Narcis Parker (30)

4 minutes de lecture

Jeudi 24 mars, 16h40.

J'ai pas arrêté de penser à Twist de la journée. J'ai pu m'assoupir quelques minutes, ce matin. Juste le temps de pouvoir tenir debout ensuite.

Je lui ai laissé un long mot sur papier en partant. Je lui disais que je pensais fort à lui, qu'il fallait qu'il pense à moi quand il se sentirait mal, et qu'il pense à nous quand il aurait envie de faire des choses interdites par la justice. En gros. Je lui ai répété que je l'aimais, aussi. Je suis pas sûr qu'il m'ait entendu, hier soir. Il m'a jamais répondu.

  • Eh oh, y a quelqu'un là d'dans ? Narcis ! Tu m'écoutes plus ! beugle Lucie dans le téléphone.

Je regarde l'écran, ça fait déjà onze minutes trente-sept qu'on converse.

  • Si, si je t'écoute. Parle, je réponds avec un soupir en me calant mieux dans mon plaid de canapé.
  • Dis-moi ce qui va pas, allez. Je suis pas idiote, je vois bien qu'y a un truc qui te tracasse.
  • Toujours la même chose, je lui grogne. On est le vingt-quatre et je saurai pas ce qu'il s'est passé là-bas avant ce soir.
  • De toute façon tu peux pas y faire grand chose. Tu verras bien, c'est tout. Mais oublie pas qu'il a des instincts en lui…
  • Tais-toi ! je crie presque. Il m'a dit qu'il le ferait pas !
  • Tu peux pas t'attendre à ce qu'il t'écoute à chaque fois, c'est tout ce que je dis ! S'il a vraiment besoin de le faire il le fera c'est obligé !

Je respire plus fort, plus rapidement. Je veux pas qu'elle ait raison. Elle a pas raison. Il est juste en train de m'attendre, il va bientôt aller manger. Normalement.

  • Toute façon tu sauras ce soir. Les dés sont jetés. C'est toi qui as choisi d'être avec lui Narcis.

Je relève les yeux sur la tablette dans le salon, là où j'ai accroché son dessin, juste au dessus. J'ai juste rajouté un petit mot, en bas du cadre. Alea jacta est.

  • Allez arrête de te morfondre. Tu devrais dormir un peu ou tu vas être crevé.
  • Pas grave. Je peux résister pour une nuit, je marmonne.
  • Et si lui il a émotionnellement besoin de toi ?
  • Je serai là. J'arriverai à pas dormir de la nuit, la vraie, je te dis.
  • Ouais. C'est pas bien de manquer à ce point de sommeil, elle soupire.
  • J'arrive pas à dormir. Je peux rien faire d'autre.

Je me retourne sur le dos comme une crêpe.

  • Tu veux que je vienne pour demain ?
  • Tu pourrais ?
  • Ouais. Je pars le matin et j'arriverai vers quatre heures. Ça t'irait ?

Je hoche la tête, puis je me rends compte qu'elle me voit pas.

  • Ouais. Ouais, merci beaucoup.
  • Okay. Je vais préparer mes affaires. Je reste pour ta semaine de congé. Essaie de te reposer Narcis.

Je m'étire.

  • Je peux plus attendre ce soir, Lucie. Dis-moi que tout ira bien…
  • Je peux pas te dire ça. Mais tu le sauras très vite. (Je grogne dans le combiné. J'en peux plus). Allez, tu sauras bientôt ! Prends un bon bain !
  • Pas envie…
  • Fais quelque chose ! Tu me rends dingue ! elle crie avant de raccrocher.

Pourtant, c'est qu'une heure plus tard que je me décide à me glisser dans un bain chaud parfumé au chocolat. Je me détends enfin un peu, mais mes pensées restent tournées vers lui. J'imagine ce qu'il fait à chaque seconde de la journée.

Maintenant, à dix-huit heures quinze, j'espère seulement qu'il est seul ou en bonne compagnie. Que Beckett est aussi loin de lui que possible. Il manquerait plus que ça. Je me dis que je pourrais appeler Guillaume pour lui demander des nouvelles... Puis je décide de lui envoyer un message. À nos changements de poste, on a encore un peu parlé, hier et avant-hier. C'est toujours pas ça, mais au moins il me fusille plus du regard. Il s'est aussi plus ou moins excusé. Et de toute manière, si je lui envoie un message c'est seulement pour avoir des nouvelles ; je peux pas supporter ses commentaires et lui pardonner comme ça.

Je fais attention à pas faire tomber mon téléphone dans l'eau et lui demande si tout se passe bien, à la prison. Une heure plus tard j'ai aucune réponse et ça m'angoisse encore plus. Bientôt l'heure de manger et se préparer.

Je tourne en rond dans mon appart. Le dîner est toujours pas prêt, mais de toute façon j'ai l'estomac noué. Je sais même pas si je le reverrai vraiment. Est-ce qu'il est seulement encore en vie ? Est-ce que je le saurais s'il mourait ? Je le sentirais ? Sûrement pas.

Je soupire. Il faut que je mange. Je m'en sens même pas capable, j'ai l'impression que je vais vomir dès que la nourriture touchera mes lèvres. Pourquoi il a pas de téléphone ? Ni Internet ? Je peux même pas m'assurer qu'il va bien...

Mais c'est un prisonnier. C'est normal. On voudrait pas que Boï ou Beckett aient internet, alors lui non plus. Il est comme eux, au final.

Je finis par me préparer des pâtes jambon-crème que je mange devant les infos. Finalement c'est l'heure de se préparer; et rapidement de partir au travail.

Quand j'ai fermé les boutons de ma chemise, mes doigts tremblaient un peu. J'ai pris un cachet pour le stress, avant de prendre la voiture. Je pensais pas que j'allais être dans un état pareil.

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