'étage. Je monte.

- Hey mec ! Je me disais bien que je t'avais entendu ! Dit Maxime sortant de la salle de bain.

Juste une serviette autour de la taille. Il se frotte les cheveux avec une autre. Mon coeur râte un battement. Il est sublime.

- Qu'est-ce que tu fous là gueux ? Dit Mathis. Je te croyais en Australie !? Mais attends...

Je vois le cerveau de Mathis surchauffer. Combien de temps lui faudra-t-il pour comprendre la situation ?

- Pourquoi tu sors de ma douche ? T'as..., dit mon fils en nous regardant l'un après l'autre.

Voilà, il lui a fallu cinq secondes. Je suis morte de honte. Mon fils ne voudra plus jamais me parler. Ma fille ne reviendra pas à la maison. Même pas pour Noël !

-... dormi dans mon lit ? Pourquoi ?

Ha non. Finalement, il n'a peut-être pas imaginé la perversion de sa mère !

- J'avais oublié mes clés. Ta mère m'a laissé crécher pour la nuit, le temps que la mienne vienne à la rescousse, dit Maxime en mentant sans le moindre effort.

C'est pas faux ! Pas tout à fait vrai non plus, mais passons.

- D'ailleurs, elle m'a laissé un message me disant qu'elle les avait déposées dans la boîte à lettre. Je vais pouvoir te rendre ton pieu, ajoute-il en enfilant un caleçon sous sa serviette.

- Hey mec ! Ferme la porte, merde. Pas devant ma mère !

Si j'avais un doute... Je ne l'ai plus. Il ne doit jamais savoir ce qu'il s'est passé cette nuit. Ni ce matin...

- M'man, pourquoi t'es toujours en peignoir ?

Heu... Bonne question ça. Pourquoi je suis toujours en peignoir alors qu'il est passé midi ? Réfléchis Gaby !

- T'es malade ? Ho putain... T'as chopé le Covid ?!

- Non. Non ! Je...

- Quoi alors ? S'étonne mon fils.

Oui, Gaby... Quoi alors ?

- Pas le Covid. Je pense pas. Juste... un peu souffrante. Pas une super bonne nuit.

- Ouais, je l'ai entendu faire des drôles de bruits toute la nuit, dit Maxime en sortant de la salle de bain habillé.

Mais tu vas la fermer ? Petit con !

- J'ai été plusieurs fois à la toilette. Tu vois... par le haut, par le bas, dis-je en frottant mon ventre.

J'espère qu'il interprétera le rouge de mes joues pour de l'embarras vis-à-vis d'une gastro.

- Ouais, j'imagine. Fais gaffe quand même, c'est un des symptômes du Covid aussi, dit Mathis en entrant dans sa chambre.

Je frappe Maxime sur le bras quand il passe près de moi dans les escaliers et je lui fait des gros yeux.

- J'adore quand t'es autoritaire comme ça..., murmure mon amant en me faisant un clin d'oeil.

J'articule un "et tes clés ?" muet. Il ne semble pas comprendre. Je n'ose pas le dire plus fort, Mathis n'est pas très loin.

- A plus Mathis, crie Maxime en gagnant la porte d'entrée avec son sac à dos. A plus ma belle, me murmure-t-il avant de refermer derrière lui.

Mais qu'est-ce qu'il vient de se passer là ?

- Je vais... dans la salle de bain, dis-je à Mathis qui ne me répond pas.

D'abord, m'habiller. Ensuite, réfléchir. J'envoie un message à Maxime.

"Comment tu as fait pour rentrer ?"

"Ben avec mes clés !"

"???"

"Elles étaient dans mon sac à dos. Chuuut"

Ho le salaud. Il m'a menti ? Juste pour passer la nuit ici... Je souris. Faudra que j'éclaircisse ça avec lui. Mais plus tard. Une chose à la fois. Je dois aller voir Mathis.

- Qu'est-ce qu'il..., dis-je en entrant dans la chambre de mon fils.

Je m'arrête net. Il pleure. Hooo mon bébé. Viens là. Ça fait bien longtemps qu'il n'a plus pleuré comme ça devant moi. Je crois que la dernière fois, c'était après le divorce. Pleure mon fils, tu as le droit.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Ça va pas avec Amélie ?

Il recommence de plus belle. Bon... Je vais le laisser venir à moi quand il le sentira.

- On... On s'est engueulé. Cette fois, c'était chaud. On s'est dit des trucs... Pfff... Mais je l'aiiiiime, Maman !

- Je n'en doute pas, mon ange. Mais pourquoi ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- Mais j'en sais rien. Ça allait bien et tout. Et puis, voilà qu'elle commence à me dire des trucs genre "T'es jamais là". Mais on est H24 ensemble ! Avec le confinement et tout. Comment je pourrais ne "pas être là". Sérieux ? Dit-il en sortant de la chambre.

Je le suis dans la cuisine.

- Y a plus de coca ? Pfff ça craint ici... dit-il en ouvrant et en refermant aussi sec le frigo.

Ben non, désolé. Pas de coca. Vous n'êtes plus là depuis plus d'un mois. Mais chuuut, Gaby. Ton fils a besoin de toi.

- C'est tout ce qu'elle a dit ? "T'es jamais là" ? lui dis-je en essayant de l'encourager à continuer.

- Ouais. Non. Je sais pas. Des trucs comme "physiquement présent, mais émotionnellement atrophié". Comme quoi, je joue tout le temps sur l'ordi, que je fais rien avec elle. Mais je suis TOUT le temps avec elle dans quinze mètres carrés ! TOUT le temps.

- C'est peut-être ça le problème, mon coeur. Vous êtes sur le dos de l'autre tout le temps.

- Ouais, ça tu l'as dit. Elle est tout le temps sur mon dos, grogne-t-il.

- Non... Pas que elle. Tous les deux. Pour elle aussi ça doit être difficile.

Comme son père... Il entend ce qu'il veut entendre !

- Mais t'es de quel côté ?

- Mais du côté de personne. J'essaie de comprendre, c'est tout, dis-je en tentant de calmer le jeu.

- Ouais. Bon... Je peux rester ?

- Mais bien sûr que tu peux rester. Autant que tu veux. C'est chez toi ici ! Lui dis-je en le prenant dans mes bras.

Il se dégage et repart dans sa chambre. Ouf... Ça promet. Je suis mitigée. D'un côté, je suis contente qu'il soit là. Mais d'un autre côté, ça veut dire fini Maxime. Mauvaise mère que je suis. Je pense à moi alors que mon bébé est en détresse !

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