12 Juillet 1940 

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Cela faisait deux-trois jours maintenant que maman ne voulait plus aller servir leur repas aux allemands. Elle avait peur. Peur d'eux, peur de renverser la nourriture. Peur de mourir surtout... Elle paniquait à l'idée de devoir les voir et de les servir. Papa m'a demandé si je me sentais de le faire. Je lui ai répondu oui. Mais ai-je réellement le choix ? On va pas leur demander de venir chercher leur plat. Déjà, on m'impose leur présence, et maintenant on m'impose de devenir leur bonne. C'est le pompon ! Comme si, je n'avais que ça à faire...

Ce soir, Maman leur avait préparé du jambon avec des pommes de terre rôties. J'allais devoir faire plusieurs tours. J'ai commencé par amener les plats de pommes de terre. J'ai pris des torchons pour ne pas me brûler, une grande inspiration et j'ai traversé la cour pour aller vers la grange. Je me suis arrêtée à l'entrée. Certains étaient déjà à table et discutaient entre eux, tandis que d'autres jouaient aux cartes. Je leur ai dit que le repas était servi avec une toute petite voix. Effrayée. J'ai posé le plat au centre de la table et je suis repartie aussitôt ! Vite, de l'air !

Au second plat, ils étaient tous à table. Tous parlaient allemand. Je les voyais me regarder, me scruter. J'essayais de me concentrer sur ma tâche et de ne pas faire attention à eux. Lorsque j'ai apporté le dernier plat, je ne me sentais pas bien. J'étais totalement crispée et stressée. Je me suis approchée de la table et je me suis glissée entre deux soldats pour pouvoir poser le plat sur la table. J'ai senti qu'ils parlaient de moi, et pas en bien. Leurs voix étaient, quelque peu, langoureuses. Müller, en face de moi, me fixait du regard. J'ai sursauté et laissé tomber le plat sur la table quand j'ai senti la main d'un soldat sur le haut de mes fesses. Je me suis pétrifiée sur place. Müller a vu qu'il y avait quelque chose qu'il n'allait pas. Vu que le pervers n'enlevait pas sa fichue main, je l'ai repoussé du mieux que j'ai pu, en lui intimant de me laisser tranquille. Il affichait sur son visage un sourire suffisant. Jamais un homme n'avait osé poser la main sur mon corps et ce n'est pas aujourd'hui que je laisserai faire. Encore moins si c'est un allemand. Le soldat a bien essayé de revenir à la charge en me prenant par les hanches. Je crois qu'il voulait que je m'assois sur ses genoux. Müller s'est levé et a haussé la voix. Tout le contingent nous regardait à présent, et s'était tu. Je me sentais terriblement mal à l'aise et effrayée. Le Colonel Jäger a rappelé à l'ordre les soldats Müller et Von Mark, d'une voix qui m'a apeurée. Elle était forte, cassante, dictatoriale. Elle m'en a donné des frissons. Même moi, j'aurai arrêté mes bêtises, s'il était mon père. Il s'est approché de moi et m'a raccompagnée en dehors de la grange. Il m'a promis de cette situation ne se reproduirait plus et qu'il s'en assurerait personnellement. Je l'ai remercié. J'ai vite filé vers la cuisine et me suit installée à table avec papa et maman sans un mot. J'en suis encore sous le choc.

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