Chapitre 1

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 - Alors… tu restes ici ? dit-il avec un sourire à faire fondre la glace.

 C’est alors que deux autres garçons entrèrent dans la pièce.

 - Tu crois que… commença l'un d'eux.

 - Eh mec, regarde devant !

 Ben se retourna avec un grand sourire tandis qu'Ehlys essaya de reculer, mais en vain, le banc derrière elle la stoppa net.

 - Vous voulez un peu d’intimité, peut-être ?

 - Ça fait deux fois que la star parle avec Madame la détective, il y a anguille sous roche, insista le deuxième garçon.

 - Ici, avec elle?

 Ben protesta à peine qu'Ehlys décida de ne pas écouter le reste et récupéra ses affaires avant de se sentir encore plus humiliée. Elle pensait que Ben aurait réagi autrement, peut-être même en la défendant. Elle préféra se cacher pendant les deux heures suivantes dans une salle de classe. Revoir Ben se moquer d’elle une fois encore serait trop. En salle de permanence, elle sortit son bloc-notes et ne sut pas quoi y écrire. Rien au gymnase n’avait retenu son attention, aucun indice, à part se sentir rabaisser.

 Pendant deux heures, Ehlys avait ignoré son téléphone et avait écouté de la musique tout en dessinant. Elle ne pensait pas avoir une véritable talent mais ses croquis n’étaient pas non plus désagréable à regarder. Il y avait toujours forme particulière qui ressortait dans ses esquisses, on ne la distinguait pas vraiment, mais Ehlys supposait que c’était sa façon de les signer. Une manière de se démarquer des autres dessinateurs.

 Quand la sonnerie résonna, elle réalisa que griffoner lui avait permis de s’évader quelques temps. Mais il était temps d’aller en Arts. C’était son cours préféré, mais y aller alors que Ben avait aussi choisi cette option pour ce semestre paraissait la pire des épreuves aujourd’hui.

 Mme Garcia, leur professeur, avait un vrai talent pour l’aquarelle. On pouvait ressentir l’esprit d’un paysage et l’âme d’un portrait dans ses peintures. C’était pour cela qu’Ehlys adorait ce cours. Sa passion pour l’art remontait à son plus jeune âge quand ses parents lui montrèrent Le jardin de Monet à Argenteuil. Les pointes de couleurs et la façon dont le peintre avait saisi l’instant avait fait d’elle une mordue.

  Ehlys s’installa à sa place habituelle où la lumière donnait plus de profondeur aux objets que Mme Garcia leur donnait à dessiner.

 - Bonjour à tous, aujourd’hui est un jour particulier. J’ai décidé de vous noter sur votre imagination. Sur votre bureau, vous avez soit de la gouache, soit de l’aquarelle, soit des crayons. J'ai donc choisi pour vous.

 Ehlys avait l’aquarelle, ce qui était un exercice plutôt complexe pour elle. Les crayons de couleurs exprimaient facilement ses émotions, elle les manipulaient avec une grande aisance et dessinait toujours ce qui lui passait par la tête.

 - A vous de me montrer votre talent. Le thème est : L’espace. Trois, deux, un, c’est parti, à vos pinceaux !

 Mme Garcia était toujours très enjouée de leur donner de nouveaux thèmes, les voir réfléchir lui donnait une satisfaction personnelle de s’assurer que l’on trouve ses thèmes inspirants. Et la classe s’y donnait toujours à cœur joie.

 L’aquarelle était quelque chose de léger, clair alors, pour Ehlys, elle ne pouvait pas peindre l’espace en lui-même. S’inspirer de la Lune pourrait fonctionner, il fallait trouver le moyen de créer un contraste nuit/Lune.

 En regardant ses camarades, tout le monde s’afférait à leurs idées. Ehlys distinguait des paysages comme le désert et une plaine, ou le vide d’une boite en plastique. Mais personne n’osait peindre l’espace. Ce lieu lui donnait tellement d’idées qu’elle ne savait pas comment commencer.

 - Ehlys, tu bloques ? Le sujet ne t’inspire pas ? s’inquiéta Mme Garcia.

 Ehlys sursauta, elle était tellement dans ses pensées que son arrivée était passée inaperçu.

 - Hm… Non, j’aime beaucoup l’espace. C’est plutôt l’aquarelle qui me pose un problème. J’aime la douceur qu’elle apporte mais mes idées ont un coté agressif que je n’arrive pas à apporter avec. Alors je réfléchis à autre chose.

 - La lune te passionne toujours autant n’est-ce pas ? Je remarque toujours dans tes dessins que tu laisses une grande part à cet astre.

 Mme Garcia avait un regard bienveillant et parlait avec beaucoup de douceur.

 - Tu sais, tu ne devrais pas te focaliser sur une page blanche mais voir au-delà, et peut être que la réponse est simplement sous tes yeux.

 Ehlys ne comprenait jamais ce que Mme Garcia voulait dire, mais elle essaya et regarda au-delà de sa page blanche. Ses pensées partirent loin et la regagnèrent avec une idée : si le contraste avec un papier noir pouvait donner la violence du silence de l’Univers alors l’aquarelle apporterait la douceur de la lumière de la Lune.

 Alors que son idée prenait peu à peu forme dans sa tête, une voix, qu'elle entendait dans chaque cours, essayait d’attirer son attention.

 - Ehlys… Ehlys, s’il te plait retourne-toi…

 Elle reconnaitrait ce timbre entre mille. Peut-être voulait-il l’humilier encore une fois, alors non, Ehlys l’ignora. Elle trouverait sa broche, la lui rendrait et ferait en sorte de l’oublier. Ben ne mettrait pas un autre cœur brisé dans sa collection.

 - Ehlys, arrête de m’ignorer... Ce n’était pas cool de leurs parts de dire ça. Ils voulaient juste plaisanter, c’est leur manière à…

 - Stop, j’en ai assez entendu pour aujourd’hui Ben, je retrouverai ta broche et je ne veux plus jamais entendre parler de toi. Maintenant laisse-moi.

 Ehlys savait que ces mots lui feraient du mal. Son coup de coeur n'était peut-être qu'un coup finalement. Mais il fallait regarder le positif, elle connaîtrait d’autres garçons bien mieux.

 La sonnerie retentit, ce qui indiquait à Ehlys que sa journée était enfin terminée. En une journée, bien trop de choses s’étaient passé et il lui faudrait au moins trois heures pour les raconter à sa meilleure amie.

 Mince alors, elle avait oublié de lui répondre par message. En allumant son téléphone, elle remarqua que Betty lui avait envoyé dix messages et l'avait appelé trois fois et que sa maman lui avait envoyé un message ce qui était étrange car sa mère n’aimait pas en envoyer sauf si c’était urgent et personnel. Ehlys souffla en marchant vers sa voiture. Sa journée n’était pas encore terminée.

 En arrivant chez elle, à quinze minutes en voiture du lycée, elle aperçut une voiture noire qu’elle ne connaissait pas. Ehlys n’avait aucune notion en marque de voiture ou même en mécanique. Son père l’avait bien compris. C’était pour cela qu’il lui avait choisi un modèle facile à se souvenir : une Citroën C3 Karma. Traduction, elle retenait Citroën comme citrouille, C3 comme le chiffre trois, l’année de sa naissance, deux mille trois, et le violet était sa couleur préférée. Son papa savait que le violet faisait ressortir ses yeux bleus avec des reflets pourpres ou soleil. Ehlys était bien plus proche de son papa. Chaque question ou chaque doute, elle se confiait à lui.

 Avec le soleil, Ehlys ne distinguait pas l’intérieur de la voiture. Peut-être que son propriétaire était chez elle.

 Alors, Ehlys se dirigea doucement vers la maison, mais son appréhension grandissait à mesure qu'elle s'approchait de la porte d'entrée. Il ne fallait pas avoir peur. Finalement, que pouvait-il lui arriver de pire ?

 Ehlys poussa donc la porte d’entrée et se retrouva face à trois personnes, ses parents et le supposé propriétaire de la voiture. Ils avaient l’air sérieux. Ça n’inaugurait rien de bon pour elle.

 - Ehlys, il faut que l’on parle.

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