Chapitre 4 (cinquième partie)

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Mercredi 28 juin 2006

Comme Maureen était bien reposée, Mummy proposa à quelques-unes de ses "copines" de leur rendre une petite visite. Il y avait là sa belle-sœur, Mary, une voisine, Esther, et deux autres dames qui vivaient à Fort William-même. L'une d'entre elles, Maisie, était veuve, comme Mummy. Et l'autre, Anna, avait de nombreux petits-enfants au point que Maureen se perdit vite au milieu de tous ces noms, puisqu'il fut bien entendu nécessaire de demander des nouvelles de toutes les descendances.

Mary conduisait encore et s'était chargée d'amener Maisie et Anna avec elle, quant à Esther, elle était venue à pied. C'était une dame assez maigre, au visage ridé comme une vieille pomme, au sourire adorable. Elle avait toujours le mot pour rire et ne tarda pas à plaisanter.

Elles s'installèrent toutes autour de la table du jardin, ayant chacune apporté son ouvrage. Maureen, qui avait quitté sa chambre après sa sieste en prenant un livre, comprit cependant très vite qu'elle n'allait pas pouvoir lire une seule phrase. Si deux d'entre elles tricotaient, que les autres brodaient ou faisaient du crochet, aucune ne laissait sa langue dans sa poche.

Dès son arrivée, donc, Esther fit sa curieuse au sujet de Maureen :

- Alors, petite, tu es donc l'amie de Mickaël ! Qu'il a bon goût, ton petit-fils, Mado ! Quelle jolie jeune femme que voilà !

Maureen sourit. Déjà, Esther continuait :

- Et donc, Mickaël va être papa ! Oh dam ! Quelle histoire !

- C'est une jolie nouvelle, intervint Mary. Léony doit être ravie d'avoir bientôt un petit cousin ou une petite cousine ! Et ton Ingrid alors... Deux fois grand-mère !

- Ah, ça, dit Mummy, toute la famille se réjouit, c'est certain... Et moi tout autant.

- Mais alors, pourquoi es-tu ici, Maureen ? demanda Anna d'une voix douce : elle était sans conteste la plus posée de toutes.

- Et bien, commença Maureen, j'ai dû arrêter de travailler un peu plus tôt que prévu et nous avons pensé, Mickaël et moi, que je serais aussi bien ici qu'à Glasgow.

- Ah ça, l'air de la ville, ça ne vaut rien ! dit Maisie. Alors que le bon air de la montagne et de la mer... C'est très bon, pour le bébé, ajouta-t-elle en se penchant un peu vers Maureen sans pour autant lâcher ses aiguilles à tricoter.

- Et ce petit, alors, c'est un garçon ou une fille ? demanda encore Esther avec le regard pétillant.

- Nous ne voulons pas savoir, répondit Maureen. Nous voulons la surprise...

- C'est une belle chose, dit Mary. Oui, c'est toujours une belle surprise !

- Nous, nous n'avions pas le choix, dit Anna. On avait forcément la surprise au bout !

- Ca dépend... dit Esther. Il y a des signes qui ne trompent pas.

- C'est vrai, dit Maisie. Maureen, mets-toi donc debout un peu...

Amusée, Maureen s'exécuta et fit quelques pas autour de la table avant de revenir s'asseoir à sa place.

- Moi, je dis qu'elle le porte bien haut pour que ce soit une fille, dit Maisie après un petit temps de réflexion.

- Et moi, je trouve qu'il pointe bien en avant. Oui, c'est certainement un garçon, dit Mary. Les garçons ressortent toujours plus vers l'avant.

- Vous croyez ? demanda Maureen avec à la fois intérêt et circonspection.

- Certaine, dit Mary. Mes deux garçons, je les ai portés haut et en avant. Les filles étaient toujours basses... N'est-ce pas, Mado ? Toi qui m'as vue tout du long...

- C'est vrai, répondit Mummy. Je trouve quand même qu'il est difficile de se prononcer pour Maureen. Il n'est ni bas, ni haut.

- Peut-être, dit Maisie, mais il pointe. C'est un signe.

- As-tu des nausées, Maureen ? s'enquit Anna d'une voix compatissante.

- Non, très peu...

Cette réponse sembla plonger les vieilles dames dans l'expectative.

- Les garçons rendent plus malades que les filles... dit Esther. Hum... Peut-être que Mado a raison, finalement. Peut-être que ce bébé n'est pas si haut que ça... Hum... Vraiment... Voyons... Maureen, si tu es d'accord, je peux sortir ma médaille. Elle, elle est fiable.

- Votre... médaille ? s'étonna Maureen.

- Oui, oui. Elle a été bénie.

Elle n'ajouta rien, comme si cela suffisait, et sortit de sa poche un mouchoir dans lequel était enveloppé un petit collier avec une médaille. Cela ressemblait à un petit bijou de baptême ou de communion. Esther se leva et s'approcha de Maureen, demanda à Maisie de changer de place, ce que cette dernière fit bien volontiers. Esther déplaça un peu le siège et s'assit alors face à Maureen, puis fit tourner la médaille au-dessus du ventre de la jeune femme avec un air si sérieux que Maureen eut envie d'éclater de rire.

Elle suivit cependant le lent balancement de la petite médaille avant qu'Esther ne la range dans sa poche, avant de déclarer d'un ton sans appel :

- Ce sera une fille. Enfin... je crois.

Elles éclatèrent alors toutes de rire et Maureen comprit que c'était là comme un petit sketch amusant qu'Esther avait offert à ses amies. Et elle dit à Maureen :

- Elles rient, elles rient... Mais c'est très sérieux. Je ne me suis encore jamais trompée. Ou plutôt, la médaille ne se trompe jamais.

- Alors, nous verrons bien à la fin de l'été, dit Maureen en souriant.

Elles se sourirent d'un air entendu, puis toutes reprirent leur ouvrage. Elles continuèrent à papoter, se donnant des nouvelles des uns et des autres, Mary parla aussi du projet de Sam et de Mickaël dont Jenn, sa petite-fille, lui avait déjà livré bien des détails. Elle aussi se réjouissait, Maureen le comprit bien, que Sam vienne s'installer à Fort William et que Jenn ne choisisse finalement pas de le rejoindre à Glasgow.

Enfin, Mummy apporta une tarte dont il ne resta bientôt plus une miette et Maureen fit le service du thé.

- C'est un thé de Mickaël ? demanda Esther, toujours un peu curieuse.

- Oui, répondit Mummy. Celui-là s'appelle Zen.

- Dam ! Il est allé le chercher jusqu'en Chine ?

- Non, pas ! Toujours au Palais des thés, répondit Mummy. Il n'a pas besoin d'aller très loin... Il est délicieux et accompagne très bien la tarte aux pommes.

- Elle est toujours aussi fondante, Mado, soupira Maisie avec un regard gourmand. Je ne sais pas comment tu arrives à la faire aussi bonne. J'ai beau essayer, ma pâte est toujours trop sèche, trop cassante.

- C'est un secret, dit Mummy. Il n'y a que Mickaël à le connaître.

Elles se regardèrent toutes d'un air entendu, mais un peu désespéré, avant qu'Anna ne conclue :

- Il n'y a vraiment qu'avec Mickaël que tu partages tes secrets, Mado...

- Mes secrets de cuisine, oui, dit Mummy avec assurance.

Son regard pétillait et elle échangea comme un petit clin d'œil avec Maureen.

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