Henry ?

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Stones we carry

Clothes we lived in

All the tales we will tell our children

Oh, we're taking the high road...

* BLAM *

La main du jeune homme qui écrase le réveil fait taire l’horrible objet. Pourtant cette musique, il la connaît, il l’aime, même. Comme le refrain de sa journée qui commence toujours par cet exact couplet.

Alors il se lève, puisqu’il sait ce qu’il doit faire, dans quel ordre et comment. Il répète sa partition à la perfection. Aucune fausse note. Aucune interprétation. Aucune variation.

Il prend son café que lui sert sa machine. Il fait quelques exercices, puis file sous la douche. Il sait exactement combien de temps il a pour laisser l’eau chauffer, se savonner, se rincer, se sécher. Et il sait qu’à ce moment précis, quand tout sera fait et bien fait, son café sera à la bonne température.

Bingo.

Un œil sur son smartphone, l’autre encore hagard, il descend sa boisson sur un tempo Lento.

Sans hésitation aucune, il termine sa toilette, enfile ses vêtements et sort de son appartement.

Tient, il fait beau, aujourd’hui. Comme hier. Et avant-hier…

Quelques mètres seulement le séparent du grand rond-point. S’il a un nom, le jeune homme l’ignore. Mais ce rond-point l’a toujours intrigué, d’aussi loin qu’il se rappelle.

En son centre, une porte close ne donnant sur rien trône au sommet d’une petite butte d’herbe fraîchement tondue. Autour, ronronne une symphonie de milles et une voitures, motos, camions, cyclistes et, plus loin sur le trottoir, les piétons.

C’est une jolie porte. En bois, en toute vraisemblance. Une porte comme on peut en croiser dans un manoir, ou une maison un peu cossue. Pas vraiment exceptionnelle ni remarquable, mais pas de celles qui ornent les buildings de cette ville sans fin.

C’est une jolie porte. Peinte en noire.

D’ailleurs ce n’est pas le rond-point qui a toujours intrigué le jeune homme, mais bien cette porte. Close, donc.

Comme chaque matin, la foule sans visage le croise et le dépasse tandis que toute son attention est braquée sur l’objet de ses interrogations.

Il bouscule une personne, laquelle renverse son café, s’excuse, toussote et repart.

Il apprécie marcher dans ce centre-ville. De toute façon, il ne travaille pas bien loin.

Encore quelques centaines de mètres, et il pénètre dans l’une de ces immenses tours sans couleurs qui chatouillent les nuages.

Lorsqu’il y en a, des nuages.

Parfaitement à l’heure, son index presse le bouton de l’étage où il se rend quotidiennement.

Il n’a pas peur, ni n’éprouve d’excitation particulière, car la suite, il l’a connaît.

Il salue brièvement quoique poliment ses collègues et s’installe à son bureau, au fond de l’open-space, celui qui est près de la fenêtre. Celui qui donne sur le rond-point.

Il y effectue son travail habituel, martelant son clavier de ses doigts comme autant de croches sur un tambourin sans âme. Il pianote et pianote encore jusqu’à ce que…

Lay beside me

Wake the morning

Ever after day reborn

And oh, We're taking the high road…

Midi.

Ses collègues lui font signe de venir manger un bout ensemble, mais Henry (puisque c’est ainsi que ses collègues l’ont appelé) décline. Il préfère la brasserie, là-bas. Celle qui n’est pas bien loin.

Pas bien loin, non, puisqu’en un rien de temps il s’y retrouve attablé.

Posé contre le carreau, il se laisse enivrer par le ballet à sens unique des autos.

Avec cette porte close en toile de fond.

Upset the sun

I'm ready to run

I'm walking a tight rope

I'll give you the fall

Spring singing a song

We're taking the high road…

Sa musique favorite passe sur les en

ceintes du restaurant alors qu’il paie puis s’en va.

Il est grand temps de reprendre le travail.

Son après-midi se déroule bien, merci. Le morceau de journée se termine en un fondu au noir des plus communs : il rentre chez lui, contemple la porte, prend l’ascenseur, dîne, se relaxe, se couche.

Rideaux.

***

Stones we carry

Clothes we lived in

All the tales we will tell our children

Oh, we're taking the high road...

* BLAM *

La main du jeune homme qui écrase le réveil fait taire l’horrible objet. Pourtant cette musique, il la connaît, il l’aime, même. Comme le refrain de sa journée qui commence toujours par cet exact couplet.

Alors il se lève. Il répète sa partition sans fausse note.

Il prend son café, fait quelques exercices, puis file sous la douche. Quand tout sera fait et bien fait, son café sera à la bonne température.

Bingo.

Un œil sur son smartphone, l’autre encore hagard, il descend sa boisson sur un tempo Andante.

Sans hésitation aucune, il termine sa toilette, enfile ses vêtements et sort de son appartement.

Tient, il fait beau, aujourd’hui. Comme hier. Et avant-hier…

Quelques mètres seulement le séparent du grand rond-point.

En son centre, une porte close ne donnant sur rien trône au sommet d’une petite butte d’herbe fraîchement tondue. Autour, ronronne une symphonie de milles et une voitures, motos…

Comme chaque matin, la foule sans visage le croise et le dépasse tandis que toute son attention est braquée sur la porte.

Il bouscule une personne, laquelle renverse son café, s’excuse, toussote et repart.

Il ne travaille pas bien loin.

Encore quelques centaines de mètres, et il pénètre sans l’une de ces immenses tours sans couleurs qui chatouillent les nuages.

Parfaitement à l’heure, son index presse le bouton de l’étage où il se rend quotidiennement.

Il salue ses collègues et s’installe à son bureau, au fond de l’open-space, celui qui est près de la fenêtre.

Il y effectue son travail habituel, martelant son clavier de ses doigts comme autant de triolets sur un tambourin sans âme. Jusqu’à ce que…

Lay beside me

Wake the morning

Ever after day reborn

And oh, We're taking the high road…

Midi.

Ses collègues lui font signe de venir manger, mais Henry décline. Il préfère la brasserie, là-bas. Seul.

Attablé, il se laisse enivrer par le ballet à sens unique des autos.

Avec cette porte close en toile de fond.

Upset the sun

I'm ready to run

I'm walking a tight rope

I'll give you the fall

Spring singing a song

We're taking the high road…

Sa musique favorite passe sur les enceintes du restaurant alors qu’il paie puis s’en va.

Le morceau de journée se termine en un fondu au noir des plus communs : il rentre chez lui après le travail, contemple la porte, prends l’ascenseur, dîne, se relaxe, se couche.

Rideaux.

***

Stones we carry

Clothes we lived in

All the tales we will tell our children

Oh, we're taking the high road...

* BLAM *

La main du jeune homme écrase le réveil. Pourtant cette musique, il l’aime. Comme le refrain de sa journée qui commence toujours par cet exact couplet.

Alors il se lève. Il répète sa partition sans fausse note.

Il prend son café, fait quelques exercices, puis file sous la douche.

Un œil sur son smartphone, l’autre encore hagard, il descend sa boisson sur un tempo Moderanto.

Il termine sa toilette, enfile ses vêtements et sort de son appartement.

Quelques mètres seulement le séparent du grand rond-point.

En son centre, une porte close ne donnant sur rien trône au sommet d’une petite butte d’herbe.

Comme chaque matin, la foule sans visage le croise et le dépasse tandis que toute son attention est braquée sur la porte.

Il bouscule une personne, laquelle renverse son café, s’excuse, toussote et repart.

Mais lorsqu’une voiture passe tout près, il jure entendre la mélodie de sa musique préférée…

High road…

Incrédule, il note la coïncidence et se remet en route ; de toute façon, il ne travaille pas bien loin.

Il pénètre sans l’une de ces immenses tours, son index presse le bouton de l’étage où il travaille.

Il effectue son travail habituel, martelant son clavier de ses doigts comme autant de doubles-croches sur un tambourin sans âme. Jusqu’à ce que…

Lay beside me

Wake the morning

Ever after day reborn

And oh, We're taking the high road…

Midi.

Henry se rend à sa brasserie favorite.

Attablé, il se laisse enivrer par le ballet des autos.

Avec cette porte close en toile de fond.

We're taking the high road

Oh, we're taking the high road

Finally awake and we're taking the high road...

Sa musique favorite passe sur les enceintes du restaurant alors qu’il paie puis s’en va.

Après le travail, le morceau de journée se termine en un fondu au noir des plus communs.

Rideaux.

***

Stones we carry

Clothes we lived in

All the tales we will tell our children

Oh, we're taking the high road...

* BLAM *

La main du jeune homme le réveil. Pourtant cette musique. Comme le refrain de sa journée qui commence par cet exact couplet.

Qu’est-ce que ?

Alors il se lève. Il répète sans fausse note.

Il prend son café, fait quelques, puis file sous la douche.

Sur son smartphone, l’autre encore hagard, il descend sa boisson sur un tempo Presto.

Il termine sa toilette, enfile ses vêtements et sort.

Quelques mètres seulement.

Ya un truc qui cloche ?

En son centre, une porte close.

Une voiture passe tout près, il jure entendre la mélodie de sa musique…

High road…

La musique vient-elle de la voiture ?

Et ces voix étranges, lointaines… elles aussi ? Pour Henry, le tumulte vient de la porte close.

Close ? Il n’est pas si sûr qu’elle le soit.

Car, il le jure, là, en dessous du battant, filtre un rai de lumière bleuté.

Henry secoue la tête. C’est impossible.

La voiture s’éloigne, la musique s’estompe. De toute façon, il ne travaille pas loin.

Il pénètre sans l’une de ces immenses tours, son index presse le bouton de l’étage où il travaille.

La suite il l’a connaît.

Henry effectue son travail habituel, martelant son clavier de ses doigts comme autant de syncopes sur une batterie. Jusqu’à ce que…

… oh et puis non. Aujourd’hui il ne déjeunera pas dans sa brasserie favorite. Il irait voir plus loin dans la rue. Ce n’est quand même pas le seul restaurant du coin ?

Alors il sort, passe devant la brasserie.

Hearts are wayward

Sun is swollen

Rest tomorrow

The way's unfolding

Oh, we're taking the high road...

Et il continue. Ses pas l’amènent une, deux rues plus loin.

Les immeubles se suivent et se ressemblent. Pas de restaurant.

De toute façon il n’a pas faim.

Pour une raison qu’il ignore, Henry se sent agacé.

Il stop à un arrêt, prend le bus. Il ne sait pas où il mène ce bus, mais ça ne compte pas vraiment.

Le bus ne s’arrête pas. Il tourne à gauche, à droite. Les feux sont verts, il accélère.

Il accélère encore et les anonymes assis ça et là ne prêtent aucune attention ni à Henry, ni au vide absolu qui se dresse devant eux.

À l’instar de dizaines autres véhicules, le bus s’apprête à se jeter dans le gouffre noir de la fin du monde.

Henry panique.

Il hurle, se précipite vers une porte. Celle-ci s’ouvre. Il saute.

Il fait quelques roulés-boulés et se relève juste à temps.

Le vide infini s’étend à ses pieds.

Pas le cosmos, l’univers ou un ciel d’encre d’une nuit d’automne. Un noir profond dénué de tout. Un vide de sens, de matière. Un vide.

Et ce vide ronge le tout. C’est lent presque imperceptible. Mais sitôt qu’Henry le voit, le néant se vexe. Il accélère.

Henry se met à courir, à fuir. Ce gouffre, il n’en veut pas. Il n’a rien de paisible, rien du repos éternel. Rien de rédempteur, de salvateur.

Dans sa course, il croise des voitures, des cyclistes, des piétons, et personne ne semble avoir conscience ni de ce qui arrive ni de ce qu’ils sont.

Il court, il court, son cœur bat la mesure à un rythme effréné. Il passe devant la brasserie.

Finally awake and we're taking the high road…

Il court, il court, ses pas pincent le pavé jusqu’au rond-point.

Upset the sun

I'm ready to run

I'm walking a tight rope

I'll give you the fall

Spring singing a song

We're taking the high road

Oh, we're taking the high road...

Cette fois plus de doute. La porte n’est pas close, et derrière elle, s’élève la chanson. Sa chanson.

Henry s’arrête. Il se retourne.

Le néant galope toujours. Il vient de partout. D’ici quelques secondes, le monde entier sera englouti dans l’obscure. Henry est cerné. Il n’a pas le choix.

Sa main se pose sur la clenche ronde et froide.

Finally awake and we're taking the high road

As long as it takes us we're taking the high road...

Il ne sait pas pourquoi il hésite. Il a toujours voulu savoir ce qu’il y avait derrière cette porte. Mais maintenant qu’il y est…

Where ever you are

Well you know I will follow

Rivers to Oceans

Today and Tomorrow...

La brasserie chute dans l’oubli, son open-space aussi.

Allez Henry… il ne faut plus hésiter maintenant !

Where ever you are

Well you know I will follow

Rivers to Oceans

Today and Tomorrow

Il ouvre la porte et une lumière bleutée aveuglante l’accueille. Sans un regard en arrière, il entre.

Ou il sort, il ne sait pas vraiment.

Taking the high Road

Taking the high Road...

Docteur !

Une grande lumière blanche m'aveugle. Je ne sais pas où je suis.

Je ne suis pas même certain de qui je suis.

Tout ce que je perçois, c'est cette musique...

Cette musique, je la connais ? Je l'aime, même !


...Taking the high road.

Lien vers la musique -> https://www.youtube.com/watch?v=3YrWIuXg0nI

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