3. Romain

8 minutes de lecture

— Je ne comprends pas d’habitude, elle continue à envoyer des messages même si je ne lui réponds pas, dis-je à mes meilleurs amis Théo et Kevin. Ce à quoi Théo me dit sur un ton de reproche.

— Bon, écoutes, c’est toi qui lui a dit de t’oublier et maintenant tu te plains parce qu’elle le fait, je ne comprends plus là mec.

— Mais c’est Lucy aussi, elle me rend dingue.

Théo et Kevin se lancèrent un de ces regards, je vais encore en prendre pour mon grade, moi. Ils savent bien que quand ça touche Lucy, j’ai du mal à avouer quoique ce soit. Elle me rend dingue, c’est sûr. Le pire, c’est qu’elle occupe mes pensées et mes discussions de plus en plus. C’est l’un de mes sujets de conversation principal depuis qu’elle est partie. J’ai... Comment dire ? Je ne peux pas me passer d’elle. Mais je ne lui dirais pas. Théo et Kevin ne cessent de chuchoter et de me regarder, je sens que cette histoire va encore me retomber dessus. Je le sens comme le nez au milieu de la figure. Bien évidemment, j’ai vu juste. C’est au tour de Kevin de me parler sur un ton de reproche. Je suis bien parti pour passer un sale quart d’heure.

— Elle te rend dingue, ça c’est sûr. Mais ouvres les yeux aussi, ça fait deux mois qu’elle est partie et ça fait aussi deux mois que tu regardes ton portable toutes les cinq minutes en faisant ta tête, tu sais celle de lorsque tu as un truc qui ne va pas. Et ne nous dis surtout pas que tout va bien ! Théo, tout comme moi, nous savons très bien que c’est faux. Tu mens comme tu respires quand c’est d’elle qu’on te parle. C’est exactement comme la fois, où elle a voulu s’éloigner de votre jeu avec l’autre petit con.

— Ne me parle pas de lui ! Il a été pire que moi ! Ce type, j’espère ne plus jamais avoir à croiser sa route. Elle pensait vraiment que de s’éloigner permettrait d’arrêter le jeu, de m’effacer de son cœur ! Mais il l’a blessé plus que moi ! Il est allé trop loin ! Quoi, pourquoi vous me regardez comme ça ? J’ai dit quoi encore ?

— Oh rien, juste que tu ne dis pas la vérité. Oui, il lui a fait beaucoup de mal, plus encore que ce que nous aurions tous pensé. Et elle est revenue vers toi. Encore plus attacher à toi que lorsqu’elle était partie. Et tu le sais. Tu as été élevé avec elle, tu parles tout le temps d’elle et puis après tu nous dis que ce n’est rien, qu’il n’y a rien. Tu le dis tout le temps, comme si tu avais besoin de le répéter pour y croire. Dis-moi, tu ne ressens vraiment rien pour Lucy ? Vu la situation et ton comportement depuis le début de ces deux mois, on dirait bien que tu nous caches quelque chose.

— Mais non, pas du tout ! Je ne vous cache rien, vous la connaissez bien, elle fait toujours sa tête de mule. Elle le fait pour pousser le jeu à son maximum. Croyez-moi ! Mais merde, ne me regarder pas de cette manière ! J’ai l’impression que vous allez me tuer sur place. Et puis merde à la fin ! Je ne suis pas venu pour parler d’elle, je suis venu pour passer une soirée tranquille avec mes potes.

— Sauf que c’est toi qui a commencé à nous parler de Lucy. C’est toujours toi, qui commences à parler d’elle. C’est ton étoile. On le sait tous, elle te rend ton sourire. Tu la regarde chaque fois qu’elle entre dans une pièce, tu passes un temps fou à l’observer avant d’aller lui parler. Tu crois, qu’on ne connaît de votre jeu. Mais tu as tort. Tu penses quand la blessant plus encore elle va revenir vers toi ? Tu te trompes votre jeu ne fait que vous détruire. Elle surement plus que toi.

— Arrête, tu veux ! Je n’ai pas besoin de ta petite leçon Kevin. Je sais déjà tout ce que tu dis. Je sais que je l’observe quand elle rentre dans une pièce mais tu ne te rends pas compte que ce que j’attends c’est… C’est cette lumière qui s’allume dans ses yeux quand elle croise mon regard. C’est son rire quand elle croit qu’elle m’a surpris.

— Ok, donc avoue-le. Avoue-nous ce que tu ressens pour elle, va la voir et perle lui. Parle-lui de tes sentiments. D’accord, c’est cliché. Trop pour toi mais tu es largement parti dans le mauvais sens-là. Tu la perds et tu ne fais rien pour la rattraper.

— Tais-toi ! Je ne peux pas, c’est tout. Si j’y vais, elle aura gagné. Et je ne suis pas un faible. Elle est très bien où elle est. Crois-moi, sans moi, elle avancera plus vite. Elle aura son sourire tous les jours.

— Mais elle te manque…

— Oui.

— Et c’est tout ? C’est tout ce que tu as à dire !

Oh non, ils vont me tomber dessus tous les deux en même temps. Et bien évidemment, j’ai raison. Je ne peux pas avoir tort. Pas quand ça la concerne, elle. Elle me manque, oui mais comment je pourrais lui avouer une telle chose sachant que c’est moi. C’est moi qui l’ai repoussé sans la laisser parler. Sans lui laisser la chance de m’expliquer son départ. Je l’ai poussé à bout et l’ai laissé partir à trois cents kilomètres, pourquoi ? Parce que je suis trop fier ? J’ai besoin d’être plus fort qu’elle. Plus fort que ce que je ressens pour elle. Plus fort que ceux qui avouent leurs sentiments. Théo commence à hausser la voix et bien sûr Kevin va être dans son sens. Comme d’habitude, pourquoi changer les bonnes vieilles habitudes. Enfin, là il manque Lucy pour me moquer d’eux. Au moins quand elle est là, j’arrive à en rire. J’arrive à rire de leur petite leçon de morale. J’arrive à garder le sourire grâce à elle, à l’aide de sa présence.

Je recommence à penser à elle, enfin je ne cesse de penser à elle. Peut-être que Théo et Kevin ont raison. Je n’arrive pas à dire, je ne peux pas lui dire. Elle est mon tout, et je n’arrive pas à lui dire. Je la repousse à chaque fois qu’elle essaie de se rapprocher de moi. Je la repousse chaque fois, qu’elle entre trop loin dans mon cœur. Je sais, que c’est elle. Qu’elle me fait me remettre en question et pourtant nous avons continué le jeu. Encore et encore. Elle a été blessée tellement de fois que je ne peux plus les compter. Alors oui, mes meilleurs amis me font la morale et pour une fois effectivement, ils sont dans le juste. Ils ont touché en plein dans le mille et cela m’énerve.

— Stop là, je n’en peux plus ! Lucy n’est pas là !

— Calmes-toi mec, c’est bon. On arrête de parler de Lucy mais toi aussi arrêtes un peu de penser à elle, ou au moins penses y moins fort. Parce que rien qu’à ton regard on voit que tu penses à elle, on voit bien que son départ te perturbe plus que ce que tu ne le dis.

— Là n’est pas le problème, elle n’est pas là. Je ne peux rien y changer.

— Romain, il a raison. Justement tu nous parles de Lucy dès qu’elle n’est pas là, or là ça fait deux mois qu’elle est partie. Déjà deux mois. Alors soit, tu lui envoie un message pour t’excuser, soit, tu vas la voir là-bas. Tu as le choix et même deux choix qui se présentent à toi. Dis-nous, qu’est-ce que tu attends ?

— Rien. Elle. Enfin, un signe d’elle. Une chose qui ferait que tout pourrait changer. Quelque chose qui mettrait réellement fin au jeu.

— Et si elle, elle fait comme toi ?

— Vous n’aurez jamais fini d’attendre.

— Elle m’oubliera bien avant que moi, je ne l’oubli…

Je me lamente et en même temps, je suis un peu en colère. Jamais ce n’a été à moi de m’excuser auprès d’elle. Je n’arrive pas à lui demander pardon même si je devrais. Et je pleurniche auprès de mes potes. Comme une fillette vraiment. J’ai honte de moi et en même temps quand Lucy est le centre de mon attention, j’ai du mal à rester concentrer sur autre chose.

Merde, je suis encore dans mes pensées. Elle est toujours là dans ma tête, dans mon esprit. Je suis mordu, c’est foutu. Moi ? Non, impossible, je ne peux pas avoir des sentiments aussi forts pour une fille. Enfin, même si c’est Lucy, j’ai du mal. Je n’accepte pas, j’ai du mal à avouer ce que je ressens alors si ce que je ressens la concerne. Comment je vais pouvoir lui dire ? Comment, alors qu’elle n’est plus là, alors qu’elle ne me donne plus de ses nouvelles ? Je ne sais pas… Je ne sais plus ce que je dois faire. Elle me fait perdre tous mes moyens.

— Elle est à trois cents kilomètres d’ici ... Et je ne me vois pas m’excuser par messages, je ne le fais jamais et elle le sait. Je pense que je vais plutôt essayer de l’oublier, comme je lui ai conseillé de le faire pour moi.

— Ouais mais en attendant, tu n’es pas au mieux de ta forme mon vieux. Lucy et toi, vous êtes un tout. On le sait tous. On vous voit ensemble depuis longtemps, presque toujours. C’est normal qu’elle te manque, elle n’est jamais partie aussi loin. Mais là, c’est toi qui fais l’imbécile. Bouge ton cul mon pote !

— Oh chut ! On va rejoindre les autres à la soirée ?

— Romain…

— Quoi Théo ? Oublis, cette conversation. Tu veux bien ? On reprendra plus tard, pour l’instant il faut que je me change un peu les idées. Lucy me donnera de ses nouvelles, j’en suis certain. Elle ne me laissera pas sans nouvelles, je ne le crois pas.

— Toi, tu es aussi hésitant ? C’est nouveau et totalement étrange de ta part. C’est la première fois que tu es aussi, comment dire ? Autant bouleverser par une fille. Après, comme c’est Lucy, ce n’est pas très étonnant.

— Oui, je suis hésitant justement parce que c’est Lucy. Vous connaissez notre histoire, notre jeu. Vous savez que je l’ai énormément blessé. Alors, disons que j’ai un peu la trouille de lui avoué quoi que ce soit. C’est elle.

— Oui, c’est ta petite étoile. Elle fait briller tes yeux quand elle est là. Elle te change et tu ne t’en rends pas compte. Tu fais moins de conneries avec elle dans les parages.

— Je sais bien.

Annotations

Vous aimez lire Sandra Malmera ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0