Nouvelle 16 : DOULEUR INVISIBLE

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Cela faisait des semaines qu'il avait cessé de marcher. Petit-à-petit. comme ça. Il avait ralenti, traîné la patte, claudiqué, et son bassin n'avait plus voulu de son grand corps. Ses longs postérieurs postés de part et d'autres de son thorax avaient donné le top départ de la neuropathie.


La néospora caninum, qu'ils disaient. Connerie ! Les chercheurs, les vétérinaires qui continuent à aimer les animaux plus que le fric, ceux-là poursuivent avec ténacité la maladie jusque dans ses derniers retranchements. Il vont jusqu'à considérer le malade comme un être vivant, encore ! A sauver, toujours !


Alors, oui, je t'ai cherché un de ces vétérinaires chercheurs mon warrior. Un de ceux qui poursuivent leur quête. Et je l'ai trouvé mon bébé. Il t'a porté, t'a soutenu, t'a aidé quand tu ne voulais plus manger, quand tu as pris froid et que ton corps affaibli par la douleur et la lassitude ne savait plus quoi faire de sa grand carcasse. Lui a tenu bon, a envoyé tes morceaux de chair, tes prélèvements de sang jusqu'en Allemagne et aux Etats Unis, mon ange. Et le bilan est tombé.


Ce n'était pas la Neospora. Ce n'était pas une Myasthénie. Ce n'était pas une neuropathie dégénérative génétique. Ce n'était pas une saloperie définitive et incurable mon amour.
Juste une hypothyroïdie, mon coeur, une simple hypothyroïdie qui avait tellement dégénéré qu'elle avait affecté tous tes nerfs périphériques et tes muscles. Nous sommes en train de te sauver. Depuis trois mois, sur ton matelas, tu restes là, à me regarder, à demander, à haleter pour boire, manger, sortir quand tes besoins deviennent trop pressants. Et nous t'aidons du mieux possible pour que tu supportes ta frustration de chaque instant.


Mais voilà que tu t'es mis à haleter, depuis plusieurs jours. Fort. Tu me fixes dès que j'apparais. Intensément. Je ne comprends pas mon coeur d'amour. Je me sens mal. Je m'agace. Je tourne en rond. Je peste, je m'impatiente. Je rumine et t'apostrophe. Est-ce que nous ne faisons pas tout ce qu'il faut ?


Mais cette odeur, perce mon incompréhension... éveille la suspicion d'un autre. Et c'est l'horreur que nous découvrons, mon pauvre ange. Tu n'as pas assez souffert ? Je n'ai pas assez appris de toi. Je te demande pardon, tellement d'amour et pas encore assez de communication. Je ne parle pas ton langage, je ne décode pas ton corps qui souffre. Et pourtant, mon ange, tu m'as appelé, et demandé mon aide. J'ai fermé les yeux, je suis partie plus loin, respirer le silence. J'avais tant besoin de repos, et toi dont la chair brûlait, tu n'as pas même poussé une plainte !


Nous avons trouvé un véritable trou, suintant le pus, à l'entre-cuisse, là où portait ton harnais. Pas assez de soins, d'attentions, de maîtrise. Pardon.

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