Nouvelle 20 : LES MÉTALLIQUES

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Ils avaient fui comme des rats, pourchassés par plus grand et plus menaçant qu'eux. Plus intelligents aussi. Plus forts, plus rapides. Seuls les adolescents s'en étaient sortis. Les parents étaient trop lents, trop craintifs, préoccupés par leurs progéniture. Les petits, trop faibles, ralentis par la peur, tremblants, indécis. La terreur les avait rendus inefficaces.
Le stress extrême avait fait des merveilles sur le cerveau encore immature des jeunes adultes et avait boosté leurs défenses, leur vitesse, leurs réactions de survie. Mais la nuit tombant, il n'en allait plus de même. C'était l'art de s'organiser, de se cacher, de se protéger qui devenait primordial. La réflexion combinée à la prudence prenait le pas sur l'action liée à la vitesse. Si quelques adultes avaient survécu, ils pourraient passer cette nuit et voir venir le premier soleil de sang. Sinon, la damnation était déjà là.
Julie se collait au tronc du chêne le plus large de la clairière. Ses bras encerclaient ses cuisses resserrées sur son torse tandis que seules ses pointes de pieds touchaient encore le sol. Sa tête dodelinait sur ses genoux à force de lutter contre le sommeil. Son frère, trois ans plus jeune, dormait en chien de fusil à ses pieds, caché le plus possible par le vénérable ancêtre des lieux. Leur Border Collie, épuisé, ne dormait que d'un oeil, prêt à bondir de l'autre côté de l'arbre.
Ils n'avaient rien pu emporter. Ni eau, ni nourriture. Pour cela, il eut fallu prévoir. Mais ils avaient eu la chance de revenir de promenade avec Silver, qui avait sans cesse besoin de se défouler. Et c'est là, qu'ils étaient tombés sur ces bandes de malades qui détruisaient tout et tuaient toute la population locale. Ces drôles de personnages enveloppés de bandelettes métalliques. On ne distinguait pas leurs visages, leurs mains, leurs ethnies. Rien de particulier sauf leurs tenues : métalliques. Et leur vitesse : extrême. S'ils vous voyaient, vous étiez foutus. Ils fonçaient sur vous, vous tenaient, vous manipulaient et quand vous commenciez à hurler, à supplier, c'était terminé. Vous étiez mort.
Ce n'était pas la même chose pour les animaux. Ça, ils l'avaient remarqué, grâce à Silver. Quand ils étaient revenus de la promenade et avaient découverts le carnage, ils s'étaient pétrifiés à l'orée du champs, encore cachés dans les hautes herbes. Mais le chien avait bondi, aboyé, tous crocs dehors. Il fonçait comme un fou et voulait sauver son maître, maîtrisé par un homme de métal. En voyant Silver, il avait tout compris, et leur avait crié de rester cachés, de fuir ! L'homme mécanique qui avait tourné la tête pour observer le chien, avait regardé de nouveau leur père et d'une formidable torsion du cou, l'avait tué d'un coup, sec, propre et net. Une poupée de chiffon s'était alors affaissée juste au niveau de Silver. Son hurlement les avaient glacés et ressaisis.
Ils s'enfuirent, doucement, courbés en deux. Prenant les chemins de traverse qu'ils connaissaient depuis l'enfance, ils passèrent un cours d'eau où ils s'abreuvèrent. Ils avaient cru que le chien y passerait aussi, Pourtant, ils avaient pu observer les animaux paissant comme à leur habitude dans les champs alentour, chevaux, vaches, moutons. Apparemment, aucune bêtes n'avait été tuées.
Ce n'est qu'une dizaine de minutes plus tard que Silver les rejoignit en catimini. Il avait dans la gueule un morceau de la robe que leur mère portait ce jour-là. C'était celle du printemps, comme elle l'appelait. Ni trop chaude, ni trop légère. Elle la mettait dès que les beaux jours commençaient à poindre. Julie éclata en sanglots. Lionel se fâcha contre Silver qu'il traita de vilain chien, lui rappelant qu'il ne devait pas tirer sur les vêtements pour qu'on s'intéresse à lui ! La belle robe de maman, elle n'allait pas être contente ! Mais ses larmes l'interrompirent net parce que personne n'en avait plus rien à faire de cette satanée règle ! Et ça, s'était vraiment triste de plus avoir de règles, de maison, de parents pour se faire disputer quand on les respecterait pas ces fichues règles ! Au lieu de ça, ils étaient juste perdus dans les bois, et lui, il avait froid et il ne voulait vraiment pas être obligé de disputer son gentil chien qui n'était même pas mort. C'était un warrior son chien, il voulait le féliciter, lui faire des câlins et puis juste le tenir, rester coller contre lui !
Mais d'autres qu'eux avaient dû fuir et bientôt ils furent quelques uns à se retrouver dans les bois. Tout d'abord méfiants, ils durent bien vite s’accommoder de la situation et de la nuit qui leur faisait peur à tous, parce qu'ils ne savaient plus quoi faire, où aller. Ils décidèrent de s'entendre sur l'installation d'un camp de fortune et la mise en commun du peu qu'ils avaient tous. Le plus important pour le moral s'avéra l'échange d'informations, car l'un d'entre eux, Guillaume avait plus de dix-huit ans et revenait de la ville, en voiture. Il avait échappé de justesse à un traquenard ! Lui, il leur raconta toute l'histoire.
C'était sur le trajet du retour qu'il avait vu sortir d'un énorme conduit un flot gigantesque de ces hommes métalliques. Ils s'étaient aussitôt éparpillés en direction de toutes les maisons, des personnes et des véhicules, dont le sien. Mais contrairement aux bons citoyens, lui ne s'était pas arrêté par curiosité, au contraire, il avait accéléré. Comme il le leur expliqua, il avait acheté un peu de marchandise illicite et ne voulait pas d'ennuis. Heureusement, hein ! Et c'est en voyant ce qui se passait quand les cons s'étaient arrêtés, qu'il fonça pour aller se réfugier dans les bois ou en forêt !
— C'était affreux, ces êtres de métal tuaient tout le monde ! Les femmes, les enfants, les hommes, les jeunes, les vieux ! Mais pourquoi ? On n'en sait rien de rien ! Des fous psychopathes !
— Comme ils viennent de sous la terre, dit Lionel, c'est peut-être des mutants ? Ou alors, ils ont toujours été là, tout-au-fond, et maintenant ils veulent habiter à la surface ? Et c'est pour ça qu'ils ont ces drôles de trucs métalliques ? C'est pour se protéger ? De l'air ou du soleil ? Ou alors, c'est des aliens qui ont atterri sous terre et on l'a même pas remarqué ?
— Mais ils vont continuer à chercher partout et ils vont nous trouver, c'est sûr ! Comment on va faire ? On n'a rien pour se cacher ici ! s'inquiéta Julie
— Y a le ruisseau pas loin pour l'eau, c'est bon, ça. lui rappela Lionel. Ils nous sentiront pas, si ?
— Et on va chasser et cueillir pour survivre ! ajouta Guillaume.
— Ah bah bonjour la survie... grommela Zack, un des plus jeunes. J'ai rien moi, pas de couteau, pas de ficelle, pas d'allumettes, je sais même pas ce qui est comestible ou pas... on va s'empoisonner, oui ! En tout cas, je bouffe pas de champignons !
— C'est vrai, tu sais chasser et pêcher ? demandèrent-ils tous à Guillaume.
— Il faudra bien, sinon on va crever ! Merde, putain ! Eh puis, d'abord, on fait un tour de garde pour la nuit, toutes les deux heures. Au cas, où. Julie a raison, on n'est jamais trop prudent. Allez, on s'bouge, bordel !


...


— Là, là ! Les leslesles... Hooooommes métaaaalliques !!!!
— Les métalliques, ils arrivent !
— Ils arrivent, ils arrivent !
— Fuyeeeeeez ! Fuyeeeez ! Fuy...
— Naaan, Naa...
— Au se...
__ Les métalliq...
...
— AHOUAOUHOOOOOOOOOOUUUUUUUU !!!!!!

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