Chapitre 20 - Petit bonhomme sous la Méditerranée

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4 heures après le vol du DAHT

Une ombre s'approcha de la chambre, glissant un papier sous la porte. Dans la salle, un individu en robe grise prit le parchemin et le déplia. Sur celui-ci était écrit :

« Les Mange-Boue ont croqué le Serpent. »

Le mage gris soupira, et se laissa retomber sur son fauteuil. Un sourire tordu se dessina sur son visage.

Les prochaines semaines seraient assurément amusantes...

* * *

*Le Prophète

Le vent vole à travers l'espace et le temps. Quelle que soit sa nature, il voyage sans arrêt.

 Ainsi, il voyageait depuis des jours à travers monts et frères. Un jour, il s'engouffra dans un endroit si reculé que même ses ancêtres ne s'y étaient aventurés. Le trou dans le monde semblait hors du Tissu, mais le vent ne prête pas attention à ces détails ; il voyage, c'est tout. Une brise légère, suivie d'un zéphyr puis d'une bise. Il s’immisçait dans tous les espaces, remplissant le vide d'une fraîcheur bien méritée. Chassant l'odeur immonde de moisi, il entraîna sa houle plus profondément, dans le cœur du Monde. Mais le vent ne prête pas attention à ces détails ; il voyage, c'est tout. S'affalant comme un oiseau fatigué, il tourne sur lui même et bannit la poussière : le sol est gravé dans les langues d'antan, le temps où les hommes conversaient avec lui. Il le regrettait, restant longtemps à s'avaler lui-même pour caresser la gravure.

Le sol vibra, mû par une énergie depuis longtemps oubliée. Des lignes colorées dessinèrent les contours de l'histoire de Mourn, depuis les Sombres Jours jusqu'à l'arrivée de Méridionus. Petit à petit, la gravure dévoilait l'âge d'or des mages, au temps où ils domptaient les éléments et presque tout ce qui faisait ce monde. Vint alors le Premier Orbas, Bar'salk'nur, qui répandit son fiel à travers ce glorieux empire, détruisant autant celui-ci que le pouvoir des anciens mages. Enfin, la période actuelle s'illumina : l'Académie qui organisait le Carnaval des Sorciers.

Mais le vent sentit que ce n'était pas terminé. Il savait qui gravait ces légendes, conservant ainsi l'histoire du monde. C'était un être si vieux qu'il se demandait si ce n'était pas un de ces Anciens dont parlait les contes pour effrayer les enfants, le soir, quand le vent soufflait dans les rideaux de leurs cabanes.

Le Valargus commença à graver des centaines de lumières colorées, sa présence écrasante témoignant son impassible, car on ne le voyait que s'il l'autorisait pas. La gravure représentait sept ombres, aux traits ténus et brouillés, tenant chacune un objet étrange : un hachoir rouillé au manche vert, un cube sphérique, une liqueur dorée, un calice en or massif rempli de sang, une plume irisée, un livre aux pages infinies et un bâton qui n'en était pas un.

Le Valargus cessa d'écrire. Maintenant, le rocher dévalait la montagne. La seule chose que le vent ne savait pas, c'était où il tomberait.

* * *

Les cinq élèves étudiaient dehors, après avoir emprunté des livres à la bibliothèque. Assis sur des bancs attablés, ils feuilletaient les bouquins sans vraiment trouver des épreuves plus faciles que d'autres.

— Regarde celle-là, dit Yannis en montrant une gravure à Edward. Cette épreuve, appelée « Appel du vent », consiste à faire du funambulisme les yeux bandées, au dessus d'une crevasse de 2km de profondeur. Si les participants tombent, ils sont immédiatement disqualifiés et tournés en dérision pendant toute la durée du Carnaval.

— Moui, mais c'est pas pire que le « Petit bonhomme sous l'eau » : on doit plonger dans un lac qui se gèle au fur et à mesure du temps qui passe, où on doit y trouver une pièce de monnaie. Bien sûr, continua le blafard, le lac est en fait un étang vaseux et il est presque impossible d'y trouver ce genre de petit objet.

— Moi j'ai mieux, proclama Ugo en levant le doigt. « L'épreuve du Feu », un classique : les concurrents doivent traverser une mer de flammes de 1 Limerius, c'est-à-dire environ 1 hectare, pour récupérer une jarre magique qui avale les flammes pour en faire du lait de Yattoon, une sorte de yack d'ici. C'est pas dangereux si on sait maîtriser un sortilège Ignifuge, qu'on apprend en fin de Cycle Balron. Très compliqué, paraît-il.

Ils continuèrent à jouer au "concours de la plus grosse", cachant leur désarroi derrière une bonne dose d'humour. Mais trop d'humour pèse presque autant que le désespoir, et les jeunes lycéens semblaient de plus en plus moroses. Yannis continuait à lire les horribles épreuves qui ressemblaient plus à des blagues, mais il voyait bien que c'était vrai car le nombre de blessés était affiché sur le bas de la page (blessures autant physiques que mentales). Ce Tournoi semblait très complexe, que ce soit en terme d'épreuves ou en stratégie, car il fallait enquêter pour savoir quelles types d'épreuves allaient tomber. Toutes les méthodes étaient permises, tant que l'arbitre ne les voyaient pas. Une triche était sanctionnée de prison ferme et d'interdiction à l'éducation, ce qui était le cadet de leur soucis ; parfois, les concurrents se faisaient des coups bas hors-épreuves, pour se débarrasser des gêneurs. Tant de dangerosité aurait au moins pu figurer dans le « top 10 des trucs les plus dangereux à faire dans sa vie » sur YouTube.

Cependant, toutes les épreuves étaient très difficiles sans magie, voire impossibles. La plupart des sorts conseillés dans ce DAHT très pratique étaient hors de leur portée. Même Jinn et ses amis n'auraient sûrement pas le niveau. Voilà pourquoi les concurrents étaient souvent des élèves de Cycle supérieurs à 4 ou 5 : ils avaient l'expérience et les connaissances pour ce genre de choses.

Jinn et trois autres personnes arrivèrent : deux filles et un garçon, même si la question de la sexualité chez les mages était compliquée, leurs traits laissaient penser leur prochaine identité de genre. Yannis savait déjà que les mages ne choisissaient pas réellement leur sexe à l'âge adulte, mais qu'il était plutôt le produit de leur subconscient. Seulement, la transformation n'était pas immédiate mais progressive, il arrivait parfois qu'ils jonglent entre les deux durant leur enfance.

 Les nouveaux venus se présentèrent : Kara Ybris, Pythie Malakar et Solis Junior. Jinn s'expliqua :

— On doit être cinq pour concourir, pas plus, pas moins, et ajouta, songeur : Comment avez-vous pu deviner que le Carnaval se déroulerait cette année ? C'est quasiment un secret d’État…

— Simple déduction systématique : on a eu vent de l'affaire dans des livres d'histoire, on a calculé le prochain Carnaval… Tu sais ce que c'est, on est des curieux.

— Oui, c'est un trait caractéristique humain, de fourrer son nez dans des affaires qui ne les concernent pas, cracha Pythie avec hargne, attirant le regard de tous. Vous partagez cette aptitude avec les mikeron, n'est-ce pas ?

Pendant que Kara, sa camarade, calmait la spéciste,Yannis se tourna vers Jinn :

— Elle est souvent comme ça, ton amie ? Ou t'aurais oublié de me dire que les mages ont des sortes de règles ?

— Des... règles ? Quel est le rapport ?

Les autres lycéens toussotèrent, comme s'ils avaient avalé de travers. Yannis leur lança un regard noir, puis répondit :

— C'est rien, une blague de chez moi… Dis moi, tu as trouvé un nom pour notre équipe ?

— Malheureusement, c'est le chef qui choisit… Jinn croisa ses bras.

— Bah oui, vu que c'est toi le… Quoi ?

Les membres de l'équipe le regardèrent d'un air entendu, auquel Yannis répondit par un râle tout droit sorti du plus mauvais jeu d'acteur.

— Vous ne pensez tout de même pas, dit Yannis en se frottant l'arrière du crâne, que j'ai l'étoffe pour faire un chef ? Je sais bien que mon nom de famille veut dire « fils de chef », mais c'est pas une raison valable, si vous voulez mon avis.

— Même si tu viens de m'apprendre une chose intéressante, nous ne t'avons pas choisi pour cela, mais parce que tu es le seul qui maîtrise le Déphasage, qui sait aussi bien lire les flux et, malgré le fait que les sorts mineurs te sont quasiment impossibles, tu as une… Eh bien… Une compréhension qui nous fait défaut, ajouta-t-il tandis que Kara, Solis Jr. et Pythie acquiesçaient.

— Mais qu'est-ce que doit faire un chef pour réussir à son poste ?

 Chacun parla à tour de rôle :

— Garder l'entente entre les membres de l'équipe, dit Jinn.

— Prendre les décisions importantes quand personne n'est d'accord, ajouta Ludwig.

— Analyser et apprendre les plans de l'équipe pour les appliquer au mieux plus tard, continua Kara

— Gérer les ressources, c'est important aussi, lui confia Ugo.

Au fond, le rôle du chef se résumait à être un peu comme une roue de secours : il ne prenait de l'importance que dans les moments critiques, sans abuser de son pouvoir. La valeur symbolique de ce rôle était supérieure à son poids social/politique. Et puis, seul Jinn assurait ce rôle aux yeux de mourniens.

Yannis aimait bien voir ce rôle sous cet angle : désireux d'aider, il préférait savoir ce qu'il devait faire plutôt que de réfléchir à ce qu'il devrait faire. Gérer une équipe était nouveau pour lui ! Il leva quand même son pouce en signe d'acceptation.

— Et comment on l'appelle, ce groupe ?

Yannis réfléchit pendant quelques instants avant de répondre en souriant :

— Mes amis, je déclare que la « Ferroul Squad » est née !

En tout cas, ils décidèrent de prendre du bon temps avant demain, et commencèrent à bavasser en buvant joyeusement. L'atmosphère se détendant peu à peu jusque tard dans la nuit. Sonné, Yannis tituba un peu en se levant pour annoncer qu'il allait soulager sa vessie, provoquant quelques gloussements parmi les joyeux leurrons. Il se déplaça tant bien que mal jusqu'à un buisson, fit son affaire, et remballa son engin pour se retrouver nez à nez devant Kara, la plus ou moins tolétante du groupe. Désorienté, Il lui lâcha un vague sourire avant de s'avancer pour rejoindre les autres, mais Kara le tint par le bras. Yannis s'arrêta net avant de demander :

— Euh… Est-ce… Est-ce que… tout… va bien ?

 Il cligna des yeux, impressionné par les traits si fins du visage angélique qu'il aurait bien aimé toucher. Avait-il la même texture que le sien ?

— Oui, ne t'inquiète pas… Elle se rapprocha, le fit chanceler sans le vouloir. Oulà ! T'es bien soufflé, toi !

— Ouaip… Cet alcool était délicieux, et donne même pas envie de gerber !

— C'est normal, expliqua Kara. L'alcool fabriqué par la famille de Solis est réputé pour sa finesse de goût et d'ingrédients, pas comme vos cochonneries humaines ! ajouta-t-elle avec un sourire malicieux.

— Tu sais quoi ? Yannis la regarda intensément dans les yeux ; elle recula d'un pas. J't'aime bien… Et j'pense qu't'as raison sur ce point : on est vraiment mauvais en ce qui concerne l'alcool !

— Ah oui ?

— Ouaip… Hip ! Euh… Chez nous ça a souvent un goût trop amer ou trop sucré, et ça donne des maux de tête et des nausées !

— Pour les maux de tête, attends de voir demain, dit patiemment Kara comme si elle parlait à un enfant. Oh ! Tes cheveux brillent tellement, c'est... tu permets que je… ?

Elle approcha sa main de sa tête, les yeux pétillants. En temps normal, Yannis aurait rechigné, mais cuit comme il était, il ne trouva pas d'excuse pour refuser. Il accepta. Elle passa sa main dans sa crinière rebelle avec une délicatesse qu'il ne soupçonnait pas. Il s'abandonna à ses caresses, comme un chat ronronnant. Soudain, les mains de Kara s'aventurèrent plus bas, et Yannis sursauta. Il allait protester quand elle lui passa un doigt sur ses lèvres :

— Laisse-toi faire… C'est dans la coutume de mon pays. Si tu me veux dans ton équipe, tu dois respecter ça !

— Mais je…

— Chut !

Les mains de Kara se firent comme brûlantes à mesure qu'elle les passaient sur tout le corps de Yannis, ne négligeant aucune parcelle. Cette sensation inédite, si intense que sa respiration se fit saccadée. Un tourbillon de couleurs et de sensations menaça chaque seconde de le faire chavirer dans la folie. Les instants s'étirèrent jusqu'à devenir des fragments d'éternité, et Yannis souhaitait à ce moment que cela ne s'arrête jamais. Haletant, il croisa le regard de Kara similaire à celui d'un félin, illuminés de magie. Autour d'eux, l'air crépitait d'extase et leurs auras pulsaient à l'unisson. Soudain, Kara l'embrassa, ou plutôt aspira son essence par sa bouche comme pour se l'approprier, lui laissant un goût merveilleux sur la langue qu'il dégusta avec délice. Ils fusionnèrent comme un seul être se mouvant selon les marées du ciel, et se séparèrent à regret.

Épuisé, Yannis suait à grosses gouttes. Il n'avait certes pas perdu sa virginité physique. Mais sa virginité morale avait été balayée par un ouragan de désirs aux travers des mains magnifiques de Kara. Pour ne pas paraître grossier, il la regarda se réhabiller et admira son corps fin et hermaphrodite. Il aimait les femmes, mais, décidément, le corps de Kara lui paraissait vraiment désirable. Quand elle se tourna vers lui, il lui sourit gentiment, pour lui témoigner sa gratitude. Kara l'observa, puis éclata d'un grand rire qui jaillit comme un volcan.

— Quoi ?

Elle repartit de plus belle, ce qui énerva Yannis. Voyant qu'il était vexé, elle essuya ses larmes et se calma, puis dit :

— Tu étais si drôle avec cet air, pouffa Kara. J'avais l'impression de regarder un Yattoon après la reproduction. Est-ce comme cela que vous autres humains réagissaient lorsque qu'on vous caresse un peu ?

— Un peu ? il secoua sa tête, effaré. Tu m'as « caressé » tellement bien que j'ai cru que j'allais avoir une crise cardiaque !

— C'est vrai ? Kara semblait soudain inquiète. Je suis si mauvaise que ça ?

— Non ! Euh… Oui ! Tu voulais ma mort ou m'arracher des informations ?

Kara soupira de dépit et s'assit à côté de Yannis, se collant à lui. Immédiatement, il s'écarta, s'attirant un regard foudroyant de la part de la jeune mage. Gêné, il se rapprocha et elle prit alors un air sérieux :

— Je vois que vous, les humains, vous n'aimez pas les contacts physiques… C'est une sorte de maladie ou de réflexe naturel ?

— Non !

— Pourquoi rougis-tu ? dit-elle en gardant son air sérieux.

— Argh ! Expliques pourquoi tu m'as embrassé ?!

 Kara eut un air confus, mais opina du chef.

— Chez moi, en Kadash, on exprime nos émotions et sentiments de cette façon, parce que c'est par le contact physique que passe l'énergie magique. Les scientifiques du monde entier ne savent pas pourquoi elle fait cela, mais la magie permet d'exprimer clairement notre for intérieur en le transmettant. J'ai entendu dire que sur Terre, vous pouviez transmettre des choses par les ondes électromagnétiques pour transporter des messages vocaux, je me trompe ?

— Oui, c'est un moyen assez récent, expliqua Yannis. C'est grâce à des téléphones portables qui utilisent les ondes radio. Mais continue, c'est fascinant !

— Ravie que ça t'intéresse. Donc, pour faire simple, tu peux faire l'analogie entre la transmission des téléphones portables et la magie. Si elle se déplace essentiellement par la lumière dans n'importe quel milieu, elle se transmet à merveille entre les êtres vivants. Le seul inconvénient, c'est qu'elle emporte des informations de l'être qu'elle quitte. Pour les êtres doués de pensées, comme nous, ce sont tout d'abord nos émotions.

Elle réfléchit quelques instants, observant la voûte étoilée. Yannis pensait également à ce miracle que la magie pouvait aussi accomplir : par sa seule transmission, elle véhiculait les émotions des êtres entre eux. Comme ce serait magnifique sur Terre ! Des millions de gens seraient sauvés si les bourreaux savaient ce que ressentaient les victimes, et vice versa ! Et on n’abattrait plus les animaux, et on les respecterait, parce qu'on ressentirait leur peur lors de leur mort et on saurait qu'ils étaient des êtres pensants ! (Je réécriais)

Kara reprit la parole, arrachant Yannis à sa rêverie :

— Mais c'est totalement aléatoire. L'émotion transmise à ce moment-là est impossible à prévoir, même si on a plus de chance de transmettre notre émotion la plus forte au moment clé, ce n'est finalement qu'une question de probabilité.

— Mais alors, dit Yannis, perplexe, Comment as-tu réussi à me faire comprendre ce que tu… hum… ressentais ?

— C'est un trait de ma famille, expliqua tranquillement Kara. C'est cette forme de magie qui prône sur toutes les autres. Et cela fait des générations qu'elle l'explore et la cultive. C'est donc devenu un signe héréditaire, je pense. Voilà pourquoi je suis capable de comprendre et de transmettre les émotions des autres à travers un simple contact.

— Je suis soulagé, soupira Yannis, s'attirant le regard interrogateur de Kara. Mais j'imagine que c'est pas suffisant pour que tu ne considères plus les humains comme une sous-race.

— Détrompe-toi ! Si j'ai vu que tu étais spécial de fond en comble, je sais que tes amis ne sont pas des faiblards d'humains sans cervelle.

— Ah… Mais comment tu peux entre sûr ?

Kara haussa les épaules, puis agita sa main devant le nez de Yannis.

— Il fallait bien que je leur serre la main, conclut-elle avec un sourire espiègle.

Yannis sourit à son tour, puis garda le silence intact en observant les étoiles et les constellations nouvelles et magnifiques. Ce silence-là n'était pas sombre ; il était calme et entraînant comme le bruit de la mer Méditerranée.

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