Chapitre 37

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Alec se leva un peu timidement de son banc pour entrer dans le cabinet. Il prit soin de fermer la porte derrière lui. Tous les murs étaient blancs, il y avait un table d’examen sur le côté, et un meuble avec des tas de tiroirs, sûrement là où elle rangeait ses médicaments.

Il s’assit en face de l'infirmière, pendant qu’elle était en train de regarder son ordinateur. Il n’y avait pas un bruit, juste le bruit des petits clics qu’elle faisait avec sa souris. Alec n’osait pas bouger, il attendait qu’elle finisse en baissant les yeux, les mains posées sur ses cuisses.

— Bien ! fit-elle en relevant le nez. Qu’est-ce que tu as ?

Alec se racla la gorge.

— Vous vous souvenez de la dernière fois où j’suis venu…? bredouilla-t-il.

— Oui, bien sûr !

— Bah… je voulais vous dire que… j’ai trouvé quelqu’un.

Et elle afficha tout de suite un immense sourire, Alec se sentit un peu apaisé.

— C’est une super nouvelle ! Tu veux m’en parler ?

— Il me fait beaucoup de bien. Il est un peu spécial mais je me sens bien avec lui. J’ai l’impression que je suis important pour lui !

Alec sentit ses joues chauffer, il baissa la tête avec un petit sourire gêné.

— Par contre, continua-t-il, on s’est vu qu’une seule fois. Et on est pas encore ensemble, enfin je crois. On a pas encore parlé de ça ensemble...

— C’est pas grave, tu auras tout le temps d’apprendre à le connaître et il te faudra du temps pour l’apprivoiser. Tu lui as parlé de…?

Elle mit sa phrase en suspens, comme si elle avait peur d'évoquer quelque chose de blessant, un mauvais souvenir...

— Non, coupa Alec assez froidement. J’ai juste dit que mes parents étaient homophobes. Rien d’autre.

— C’est bien, il ne faut pas que tu lui fasses confiance trop vite. Mais quand tu le sentiras, tu pourras te confier à lui. Ça t’aidera beaucoup.

— Merci… soupira-t-il. Vous faites partie des premières personnes qui sont au courant.

Et il crut voir une petite lueur passer dans ses yeux bleus, un tout petit éclat, comme une étoile filante au milieu la nuit. Elle avait l’air très touchée, sa bouche s’était entrouverte mais ses lèvres tremblaient.

— Ça me fait très plaisir, Alec ! Je suis désolée, ça me rappelle mon fils…

— Votre fils aussi est gay ?

Elle se mit à rire doucement.

— Non, je ne pensais pas à ce genre de ressemblance. Il est un peu plus grand que toi, et il a eu du mal à trouver sa voie, lui aussi. Et il n’a pas eu la chance d’avoir des gens bienveillants sur son chemin… Enfin, je parle trop, ce n’est pas très professionnel de ma part, désolée.

Elle parut assez triste, mais elle luttait pour ne rien laisser paraître. Son corps s’était crispé, les veines de son poignet ressortaient, bien bleues.

— Tu avais d’autres choses à me dire ? fit-elle en essayant de lui sourire.

— Non… j’crois que j’ai terminé. Je viendrais vous dire comment ça a évolué !

Et il se leva et s’apprêta à partir…

— Attends ! lança-t-elle brusquement.

Alec se retourna, un peu inquiet.

L’infirmière se leva et marcha jusqu’à son meuble, elle mit son doigt sur sa lèvre inférieur en commençant à réfléchir, puis elle s’accroupit pour ouvrir un des tiroirs, et en sortit une boîte bleue… Elle se releva et la lui donna.

— Tiens ! fit-elle avec un grand sourire.

Il baissa les yeux et regarda la boîte qu’elle était en train de lui tendre. C’était des capotes.

— Vous êtes sérieuse, là…? demanda-t-il avec des gros yeux.

Il commençait sérieusement à avoir chaud et à se sentir mal à l’aise. Elle croyait quand même pas que les choses iraient aussi vite avec Ruben ?

— On sait jamais ! fit-elle. T’en auras besoin un jour ou l’autre, et c’est très important de te protéger. Surtout qu’avec un rapport anal, le risque de transmission de…

— Oui oui je sais, j’ai compris !

Le garçon lui arracha presque la boîte des mains pour la cacher dans sa poche.

Puis il bredouilla un « merci » timide et sortit de l’infirmerie. En traversant la cour, il sortit son téléphone et écrivit un message pour Ruben :

« Salut, ça te dérange si mon meilleur pote vient ce soir ? »

Il l’envoya. Puis il attendit la réponse en tapotant du pied et en regardant au plafond. Et après quelques secondes, il reçut une réponse.

Décidément, son Ruben était toujours disponible !

« Il va rester pendant tout le trajet ??? »

« Non juste deux minutes le temps de vous présenter :) Il prend un chemin différent »

« Ok »

Alec éteignit son téléphone, un petit poids en moins sur le coeur.

Puis il prit l’ascenseur pour se rendre à l’étage des Premières. Matt trainait dans un des couloirs, et il se mit à sourire comme un con dès qu’il aperçut son meilleur pote. Il se jeta presque sur lui.

— Alors, tu me racontes ? lança-t-il.

Alec fronça les sourcils et fit semblant de ne pas comprendre.

— De quoi ?

Et il se prit un nouveau coup dans l’épaule.

— Arrête de jouer au con avec moi ! T’as dit que tu me raconterais !

— J’ai rien promis du tout, j’ai dit que je verrais, c’est pas pareil !

Matt souffla longuement du nez en faisant le plus de bruit possible pour bien lui faire comprendre qu’il était agacé.

— De toute façon, je le saurai un jour. Tu peux pas te cacher longtemps avec moi, j’te connais trop bien.

Matt n’avait pas tort. De toute façon, il n’aurait même pas à l’espionner puisqu’il avait prévu par lui dire. C’était la seule personne à qui il pouvait tout confier, il savait que Matt ne le jugeait pas, et il avait souvent tendance à tout dédramatiser, et ça rassurait Alec.

— Sûrement… D’ailleurs à propos de ça, j’ai une question ?

— Vas-y ?

— Ça fait combien de temps que tu sais que j’suis gay ?

— Bah, depuis que tu me l’as dit, pourquoi ?

— Mais tu t’en doutais pas, avant ?

Matthieu sembla hésiter un instant.

— Pour être franc, nan. Mais ça m’a pas surpris. T’agissais un peu bizarrement des fois, par exemple : la sortie à Saint Malo, quand t’as commencé à te toucher sous la tente à côté de moi.

Alec détourna le regard, ses joues devinrent cramoisies.

— Arrête avec ça ! Et parle moins fort, imagine si quelqu’un nous entend !

— Bitch, t’es parano. Calme-toi un peu, j’te sens sur les nerfs depuis c’matin. C’est parce que tu vas revoir Ruben, ce soir ?

— Ouais…

Matthieu posa sa main sur l’épaule de son pote et approcha doucement son visage du sien (sans ambiguïté, bien sûr).

— Ça va aller, tu m’as dit que ça s’était bien passé la première fois. Pourquoi ça serait différent ?

— Bah… Tu seras là, même si c’est juste pour un moment. Et puis il aime pas trop les bourges, alors quand il va voir tous ces gens en polo de marque ou en chemise, j’ai peur qu’il s’énerve.

— T’inquiète pas bitch, ça va bien se passer !

Alec soupira un grand coup.

— Ouais j’espère. Mais j’ai un mauvais pressentiment…

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