До свидания, Таня… (Do svidaniya, Tania…)

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" Souvenirs de l’Est

Souvenirs qui me restent

Que me reste-t-il de mes souvenirs de l’Est ? "

Souvenirs de l’Est

Paroles / musique : Didier Barbelivien / François Bernheim

Interprète : Patricia Kaas

Septembre 1991… Oui, c’est à cette date que je reçus ta dernière lettre, tes derniers mots d’amour, Tania…

Cela faisait cinq ans que nous correspondions toi et moi, la petite poupée russe et le french lover. Ton premier courrier, tu me l’avais écrit dans cette langue maternelle que je découvrais à peine. Je venais d’entrer en classe de seconde et hormis l’alphabet cyrillique, je ne maîtrisais pas grand-chose… Je mis donc trois bonnes semaines à te déchiffrer. Par la suite, on se mit rapidement d’accord pour s’écrire dans une langue plus universelle : l’anglais.

Au fil des lettres, nous apprîmes à nous connaître et à nous apprécier. Puis vinrent les traditionnels échanges de photos, de petits cadeaux, et le partage d’une passion commune pour la variété française. Je craquai immédiatement pour ta beauté et ton charme asiatique ; je ne mis d’ailleurs pas très longtemps à te dévoiler mes sentiments qui s’avéreraient par la suite réciproques.

Mais nous dûmes attendre mes dix-huit ans pour que ma grand-mère maternelle m’offre, en récompense de l’obtention de mon baccalauréat avec mention, un billet d’avion pour Moscou et que nous puissions enfin nous rencontrer. C’était au mois d’août 1989, la période la plus heureuse de ma vie… Un mois d’amour, un temps trop court où nous devions vivre au présent et dans l’urgence une passion brûlante. Nous évoluâmes naturellement du simple flirt au désir intense, à l’osmose physique et spirituelle la plus totale. Un concentré d’amour charnel comme pour compenser ce manque de temps à passer ensemble… Et puis, mon retour en France, nos lettres de plus en plus enflammées et cette promesse de se revoir le plus vite possible, de se marier pour vivre ensemble…

Je m’apprêtais à entrer en Licence de Lettres Modernes lorsque je reçus cette dernière lettre. Je ne savais d’ailleurs pas que c’était la dernière. Rien ne le laissait supposer… C’est ce qui rendit ton silence encore plus insupportable, j’avais l’étrange impression qu’il n’était pas volontaire.

Dans ce courrier, tu évoquais un prochain voyage en France, cette année sabbatique que tu voulais prendre pour t’y intégrer et pour m’épouser. Tu décrivais aussi cette inquiétude pour ta famille dans un pays qui venait de vivre un coup d’Etat. Tu me demandais ce que l’Occident savait sur cette situation politique et ce que j’en pensais personnellement. Je t’écrivis promptement en retour. Je pourrais aujourd’hui encore te réciter par cœur ce que je te disais dans ce courrier auquel tu ne répondis jamais, tous ces mots d’amour que tu ne reçus peut-être pas. Mais les mois passèrent. Ma grand-mère savait que j’étais sans nouvelles de toi et que cela me rendait fou. Elle m’offrit alors à nouveau un billet d’avion pour Moscou.

Je m’y rendis en avril 1992, mais tu n’habitais plus cette datcha que je connaissais. Je me renseignai à l’université où tu étais censée étudier pour savoir s’ils pouvaient m’indiquer ta nouvelle adresse, sans succès. Je contactai donc Natacha, ta meilleure amie que tu m’avais présentée trois ans plus tôt. Elle me dit que ta famille avait déménagé pour Saint-Pétersbourg, l’ex-Leningrad que tu m’avais fait connaître le temps d’un week-end. Elle était toute aussi inquiète que moi car elle n’avait plus aucune relation avec toi depuis ton départ. Elle m’accompagna donc dans cette ville maintes fois rebaptisée. Contre toute attente, nous n’y retrouvâmes que ton frère Yvan. Il nous raconta la mort tragique de tes parents, la tienne, vous trois emportés par une saloperie de maladie héritée des nuages radioactifs essaimés lors de la catastrophe de Tchernobyl en 1986 ; une famille entière anéantie en six petites années… Et dire que je te croyais victime du nouveau régime politique…

Je demeurai là, abasourdi par la terrible nouvelle, me rendant à peine compte de la réalité des faits. Tu n’étais plus ; il ne me restait que mes souvenirs, quelques photos et ces lettres, ces si précieuses lettres qui me relient encore à toi, la dernière étant ton ultime adieu…

Mon cœur saigne… Cela fait plus de dix ans que je t’ai perdue, dix ans que je n’arrive pas à faire le deuil de ta disparition et de notre amour. Personne ne t’a remplacée depuis. A chaque date anniversaire de notre première rencontre, je me rends sur ta tombe pour t’amener ces roses que j’ai toujours rêvées de t’offrir… Tania, ma belle, ma tendre petite poupée russe, je ne t’oublierai jamais. До свидания [2]…


Ton french lover

[2] do svidaniya signifie au revoir en russe

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