Chapitre 9

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Soudain, Alec sentit qu’il fut poussé légèrement en arrière : l’avion était en mouvement. Il colla sa tête contre le hublot, et vit le paysage se déplacer lentement. Le moteur faisait un grand bruit, il était presque difficile de s’entendre parler.

— Bouge ta tête ! lança Marion. Moi aussi je veux regarder !

Alec se décala légèrement, sans quitter le paysage des yeux, comme s’il avait peur de rater la moindre miette de ce spectacle.

Il entendit le moteur monter en intensité, faire encore plus de bruit, et l’avion s’engagea sur une piste de décollage, il commença à accélérer, tout comme les battements du coeur d’Alec.

Et par réflexe, sa main s’agrippa sur le siège de devant, comme si cela allait le protéger d’un éventuel crash. Sauf qu’il s’agissait du siège de Jordan… Celui-ci se retourna brusquement et observa Alec pendant quelques secondes, en se plaçant dans le petit espace qui séparait son siège de celui d'à côté. Alec devait assez mal cacher sa peur, puisqu’un sourire vicieux de dessina sur les lèvres de Jordan. Il entrouvrit les lèvres :

— Bah alors ? On a…

— Jordan ! Je t’ai dit quoi ? interrompit la prof de chinois en surgissant au meilleur moment. Tu te retournes immédiatement !

Jordan obéit en lui jetant un regard rempli de haine. La prof ne savait pas à qui elle avait affaire. Jordan n’était vraiment pas le mec sur qui il fallait s’acharner…

Pendant ce temps-là, l’avion continuait d’accélérer et le coeur d’Alec était sur le point de s’emballer. Un petit « bip » le fit sursauter, et une lumière s’alluma, indiquant qu’il fallait boucler sa ceinture, ce qu’il fit immédiatement. L’avion semblait avoir le maximum de sa vitesse, lorsque soudain, d’un petit coup, il décolla légèrement du sol, le paysage à travers le hublot devint oblique, Alec fut un peu poussé vers l’arrière, il ferma les yeux et commença à prier de toutes ses forces pour que le décollage se passe bien, avant de se rendre compte que ça ne servait à rien puisqu'il ne croyait pas en Dieu.

Et là, il commença à douter : est-ce qu’il avait bien pensé à mettre le mode avion ? Il n’arrivait pas à s’en souvenir, alors que c’était arrivé il y a quelques minutes à peine, et ça le rendait fou. Peut-être que les ondes de son portable allaient créer un bug dans les commandes de l’avion, et qu’ils allaient tous mourir par sa faute…

Mais l’avion continuait de monter, et personne ne semblait être en train de paniquer. Alec rouvrit les yeux et osa à nouveau regarder à travers le hublot : les maisons étaient devenues aussi petites que des boîtes d’allumettes, il pouvait voir de grands carrés verts et jaunes qui devaient sûrement être des champs, l’aéroport avait disparu, il devait probablement être derrière.

Alec se calma progressivement, ils arrivèrent bientôt au niveau des nuages, en continuant de gagner de l’altitude.

Il lâcha le siège de Jordan, en y laissant la trace de sa main, il avait sans doute appuyé trop fort dessus.

Quand la petite lumière avec le symbole de la ceinture s’éteignit, et que tout le monde commença à se lever et à bouger, Alec se décida enfin à sortir son portable, et il vit à son plus grand bonheur qu’il avait bien activé le mode avion.

Il retourna sur la conversation pour voir si Ruben lui avait envoyé un message entre temps… Sauf qu’il découvrit que son dernier message n’avait même pas été envoyé…

« Je vais devoir te laisser, on va bientôt décoller :( » (non distribué)

Il avait sans doute activé le mode avion trop tôt, et n’avait pas attendu que son message soit envoyé… Ruben devait sûrement en train de se demander pourquoi il n’avait pas de réponse. Alec s’en mordit les doigts, bien évidemment, il n’y avait pas de réseau, là-haut dans le ciel. Il allait donc devoir attendre les 12 heures du trajet…

Ayant eu une nuit assez courte, il se décida à rattraper quelques heures de sommeil. Il occulta son hublot et s’installa au fond de son siège, en posant son manteau sur lui en guise de couverture. Assez fatigué à cause de sa matinée compliquée et du manque de sommeil, il ne tarda pas à s’endormir…

***

— Alec, on se réveille !

Il ouvrit les yeux difficilement. Les lumières de l’avion s’étaient rallumées, tout le monde commençait à s’agiter autour de lui.

— Il se passe quoi ? grommela-t-il en s’étirant.

— T’as hiberné, mon vieux. On atterrit dans 5 minutes ! lui répondit Marion, tout excitée. Prépare tes affaires, on a pas de temps à perdre !

— Oh purée !

Il se redressa aussitôt et commença à balancer en vrac ses affaires dans son sac. Il sentait que l'avion était lentement en train de descendre, le sol devint à nouveau visible, les maisons et les immeubles avaient encore l'air de boîtes d'alumettes.

Tout l'avion était en train de s'agiter, des gens étaient debout en train de ranger leurs affaires, d'autres parlaient tranquillement entre eux. Alec, lui, gardait sa tête collée au hublot pour ne pas rater une miette de ce spectacle.

Les maisons semblaient désormais beaucoup plus grandes, l'aéroport était bien visible et l'avion s'apprêtait à atterrir. Plus ils approchaient du sol, plus le corps d'Alec était tendu.

Là, c'était le moment, il était à quelques secondes de se poser, et le stress d'Alec était au plus haut point. Une légère secousse fit trembler tout l'appareil...

***

— Tout le monde est là ?

Chacun se retourna pour voir si personne ne manquait. Le groupe était au complet, même Jordan était là, sûrement trop fatigué pour faire une nouvelle connerie.

Ils se trouvaient juste devant les tapis roulants qui rendaient les bagages, chacun avait récupéré sa valise. Il était six heures du matin, à Shanghai, et environ minuit à Paris. Alex avait bien dormi, il était le seul du groupe à être frais. Les autres avaient tous des têtes de zombies et étaient en train de s’appuyer sur leur valise, incapables de tenir debout.

— On va aller directement à l’hôtel déposer les bagages, continua la prof. Suivez-moi !

Et elle commença à marcher, beaucoup trop vite pour que le groupe suive. Jordan était en train de filmer l’aéroport avec son portable, sûrement pour envoyer la vidéo à tous, afin de leur montrer qu’il avait une vie.

Alec restait au fond avec Marion, qui était en train de finir sa nuit, les yeux encore à moitié fermés, le dos courbé.

— T’as besoin d’un déambulateur ? lança Alec avec un grand sourire.

— Ta gueule.

Marion n’était pas du matin, elle était le genre de personnes qui avaient besoin de 2 heures et 5 tasses de café avant d’être complètement réveillées. Alec aimait bien la taquiner quand elle était de mauvaise humeur.

— Y a du wifi dans l’aéroport ! s’exclama Jordan, comme s’il avait trouvé un trésor caché.

Alec releva la tête. Habituellement, ce genre de remarques n’attiraient pas son attention, mais là, il pensa immédiatement à Ruben…

Alors il sortit tout de suite son portable, suivi de tout le reste du groupe. Marion restait à l’écart, en train d’essayer de garder les yeux ouverts.

Après avoir complété un petit formulaire, le magnifique logo du wifi apparut en haut de son écran. Il se jeta alors sur son appli bizarre pour envoyer un message à Ruben.

« Salut ! Désolé j’étais dans l’avion j’ai pas pu te répondre :( »

La connexion n’était pas géniale et le message mettait du temps à s’envoyer. Il savait qu’ils n’allaient pas rester éternellement dans cet aéroport, il espérait au moins réussir à faire partir ce message, histoire de le prévenir.

— Il y a un bus qui doit nous amener à l’hôtel, fit la prof. Il arrivera dans dix minutes. Qui veut faire un passage rapide aux toilettes ?

Elle avait bien insisté sur le « rapide ». Au moins, ça laissait dix minutes à ce foutu message pour arriver jusqu’en France. Tout le monde se jeta en direction des toilettes, y compris la prof de chinois. Alec et Jordan les suivirent jusque devant les toilettes, mais ils n’y entrèrent pas et restèrent scotchés à leur portable.

Ils était seuls tous les deux, certainement pour les deux prochaines minutes, le temps que les premiers garçons finissent. Alec n’avait aucune envie d’engager une conversation, encore moins avec ce gars-là. Il tenta de rester focalisé sur son téléphone.

Et enfin, miracle, une petite flèche verte s’afficha, indiquant à Alec que le message était bien parti ! Ça lui avait pris environ 3 minutes, il ne savait pas s’il aurait la patience d’attendre aussi longtemps à chaque message pour les dix prochains jours. Au moins, ça lui ferait une excuse valable pour ne pas donner de ses nouvelles à ses parents.

Une petite vibration lui signala qu’il avait reçu un message. Cette fois, la réponse avait été instantanée. Peut-être qu’il avait trouvé une zone où ça captait mieux.

« Ouais j’avais compris »

Même si ça ne semblait être qu’un message anodin, Alec avait l’impression que Ruben était froid. Peut-être que son esprit lui jouait des tours et qu’il s’inquiétait pour rien, mais il n’arrivait pas à se débarrasser de cette mauvaise impression.

Il essaya d’en faire abstraction, il devait sûrement penser n’importe quoi.

« Il est quelle heure en Chine ? » envoya Ruben.

« 6h, et en France ? :) »

« Minuit »

« Tu vas te coucher à quelle heure ? »

« Maintenant »

Alors ça, si ce n’était pas froid… Il devait peut-être lui en vouloir de ne pas l’avoir prévenu.

« Ah d’accord bonne nuit » se contenta-t-il de répondre.

Il était un peu dégoûté. Il avait attendu tout ce temps pour pouvoir parler avec Ruben, et lui ne faisait aucun effort. Il avait clairement l’impression de le faire chier.

Il rangea son portable. Ruben n’était clairement pas le bon, et leur relation allait sûrement s’arrêter à cette conversation. Il n’avait plus aucune envie de lui parler, ce n’était même pas agréable.

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