2 Août 1040 (partie 3)

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            J'allais l'embrasser. C'était réellement l'idée que j'avais, suite à ce trouble ressenti. Mais j'ai aperçu un point rouge à l'orée du bois. Mon attention s'est focalisée dessus. Je voyais ce point rouge qui ne durait que quelques secondes et qui disparaissait soudain. Je distinguais une silhouette assez floue. Rien de bien précis. Je commençais à avoir peur : était-ce une hallucination ? Ma curiosité m'ayant piquée, j'en oubliais complètement Thomas.

  • Joséphine ?
  • Je dois aller aux toilettes !

C'est la première chose que j'ai trouvé pour pouvoir m'éclipser. Thomas m'a paru bien déconcerté par cette déclaration spontanée. Sans attendre, je le laissais au milieu de la piste et je contournais la scène. Il fallait que je fasse vite sinon mon alibi « toilettes » tombait à l'eau. Je me tapis un peu dans l'ombre et mon cœur eut un raté. Une boule s'est formée en un clin d'oeil dans mon ventre : Martin était là. Et il fumait : j'avais donc découvert d'où venait ce point rouge qui était juste la cendre incandescente de sa cigarette.

Il fume TOUT LE TEMPS.

Il était venu. En tenue civile. Il portait un pantalon kaki, et une chemise beige, dont il avait relevé ses manches sur ses avants-bras. Ses avants-bras... Chair de poule. J'aimerai tellement qu'il me prenne dans ses bras...

La dernière fois, j'avais arraché sa chemise. J'avais envie de recommencer...

Certes je l'avais déjà vu en marcel dans la cour de la ferme à travailler sur sa moto mais là, dans cette chemise beige, il me faisait un grand effet. Pas d'arme, pas de veste à insigne nazie, pas de bottes. Où avait-il trouvé ces vêtements ?

Pour m'approcher, j'ai voulu lui faire une blague. Pas très drôle maintenant que j'y pense, surtout en temps de guerre. Parfois, j'ai tendance à oublier qu'on est des peuples opposés. J'ai enlevé mes chaussures pour m'approcher à pas de loup derrière lui. J'ai saisi un bâton au passage, que j'ai mis contre son dos pour mimer une arme. Je vis d'un coup son dos se raidir et j'ai dit naïvement :

  • Les main en l'air !

Je n'ai rien vu venir. Martin s'est retourné, mon bâton a volé en l'air et je me suis sentie partir en arrière. J'ai frappé le sol assez durement, et j'ai eu mal. Quand j'ai réouvert les yeux, Martin était au-dessus de moi. Ses yeux étaient ahuris, les mains en l'air.

  • Mais enfin, tu es folle ! Tu veux que je te tue ?
  • C’était une blague !

Après avoir fait quelques pas pour qu'il se calme, il me présenta sa main. Je la lui pris et il m'aida à me relever. Avec beaucoup trop de ferveur puis que j'ai atterri dans ses bras. Ça s'est passé en clin d'oeil mais on a vite repris nos esprits. Il m'a reposé par terre avec délicatesse et j'ai vérifié si ma robe était en place. Puis j'ai levé les yeux vers lui. Ce n'était pas la première fois que nous nous retrouvions seuls, pourtant, ça avait un goût d'interdit. Il m'invita à prendre sa main et je le regardais avec un air interrogateur en lui demandant ce qu'il comptait faire.

  • Je t'invite à danser, ça ne se voit pas ?

Il me prit la main et m'attira vers lui. Tel un maître d'apprentissage, il mit mon bras autour de sa nuque et maintient l'autre dans sa main. Son toucher m’électrisait toute la peau. La sienne vint se placer dans le bas de mon dos, très dangereusement basse à mon goût. Il me plaqua contre lui. Mon visage était collé à son torse, le nez dans les boutons ouverts de sa chemise. Je n'avais presque pas de marge de manœuvre. Et lorsqu'il démarra notre danse, une de ses jambes vint se placer entre les miennes. C’était ma foi, très surprenant ! Les allemands ont des manières peu catholiques de danser ! Mais étonnement, je ne lui marchais pas sur les pieds. Je risquais à le regarder et je vis qu'il le faisait déjà. Je devais rougir de toutes mes forces. Je n'en pouvais plus, sa main dans mon dos m'enflammait. Je viens de penser au fait que s'il avait saisi mes fesses, je me serai sûrement laisser faire. J'avais très envie de toucher les siennes, et qu'il touche les miennes (mais qui suis-je?), mais il n'en fit rien. Il est resté très courtois.

Martin s'est brusquement écarté de moi, presqu'en me repoussant. Je n'ai pas du tout aimé cette sensation de rejet mais je compris pourquoi quand je vis Thomas apparaître. C'était pour notre sécurité. On avait du rester trop longtemps ensemble.

  • Joséphine, tout va bien ?

Thomas était sur la défensive, je le sentais. Jamais il n'avait du se retrouver face à un soldat allemand, plus âgé et plus fort que lui.

  • Oui c'est le soldat Müller. Tu sais, celui dont j'ai du m'occuper quand il a été blessé.
  • Que faites-vous ici ? C'est une fête réservée aux français.
  • Je voulais simplement savoir si tout allait bien pour Joséphine et comment elle comptait faire pour rentrer vu que la nuit est tombée.

Je regardais Martin impressionnée par sa vivacité d'esprit dont qu'il avait fait preuve et la rapidité dont il avait sorti ce mensonge. Maintenant, je me demande si c'en est vraiment un.

  • Je raccompagnerai Joséphine. Vous pensez qu'elle n'est pas en sécurité avec moi et ses amis français ?

Je n'aimais pas du tout le ton de Thomas. Déjà, je suis assez grande pour assurer ma propre sécurité et pour rentrer chez moi seule. Pour qui il se prenait ? Mon prince charmant ?

  • Allemands ou français, les hommes restent des hommes.

Martin avait parfaitement raison. Il m'informa, avant de partir, qu'il ne serait pas bien loin si jamais j'avais besoin de lui. Il s'alluma une dernière cigarette et tourna les talons. Thomas me ramena vers la soirée où nous retrouvions Clara qui nous avait pris des bières. Lorsque je vis nos boissons alcoolisées, elle m'informa que le tenancier de la buvette n'avait pas pu les lui refuser. Discrètement, elle me demanda où j'étais et je répondis rapidement que le soldat Müller était venu. Ses yeux s'ouvrirent aussi grands que sa bouche. Il va falloir que je lui raconte tout.

Vers 23h30, nous décidâmes de rentrer. Clara avait enfin mal aux pieds et n'avait pas trouvé son futur mari. Thomas nous avait un peu délaissés pour aller voir ses amis. Et moi, je n'attendais que le moment de rentrer chez moi. Sur le chemin, comme à son habitude, Clara parfait et refaisait la soirée. Elle faisait les questions et les réponses, si bien qu'on avait pas le temps d'en placer une. Thomas et moi restions très silencieux, bien que je sentais qu'il ressassait quelque chose. Il aura fallu d'une phrase de Clara pour qu'il explose. Bla bla bla. Je n'ai pas écouté son sermon moralisateur. Et dire, que j'ai eu envie de l'embrasser en début de soirée. En arrivant à la ferme, je le remerciais pour cette soirée et le congédia.

Clouds brûlait d'impatience que je lui raconte mon entrevue avec Martin, sitôt rentrées dans ma chambre. En fermant les volets, Martin n'était pas sous l'arbre entrain de fumer.

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