3.Les vacances de l'idiot (aux frais de la princesse)

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  • Dites donc Monnier ?
  • Oui Commissaire ?
  • Ca ne nous ferait pas de mal, quelques jours de congés... Vous ne trouvez pas ?
  • Ah, moi, j'ai épuisé tout mon stock de RTT.
  • C'est ballot, ça, Monnier ! Pourtant, les vacances en basse saison, c'est idéal pour se refaire une santé... Vous n'avez pas la foule des grands départs, ni les mômes qui piaillent sur les plages...
  • Ni le soleil...
  • Non, Monnier. Pas cette fois-ci ! Vous ne réussirez pas à me miner le moral... Vous aurez beau déployer tous vos trésors de pessimisme notoire, ils ne m'atteindront pas. Jamais, Monnier. Vous savez, l'océan, le bruit des vagues...
  • La houle qui fout la gerbe...
  • Monnier ! Enfin, surveillez un peu votre langage !
  • Oui, pardon, Commissaire...
  • Bon, nous n'avons pas d'affaire de meurtre sur les bras pour l'instant ?
  • Pour l'instant non. Mais il n'est pas encore 18 heures 49.
  • Certes Monnier, certes. Cela dit, vous avez de la bouteille...
  • Plaît-il ?
  • Je veux dire, avec votre expérience du terrain et toutes ces années passées à me suppléer, vous saurez bien élucider un quelconque mystère en mon absence.

Je le voyais qui hésitait à sortir son carnet à souches pour griffonner quelques conseils de dernières minutes.

  • Tssss, tssss ! Monnier, allons, ne faites pas l'enfant ! Tout ira bien, vous verrez. Et avec un peu de chance, personne ne se fera trucider avant la semaine prochaine.

En courant un peu, j'attrapai le train de 18 heures 46, qui n'était d'ailleurs pas en avance ! Le Touquet, les grandes plages, les chars à voile... Tout était à portée de mes petits doigts boudinés. Mais c'était sans compter sur cette maudite pluie qui s'était invitée dans mes bagages. En plus, on n'y voyait pas à deux mètres. La faute à Monnier, tout ça, il avait fini par me porter la poisse, celui-là.

Je trouvai refuge au sein de la bibliothèque municipale. Le parquet lustré, les vieux bouquins empilés sur les rayonnages ou à même le sol me plongèrent immédiatement dans une atmosphère que n'aurait pas reniée Agatha Christie. Alors que je scrutais les articles de l'Encyclopédia Universalis traitant de sujets aussi passionnants que la pêche en haute mer, j''entendis un cri d'effroi qui me glaça le sang. Au détour d'une allée, je découvris le cadavre d'une vieille dame. Ni une ni deux, je dégainai mon antique portable Nokia 9024 pour prévenir mon acolyte.

  • Allo, Monnier ? Vous n'allez pas me croire... Vous avez gagné une semaine de vacances au Touquet... Mais non, Monnier, pas besoin de toucher à votre compte-épargne temps, ni même à vos économies. C'est tous frais payés ! Le plus tôt sera le mieux, Monnier... Parce qu'une nouvelle affaire de meurtre vous attend... Oui, c'est ça, n'oubliez pas votre carnet à souches... A bientôt Monnier...

Ce que je ne vis pas, pendant que Monnier me tenait la jambe au téléphone, ce fut l'arrivée impromptue d'un jeune inspecteur du coin.

  • Embarquez-moi cet énergumène. C'est probablement lui qui a assassiné Mrs Leblanc avec le chandelier dans la bibliothèque.
  • Mais enfin, Monsieur, tout cela est faux ! Ca ne tient pas le pavé une seule seconde, vos soupçons à l'huile de noix, je suis moi-même commissaire. D'ailleurs, je ne joue jamais au Cluedo, alors vous pensez bien...
  • Votre alibi est bidon, Commissaire ! Car vous seul saviez que la victime cachait le précieux indice - la couleur du string-ficelle de Mademoiselle Rose - dans son soutien-gorge bonnet A. Oui, je sais, ça ne fait pas rêver. Mais à l'âge qu'elle avait, Mrs Leblanc, elle ne faisait de toute manière plus rêver grand-monde.

L'affaire se corsait - ou ce corset, je ne me souviens plus très bien - et ce Monnier qui n'en finissait pas de traînasser au volant de sa bétaillère à marmots ! Sûr qu'il devait s'être encore fait coincer sur la Francilienne !

  • Ne faites pas d'histoires, Commissaire. Suivez-nous au poste.
  • Mais je suis en vacances ! Je n'ai absolument rien à voir avec tout ça... Vous m'auriez parlé de Boney M encore, mais là...

Mon séjour s'éternisa bien plus longtemps que prévu. Cinq ans avec une vue sur des barreaux métalliques et une bouffe infecte. J'aurais mieux fait de m'adresser à un tour-opérator. Monnier m'envoya quand même quelques oranges, un peu amères, bien qu'un avocat m'eut été plus utile. D'autant plus qu'on n'avait toujours pas retrouvé le string-ficelle de Mademoiselle Rose. Pourtant, je me serais volontiers frotté à sa frivolité, moi...

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