17 - Cathédrale obsidienne

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39e jour de la saison de la mort 2448

La journée précédente, Quèvharx avait déclaré qu'il pouvait aider Serfantor à s'échapper jusqu'à la cathédrale obsidienne, endroit sacré des elfes gris où ces derniers passaient en coup de vent pour prier et honorer les divinités, particulièrement le Père des Ombres Noktow. Elle se trouvait en plein cœur de la cité et était protégé par une dizaine d'Heaume Noires. Ça semblait une quête désespérée que de se faufiler là, mais le serviteur au regard doré lui avait promis qu'il trouverait un moyen, qu'il suffisait de patienter. Honnêtement, le prince ne comprenait pas pourquoi ce jeune homme désirait mettre sa vie en péril pour lui. D'accord, il avait été gentils avec et lui avait probablement permit d'avoir un contact social raisonnable depuis son arrivé au château, mais valait-il ce genre de risque ? Peut-être bien que oui... Après tout, il comprenait trop bien le sentiment de désespoir qu'apportait l'isolation et l'abus.

Et pour lui, il n'y avait plus rien qui importait sauf de retourner à Arièlla et la possibilité de redonner la vie à Shalith si c'était même possible. Quoi qu'il en fût, il allait demander cette faveur au Dieu de la Mort. Il ne lui faisait aucunement confiance, mais c'était là sa meilleure chance puisque Noktow avait un faible pour les elfes gris. Elysia, Mère de la Lumière, n'allait certainement pas lui montrer de clémence.

C'était bien trop paisible malgré son statut de captif. Pourquoi la reine l'avait-il gardé en vie ? Que planifiait-elle ? Était-ce tout simplement une punition pour son incompétence ?

Il attendit pour la prochaine visite de Quèvharx en observant la cité depuis sa petite fenêtre. Ce soir-là, il n'y avait qu'une étoile qui brillait dans le ciel. Étrangement, il se sentait en paix lorsqu'il la fixait. Il eut l'envie de caresser l'écaille de Shalith ce qu'il fit tout en ne lâchant jamais le point lumineux des yeux.

Un moment passa et un hurlement déchirant vint interrompre le silence de la nuit. Là au sol, un elfe gris se faisait trainer comme un vulgaire animal sur le terrain d'entraînement des Heaumes Noires. De nulle part, trois gardes en armure de plaques ébène surgirent et entourèrent la victime. Il se mirent à se défouler sur ce-dernier en lui donnant des coups de pieds au dos et au ventre.

Énervé et inquiet que cela puisse être son nouvel ami, l'ex-dragonnier eut le réflexe de jeter un dernier coup d'œil en direction de cette unique étoile à la fois sombre et lumineuse et soudainement, il se sentit puissant. De quelques mouvements fluides des bras et des mains, il réussit à manipuler l'ombre autour de lui. Sans trop y penser, il forma un épais nuage et le dirigea vers la victime. Cela eut l'effet désiré : les Heaumes Noires reculèrent, choquées et confuses.

Quelques instants plus tard, le prince n'y voyait plus rien, plus les gardes ni leur cible. Il retenu le nuage d'ombre aussi longtemps qu'il put se le permettre.

- Enfuis-toi, grogna-t-il, les dents serrées. Utilise l'ombre comme bouclier.

Lorsqu'il lâcha prise, il n'y avait que trois Heaumes Noires qui étaient restées derrière. Celles-ci se mirent à la recherche du fugitif tandis que la quatrième se dirigeait vers le château, sûrement pour lui faire la peau. Paniqué, il s'élança vers la porte qui était bien sûr fermé à clés. Il n'y avait rien à faire. La fenêtre était bien trop étroite pour qu'il s'y glisse.

- Merde ! jura-t-il.

Alors qu'il tentait désespérément de forcer la pognée à tourner, la porte s'ouvrit de l'extérieur.

- Qu'est-ce que tu as fait ? questionna Quèvharx. C'était toi ce nuage d'ombre, pas vrai ?

- Oui, répondit le prince. Il faut que tu me sortes d'ici. Maintenant, insista-t-il.

Quèvharx acquiesça, lâcha le cabaret qu'il portait, attrapa son ami par la main et couru le long d'un corridor. Alors qu'il le guida, il s'arrêta à chaque intersection pour s'assurer qu'ils ne soient pas aperçus. Il semblait clairement savoir où il allait et Serfantor en était ravis. Il connaissait bien le château, mais il n'avait aucune information à propos de la routine des gardes et des serviteurs qui changeait fréquemment. Il ne pouvait que faire confiance en Quèvharx à ce point.

Et éventuellement, ils surent s'échapper de la demeure de la vicieuse reine en passant par les égouts et par un passage secret dissimulé par un mur de pierre que l'on pouvait pousser. Clairement, le garçon au regard or avait fait son exploration durant son temps libre.

- C'est un peu plus tôt et brusque que je ne l'avais anticipé, mais je crois que ça ira, expliqua ce-dernier. Mais par Noktow, qu'est-ce qui t'as pris ?

Serfantor ne savait pas quoi lui répondre.

- De toute façon, merci d'avoir sauvé Mytian, continua le serviteur. Il est comme moi, mais il est maladroit et il a enragé la reine...

- C'était donc ça, soupira le prince en grimaçant.

- Tu peux toujours contrôler l'ombre après la mort de ton dragon ?

- Non... Pas normalement...

- Alors pourquoi... ?

- Je n'en sais rien, avoua-t-il.

Ils traversèrent un long tunnel humide dont le sol était submergé par de l'eau stagnante et nauséabonde. Nu pieds n'était pas la situation la plus confortable pour eux. L'air était pesant et avec le stress, les deux soumis de la reine ne se pouvaient pas s'empêcher de suer.

Il n'y avait pas le moindre signe de vie depuis un long moment ce qui rendait Serfantor anxieux.

- C'est trop facile, mentionna-t-il. Quelque chose ne tourne pas rond.

- Nous sommes tout simplement fortuné mon prince. Ils doivent être préoccupés par Mytian. Son sacrifice ne sera pas oublié, termina Quèvharx sur un ton assombrit par ce qui semblait être une touche de culpabilité.

- Pourquoi ne vas-tu pas l'aider ? Pourquoi moi et non lui ? questionna Serfantor alors qu'un sentiment de méfiance naquit en lui.

- C'était déjà trop tard pour Mytian... J'avais un choix et pas de temps. Alors, j'ai jugé que tu avais plus de chance de t'en sortir que lui.

Ils aboutirent à la fin du tunnel où il faisait toujours aussi sombre. Le serviteur fit signe à son ami de s'abstenir de parler puis, il empoigna l'une des bars de fer forgé de la porte et poussa délicatement. Malgré sa douceur, la porte grinça dans son mouvement.

Les deux adolescents attendirent un moment. Il n'y avait que du silence qui les accompagnait dans leur terreur. Enfin, Quèvharx jeta un coup d'œil à l'extérieur du tunnel et confirma qu'il n'y avait bel et bien personne en vue.

Ils traversèrent la cité submerger par un nuage épais de brume ce qui était à leur avantage. Ils rencontrèrent des individus étranges, suspicieux, la plupart encapuchonnés et une bonne partie de leur visage dissimulé. Non pas qu'elle ne l'était pas en tout temps, mais Norkux était particulièrement sinistre durant la saison de la mort.

- Je n'aime pas ça, se lamenta le prince en suivant Quèvharx de près.

- Nous n'avons pas le choix d'utiliser les chemins les moins fréquentés, soupira l'elfe au regard d'or. C'est le plus sûr.

- Je n'en suis pas certain...

Ils visitaient des ruelles étroites qui regorgeaient de mendiants et de membres de cultes dangereux. Ils y rencontraient des cadavres de temps en temps, certains en pleine décomposition. Alors qu'ils traversèrent une rue, une fillette d'environs huit ans chargea devant eux, leur coupant la route.

- 'ttention petite, aboya Quèvharx qui fut pris par surprise.

Cette-dernière s'arrêta un instant pour les observer. Lorsqu'elle se tourna, on pouvait enfin partiellement voir son visage caché sous son large capuchon. Il lui manquait un œil et son expression était aussi endurcie que celui des Heaumes Noires. Faisait-elle parti d'un de ces cultes qui demandait des sacrifices physiques de la part de ses membres, à un si jeune âge ? Le prince en eut des frissons à l'épine.

- Vous faites attention, avertit-elle de sa petite voix de souris. Après tout, c'est l'heure... C'est le temps du Crâne ! C'est le temps des ténèbres !

Elle se mit à ricaner comme une démone et continua son chemin en gambadant.

- C'est vrai ! s'exclama Quèvharx en souriant. Le Festival du Crâne ! C'est le meilleur temps pour convoquer Noktow ! Allez, viens ! Tu ne sortiras jamais d'ici sans aide divine et peut-être qu'une prière sera répondue.

C'était trop facile au goût de Serfantor, mais l'anticipation de revoir Shalith l'excitait au point que sa prudence se retirait. Il n'avait pas le choix : il devait prendre ce risque ou renoncer à sa liberté.

Enfin, ils virèrent un dernier recoin et devant eux, une intimidante cathédrale gothique se tenait haute et fière. Les pointes acérées des tours et des décorations perçaient au travers de la brume, lui donnant une allure de mauvais augure. Vraiment, on aurait dit une prison démoniaque plutôt qu'un endroit de dévotion.

Malgré son malaise grandissant, Serfantor s'avança avec courage en repoussant les mauvais souvenirs qu'il portait de cet endroit. Dans le passé, il avait souvent accompagné sa mère ici et cela, non par choix. Lorsqu'il posait une question ou qu'il faisait mention de n'importe quoi de façon négative ou même neutre, il se faisait sauvagement réprimander. C'était si fréquent que parfois, il s'était demandé si la reine cherchait une excuse pour le blesser.

Il soupira et poussa les deux grandes portes lourdes. Aussitôt il traversa le seuil, son cœur se mit à battre voracement comme s'il voulait sauter hors de son corps. Il se rendit au centre du bâtiment, là où la gigantesque statue de Noktow résidait. Étrangement, l'endroit semblait désert ce qui était anormal, particulièrement pour ce temps de l'année.

- Je n'aime pas ça, répéta-t-il.

- C'est le seul moyen, couina Quèvharx en entrecroisant ses doigts. Pour tout t'avouer, je n'aime pas cet endroit non plus. Il me donne la chair de poule. J'espère pour toi que le Père t'accorda ton souhait.

Les murs, la voûte, les poutres, le plancher, tout était à base d'obsidienne. Tout était noir reluisant d'argent ou de cramoisis. Il y avait des vitraux un peu partout sur lesquels étaient représentés des scènes violentes de l'historique elfe gris et par rapport au panthéon, plus particulièrement à son côté obscur. La décoration était tout aussi morose, suivant le style du château de la reine, mais en encore plus dramatique. Au moins, la reine avait un côté perverti et aimait bien s'entourer d'objets qui lui rappelaient la luxure. Serfantor avait toujours été au-delà d'inconfortable dans cet entourage, mais il s'était habitué. Il avait toujours été entouré d'une ambiance qui lui évoquait un mélange troublant de maison de plaisance et de salle de torture. Cette cathédrale était loin d'être accueillante, mais elle l'était plus que le château.

Serfantor...

Une brise s'entremêla à la chevelure pâle du prince qui se mit à virevolter frénétiquement. Puis, l'instant d'après, tout s'estompa. C'était impossible. Il n'y avait pas de fenêtre ouverte. Sur le coup, il avait envie d'en parler à Quèvharx, mais une partie de lui préféra s'en abstenir.

Appelle-moi... Convoque-moi... Serfantor...

Encore des murmures qui semblaient provenir de nulle part et de partout. Le prince les ignora et s'approcha de la statue qui devait faire au moins six fois sa taille.

Non ! Bats en retraite ! Il est là !

Cette-fois, les chuchotements étaient un peu plus féminins. Était-ce possible que cet endroit était hanté ? Peut-être que les divinités étaient réellement présentes. Quoi qu'il en fût, Serfantor n'avait pas d'autres choix. Sous le regard du Père inanimé, il serra les poings, puisa dans la maigre réserve de courage qui lui restait et s'agenouilla sur la plateforme d'améthyste qui reposait directement devant la statue.

Rumine, rumine avant de plonger dans ton destin...

Il prit une grande respiration. Il lui fallait ignorer ces voix s'il désirait se concentrer sur Noktow.

Les mots peuvent être tordus... Si, si ! Précision avant tout !

Il s'installa plus confortablement, un genou à terre. Il effleura l'écaille de Shalith qui était toujours au creux de sa poche puis, il leva les yeux et croisa le regard de la statue du dieu des ombres.

- Père des Ombres, Maître des Cieux, Porteur de la Mort, Amant de la Lumière, moi, humble enfant...

Azéna ! Elle porte des montagnes sur ses épaules ! Plusieurs démons sont à ses trousses ! Certains du passé, certains du présent et d'autre... du future...

L'elfe gris s'interrompit; brièvement distrait par cette déclaration. Il secoua la tête et recommença, cette-fois avec plus de clarté et d'énergie :

- Père des Ombres, Maître des Cieux, Porteur de la Mort, Amant de la Lumière, moi, humble enfant des ténèbres éternels, t'appel pour une faveur !

Il ne s'attendait honnêtement pas à une réaction si rapide, mais la fraction d'un moment plus tard, la statue de Noktow trembla. Un halo ébène contourna la pierre et suivit les courbes de l'idole sinistre.

Serfantor était trop intelligent pour penser qu'une statue pourrait être vivante et malgré que cette-dernière n'avait pas bouger, il ressentait une présence en elle. Il se sentait observé, analyser minutieusement comme une proie à la merci d'un prédateur. Ses pupilles se dilatèrent, sa respiration accéléra subtilement et une perle de sueur se forma sur sa tempe droite. Il craignait Noktow de tout son être, mais il ne pouvait pas prendre la fuite. Pas maintenant. De plus, il risquait d'insulter le dieu. On ne convoquait pas une divinité pour lui faire perdre son temps.

- Je vois dans ton cœur, jeune elfe gris, tonna une voix caverneuse qui provenait de la statue.

Si Quèvharx aurait eu une queue, elle aurait été entre ses jambes. Il était reculé dans un coin et ses yeux étaient écarquillées et luisaient d'effroi.

- Vous êtes ici, murmura Serfantor, prit au dépourvu.

- J'écoute toujours mes enfants, susurra Noktow dans un ronronnement sinistre. Tu as vécu hardiment, mon garçon. Dis-moi, pourquoi as-tu besoin de mon assistance maintenant ? Je suis présent pour toi, bien sûr et de mon propre gré.

Ses paroles étaient étrangement séduisantes et réconfortantes au travers de toute cette évidente sournoiserie. Il fut patient, attendant calmement pour la réplique de son invocateur.

- Rendez la vie à Shalith, dit le prince en présentant l'écaille noire à la statue du bout de ses bras. J'ai besoin d'elle. J'ai besoin de sa présence pour continuer. Je refuse de rester enfermer dans cette chambre ! Elle fait partie de mon être ! Je vous en supplie, Maître de la Mort, elle ne méritait pas de tomber, pas ainsi.

- Humph, lança Noktow en reniflant un peu comme un animal. Cette faveur a un prix, mon garçon.

- Nommez-le, répliqua le prince sans hésitation.

- Ta dévotion. Ta simple dévotion, mais je ne tolérais aucune trahison.

- Pas à la reine ? questionna l'elfe avec suspicion.

- Rien qu'à moi, confirma la divinité dans un petit rire qui réverbéra au travers de la salle.

- Marché conclut. Maintenant, ramenez-moi Shalith !

- Comme tu le souhaites, dragonnier !

Le halo de la statue amplifia en luminosité. Une vibration secoua la cathédrale entière. L'écaille de la dragonne déchue lévita des mains du prince et vint se poser dans celle de la statue.

Pendant un long moment, rien de plus ne se produisit.

L'anticipation sur le point de lui faire perdre la boule, Serfantor jeta un coup d'œil sur Quèvharx. Le serviteur était porté disparu. Avait-il si peur de Noktow ou était-ce une manigance ? Il n'eut pas le temps d'y songer. Le Père des Ombres était prêt et une fois que Shalith allait être de retour, rien ne pourrait l'empêcher de s'enfuir.

- Reviens au monde des mortels, Shalithrenaxa, dragonne noire ! tonna la divinité avec passion. Que ton corps qui a péri soit renouvelé, animé à nouveau !

De la simple écaille jaillirent des copies qui s'enlignèrent une à côté de l'autre. Lorsqu'une rangée fut créée, de la peau les suturèrent ensembles. Puis, des muscles s'attachèrent à la peau. Ensuite, ce fit un squelette. Le tout se produisit en l'espace de quelques minutes durant lesquelles Serfantor observa le miracle se produire avec des larmes de joie aux yeux. Il ne se rendit même pas compte que le corps reconstruit de la dragonne était si immense que la structure de la cathédrale en resta endommagée. Même la fameuse statue perdit un bras, fracassée brutalement par un coup d'aile. Noktow ne semblait pas s'en soucié; il continua le rituel jusqu'à son achèvement.

- Shalith, pleurnicha le prince qui s'approcha doucement de la dragonne réanimée.

Elle n'était pas comme avant, pas tout-à-fait. Elle avait gardé une apparence qui semblait légèrement décomposée à certains endroits. L'odeur qui émanait de son corps s'était empiré : un mélange dégoutant d'humidité et de putréfaction. Mais cela n'importait peu. L'important, c'était quelle était là avec un cœur battant.

C'est lorsqu'il fit à quelques centimètres d'elle que sa marche fut interrompue par une douleur aigue au cou.

- Arghhh !!

Il se recroquevilla et posa ses mains sur son cou et tout autour, il ressentit des brûlures se former. La chaleur était trop intense alors il dut retirer ses paumes.

- M-mais qu'est-ce que... ?

La douleur continua, elle se propagea jusqu'à ce qu'elle forme une espèce de collier, laissant des marques profondes qui allaient clairement cicatrisés. On aurait dit qu'il avait été marqué au fer comme un bœuf.

- Noktow ! Noktow ! Qu'est-ce qui se passe ?

Enfin, la douleur s'estompa et les plaies se refermèrent, laissant en effet, des scarifications.

- Tu m'appartiens, expliqua le dieu sur un ton des plus malicieux. C'était notre entende. Maintenant, chaque fois que tu me désobéis, je peux activer ton joli collier. Veux-tu une démonstration ?

- No...

Le prince n'eut pas le loisir de terminé sa protestation que le motif sur son cou s'illumina et lui causèrent un mal atroce. Il hurla au bout de ses poumons et enfin, il s'écroula au sol, souffrant de petites contractions à la suite. Les motifs cessèrent de brûler et sa couleur retourna à un gris irrégulier qui fondait maladroitement avec la teinte de sa peau intacte.

- Voilà ta dragonne. Enfin, son corps vivant.

- Qu'est-ce que tu veux dire ? grincha le prince en serrant les dents.

Il se leva avec misère, laissant une trace de bave sur le planché d'obsidienne. Son cou était toujours engourdi et il le caressa en tentant d'apaiser la peau endommagée.

- Shalith n'a pas réagis, réalisa-t-il.

Il observa la dragonne de plus près, particulièrement son visage et il se rendit compte qu'elle ne portait aucune expression, rien du tout.

- Tu as oublié mon cher dragonnier de me demander si je pouvais accomplir une résurrection totale par moi-même, se moqua Noktow. Bien sûr, je suis le dieu de la mort, pas de la vie. Je peux réanimer un corps, mais le pouvoir de le faire pour une âme réside entre les mains d'Elysia.

- QUOI ! s'offusqua le prince. MAIS ! VA LA CHERCHER !

- Ce ne sont pas des manières à parler à ton dieu et à ton supérieur.

Encore une fois, le prince fut victime de sa malédiction et se retrouva étendu au sol avec ce qui semblait être une flamme vivante qui lui léchait le cou.

- J'ai fait ma part du marché, dit Noktow. Maintenant, fais-la tienne et sois un bon sbire. Oh, tu seras mon meilleur sbire, un serviteur à qui je pourrai faire totalement confiance, n'est-ce pas ?

- O-oui, répliqua à contre-cœur l'elfe qui n'avait même pas prit la peine de se relever.

Il croisa le regard de Shalith dont les yeux étaient mâts et dépourvus de l'étincelle de la vie et son cœur se serra, lui causant un pincement cruel au torse. Sa lèvre trembla violemment et il se mit à pleurnicher malgré lui.

Il en avait eu assez de cette vie.

- Tue-moi dans ce cas ! grogna-t-il, les sentiments du moment prenant contrôle de sa bouche.

- Oh que non ! rétorqua la divinité. Il te faut retourner à ta maman à présent. C'est grâce à elle ainsi qu'à Quèvharx que tu as accepté mon marché ! Nous allons aller les remercier !

- Quèvharx... ?

- À quoi t'attendais-tu donc ? Il avait le collier de servitude de ta mère. Que tu peux être naïf parfois.

- J'avais tout simplement foie qu'il avait bon cœur malgré sa situation.

- La vie est plus complexe que cela malheureusement. Maintenant, vas.

- Et si je refuse de bouger ?

- Oh ! J'ai oublié de te le mentionner... Quelle maladresse de ma part... Je peux prendre contrôle de ton corps s'il le faut. Préfères-tu agir par toi-même au travers de mes ordres ou pas ?

Serfantor ne répondit pas, désespéré et sombrant dans les ténèbres de son esprit.

- Je t'arrêterais si tu essais de t'enlever la vie.

- Pourquoi ? se lamenta le prince, à demi colérique à demi attristé. Qu'est-ce que toi, une divinité majeure, peut bien en tirer dans tout ça ?

- Parce que je veux ma guerre ! se déchaîna Noktow en causant des tremblements au travers du bâtiment. Et toi, tu renais de tes cendres ! Voici ta deuxième chance, ta deuxième vie ! 

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