4. Questions

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— Kiera ! Qu’est-ce que tu fous ? hurle Louis devant lequel je reste sans voix.

Pourquoi il est là, lui ? Les filles avec les filles, non ? Alors c’est plutôt à lui de me dire ce qu’il fait dans ma chambre ! Mes yeux descendent quelques secondes sur le corps nu du loup. Je me perds dans la contemplation de ses abdominaux, avant de poursuivre mon chemin plus au sud. Sauf que c’est une mauvaise idée. Je suis bouche-bée face au spectacle et sûrement aussi rouge qu’une tomate.

— Ne reste pas plantée là ! hurle Louis. Donne-moi une serviette au lieu de me regarder ! finit-il en rugissant, ce qui a le don de me faire réagir.

— Désolée, dis-je en lui tendant un bout de tissu qu’il s’empresse d’attacher autour de sa taille. C’est de ta faute aussi, continué-je en restant face à lui. Pourquoi Lucia ne partage pas la chambre avec moi ? lui demandé-je.

— Tu le sais bien… Hugo et ma sœur sont presque inséparables, souffle-t-il en observant ma réaction. Et puis la question n’est pas là ! Sors de cette pièce, tu veux ! rage-t-il de plus belle.

Je secoue la tête, marmonne puis recule vers l’intérieur de la chambre. Non mais c’est quoi cette histoire encore ? Pourquoi Louis doit me surveiller comme une enfant ? Bon, je l’avoue… Hugo sans Lucia ce n’est plus le même petit monstre mais tout de même, ils pourraient faire un effort ! En plus, je suis sûre que le loup ronfle la nuit. Super !

En y pensant, je me suis sentie en sécurité contre lui toute à l’heure, et je savais que c’était lui sans même le voir… Et puis avec la carrure qu’il a, c’est difficile de ne pas se sentir protégé. Je rumine encore un moment en attendant que Louis montre enfin le bout de son nez. Me posant mille et une questions sur le fait que je ne m’enfuis pas. Et surtout que je n’en ai pas la moindre envie.

Je m’énerve une fois de plus, tournant en rond dans notre petit quinze mètres carré qui va nous servir pour la nuit. Cherchant vainement les réponses à toutes les questions qui envahissent ma tête. Moi qui croyais tout savoir, je suis bien long d’apprendre le secret caché de mes trois compagnons. Surtout si je m'évanouis en étant en contact avec l’un d’entre eux.

Louis sort enfin de sa cachette, me souriant en biais comme pour me faire comprendre qu’il sait déjà que je vais l’assaillir de questions. Interrogatoire façon Kiera, comme diraient mes entraîneurs. Sauf que cette fois, je ne veux pas faire de mal, j’ai juste besoin de savoir dans quelle situation je me suis embarquée.

— Qu’est-ce que ta famille sait que j’ignore ? demandé-je de but en blanc au loup tout juste posté devant moi. Pourquoi ai-je autant confiance en vous alors que je suis une chasseuse ? Et pourquoi tu n’arrêtes pas de me regarder comme si j’étais précieuse ? Et surtout, c’est quoi cette manie que tu as de me surnommer « princesse » ? poursuivé-je sans lui laisser le temps de placer le moindre mot.

— Je ne peux pas te répondre, me dit-il d’un air sérieux alors que je demande juste la vérité.

— Tu vas me donner une meilleure réponse que ça, j’espère ! grogné-je en lui lançant un regard furieux qui a le don de le faire reculer d’un pas.

— Tu n’étais pas destinée à devenir une chasseuse, lâche-t-il dans un effort surhumain. Tu es… commence-t-il avant de stopper net sa réponse. Va prendre une douche, il nous reste de la route faire demain, m’ordonne-t-il, coupant court à notre conversation.

Quoi ? Non ! Je suis quoi ? Je ne comprends plus rien ! Si je ne suis pas une chasseuse, je suis quoi ? Rien n’a de sens dans ce qu’il me dit, surtout s’il ne me dit rien de bien concluant. Il évite plutôt d’être clair. Et je m’attendais à quoi ? C’est un monstre qui adore le sang, alors ça me sert à quoi de chercher à le comprendre ?

Je file dans la salle de bain tant que je le peux, le tout sous le regard triste de mon loup. Et ça me préoccupe pourquoi ? Comme si lui pouvait s’intéresser à une pauvre chasseuse perdue. N’importe quoi ! Je dois me reprendre en main, et tout de suite. Il faut que je pense comme une chasseuse, c’est ce que je suis.

Quoique… Le suis-je vraiment ? Louis a l’air d’affirmer le contraire, et ses paroles me font croire qu’il est sûr de lui. Mais comment pourrait-il connaître mes origines ? Où même savoir de quelle nature, je suis ? Ne suis-je pas qu’une humaine ? Après tout, la chasse est mon but mais ma barrière naturelle face aux dons monstrueux ne serait-elle pas un signe ?

Mon temps de douche n’est pas du tout reposant au final. Toujours la tête pleine de rouages, je me sèche et me rhabille. Une fois prête, je retourne dans l’autre pièce où je surprends Louis en pleine conversation téléphonique. Cependant, je n’ai pas le temps de capter un mot qu’il a déjà raccroché. Qu’est-ce qu’il peut encore cacher ?

Je le fixe mais il détourne le regard en soufflant. Il est fuyant, cherchant à éviter que je ne pose plus de questions. Sauf qu’il ne fait qu’attiser ma curiosité en agissant ainsi. Qu’est-ce qu’il se passe à la fin ? Je n’en sais rien, et ça me rends dingue. Cependant, je décide de ne pas l’interroger, sachant très bien que ça ne servira à rien.

Et c’est dans un silence de mort que nous nous couchons. Mais je n’arrive pas à m’endormir toute de suite, trop submergée par la tonne d’images qui vont et viennent dans ma tête. Toute cette soirée est loin de s’être passée comme prévu. Au bout d’un moment, je me tourne vers le lit de Louis pour l’observer.

Une mèche de cheveux lui tombe sur les yeux. Il ne m’en faut pas plus, pour me lever et m’approcher de son corps endormi. Mes doigts frôlent sa joue pour remettre en place ses cheveux bruns, et je me penche instinctivement vers lui. Quand je prends conscience que je suis sur le point de dépasser les limites, je me précipite dans mon lit. Telle une gamine qui a fait une bêtise, je me cache sous ma couette.

— Qu’est-ce qu’il m’arrive ? craché-je entre mes dents. Me voilà à la limite d’embrasser un monstre ! soufflé-je en rogne contre mon moi intérieur.

— Je t’entends, me surprend Louis en prenant la parole.

— Tu ne dors pas ? demandé-je plus pour moi que pour lui me rendant bien compte de l’évidence.

— Bien sûr que non ! s’énerve-t-il en s’asseyant. J’ai le devoir de veiller sur toi, c’est un ordre, m’annonce-t-il solennel.

— Quoi ? Un ordre ? Mais de qui ? débité-je surprise par sa petite révélation inattendue.

— Je ne peux pas… Kiera, souffle-t-il une nouvelle fois. Mais pour info, tes soi-disant amis les chasseurs sont sûrement bien plus monstrueux et dangereux que moi. Surtout quand on sait qu’ils ont enlevé une fillette à sa famille dans le seul but de créer une chasseuse sans cœur, prête à tout pour éliminer les bêtes qu’elle croise, annonce-t-il furieux. Malheureusement pour eux, la jeune fille n’est pas à la hauteur de leurs attentes, conclut-il.

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