Chapitre 3 (troisième partie)

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Mardi 9 mai 2006

Ce mardi matin, au retour de la criée, Mickaël demanda à voir leur patron. Sam était avec lui, ce qui ne manqua pas d'étonner Harris : les deux jeunes gens étaient rarement présents tous les deux au restaurant à cette heure, Sam n'arrivant que l'après-midi, sauf nécessité.

- Bonjour à vous deux, dit-il d'emblée. Tu es tombé du lit, ce matin, Sam ?

- Oui, patron. Pour une cause un peu particulière dont on voudrait parler tous les deux avec vous...

- Pas de soucis, venez, dit-il en les précédant jusqu'à son bureau.

Ils prirent place tous les trois et Harris leur proposa un verre ou un thé. Ils choisirent tous les trois un thé, car il était encore tôt. Puis, à peine servi, Sam attaqua d'emblée :

- Patron, Mickaël et moi avons commencé à parler d'un projet. C'est moi qui en suis à l'origine, je tiens à vous le dire d'emblée. Pour Pâques, j'étais à Fort William et j'ai appris que le propriétaire d'un petit restaurant sur le port allait vendre son fonds de commerce. J'en ai aussitôt touché deux mots à Micky, car je me suis dit que ça pouvait être une bonne opportunité pour nous deux. Alors voilà, on voulait vous en parler avant toute chose.

- Bien... Ma foi, vous me surprenez sans me surprendre ! dit Harris. Je veux dire que je me doutais bien qu'un jour ou l'autre, vous voudriez vous installer tous les deux, mais je ne pensais pas que cela serait arrivé si vite !

- Je dois vous avouer que moi non plus, intervint Mickaël avant que Sam ne réponde. Je n'envisageais vraiment pas ce genre de projet avant plusieurs années, d'autant que je suis très satisfait de ce que je fais ici, de travailler pour vous et avec toute l'équipe. Je me plais vraiment ici, patron, n'en doutez pas. Et puis, avec le bébé... Ca me fait hésiter.

- Mickaël a ses arguments, j'ai les miens, reprit Sam. Le restaurateur ne vend pas très cher, même si c'est très bien situé. C'est un lieu de passage pour les touristes, il y a aussi des facilités de stationnements et c'est quasiment en plein cœur de la ville. Le hic, si on peut dire car c'est en partie ce qui explique le prix modique, c'est qu'il y a des travaux à faire. La cuisine n'est plus aux normes, la salle a besoin d'un bon rafraîchissement et la devanture aussi. Bref, ce qu'on ne mettra pas dans l'achat du fonds, il faudra l'investir dans les travaux. Mais on aura des petites mains gratuites pour nous aider, ça limitera les frais. Ca, c'est pour le côté finances. Mes autres arguments sont que ma compagne est à Fort William et comme elle me rejoint ici une semaine sur deux environ, vous le savez, elle ne peut pas chercher du travail, ni se poser vraiment et elle en a besoin. Ensuite, c'est le rêve de Micky de s'installer un jour dans les Highlands.

Harris eut un petit sourire. Il ne répondit pas sur le champ, se pencha un peu en avant et croisa les mains sur son bureau :

- J'entends bien tes arguments, Sam. Qu'attendez-vous de moi ? Hormis sur le plan administratif pour clore vos contrats dans les règles à une date encore indéterminée.

- On voudrait savoir si ça vous semble jouable, répondit le grand jeune homme maigre. Pas sur le plan financier, pour ça, on va voir avec les banques, d'autant qu'on a un peu d'argent de côté, Micky et moi. On vous demande un avis professionnel.

- Très bien, fit Harris. Alors, je vais vous dire le fond de ma pensée : je pense que vous pouvez réussir ce genre de défi, à condition de bien préparer votre installation. Mickaël a déjà une certaine réputation et vous pourrez jouer là-dessus. Mais il faut tout envisager : le nombre de couverts nécessaires pour rembourser vos emprunts, payer les charges et dégager vos salaires. Trouver des fournisseurs. Engager du personnel en nombre suffisant. Pourrez-vous tenir à deux en cuisine ? Aurez-vous besoin d'un ou deux serveurs ? Il faut aussi songer à faire un peu de publicité, surtout au début, pour aider à vous faire connaître. Si votre plan de financement tient la route, pour le reste, je ne me fais pas de soucis pour vous.

- Merci, dit Mickaël. On a rendez-vous avec deux banques jeudi matin.

- Alors, tenez-moi au courant à l'issue de ces rendez-vous et on en reparlera plus précisément. Je peux aussi vous proposer quelque chose...

Sam le fixa avec intensité. Harris poursuivit :

- Nous pourrions aller, Lisbeth et moi, durant un week-end du mois de juin à Fort William et y dîner. Je vous donnerai alors mes impressions sur le lieu, sur les éventuels travaux, même si je ne demanderai pas forcément à voir la cuisine. Si vous estimez qu'il faut tout y refaire, de toute façon, mon avis sur ce point ne vous apportera pas grand-chose.

- C'est gentil, patron. Oui, c'est vrai, dit Sam. Votre avis serait vraiment important pour nous.

- Tout à fait, renchérit Mickaël. Je vous remercie d'avance pour cette idée et je suis certain que l'avis de votre épouse sera intéressant à entendre pour nous aussi.

- Alors, je vais faire ainsi. Pour l'heure, je ne parle de votre projet qu'à Lisbeth. Dès que vous aurez plus de précisions, notamment pour votre date de départ, dites-le moi que je puisse commencer à chercher vos remplaçants.

- Vous avez déjà un nom en tête, non ? fit Sam avec un petit sourire.

- Bien sûr, répondit Harris. A ta place, je peux embaucher Jonathan. Mais il me faudra un chef. Et ça...

Il ne termina pas sa phrase, les deux jeunes hommes avaient très bien compris ce qu'il voulait dire : cela ne serait pas facile. Mickaël respecta un petit temps de silence, puis reprit :

- J'ai bien conscience, et Sam aussi, que, si ce projet aboutit, nous vous mettrons dans une situation délicate, patron.

Sam opina, laissa Mickaël poursuivre :

- Je tiens de toute façon à terminer la saison et à la terminer bien. Si ce projet démarre, cela ne se fera pas avant septembre, voire un peu plus tard. Pour l'heure, nous manquons encore de précisions. Tout va dépendre des banques, dans un premier temps. Si leur réponse est positive, nous contacterons des artisans, puis les travaux pourraient démarrer au cours de l'été. Nous devrons alors être sur place. Je pense que vous n'aurez pas à nous remplacer avant septembre.

- Ce serait difficile pour vous de suivre le chantier, de faire vos préparatifs, tout en continuant à travailler ici après les vacances, fit remarquer Harris. Cela me donne de la marge, mais il est possible aussi que j'aie besoin un peu de toi, Mickaël, pour échanger avec ton remplaçant. Pour Jonathan, cela ne posera pas de soucis, aussi dès que vous aurez une réponse des banques, dites-le moi, je le contacterai en priorité pour qu'il soit disponible et qu'il se prépare à nous rejoindre pour une date assez précise.

- Pas de soucis ! dit Sam. On vous tiendra au courant à chaque étape. Merci beaucoup. Sincèrement.

Harris sourit légèrement. Il avait bien perçu l'enthousiasme de son second, ainsi que la prudence de Mickaël. A eux de trouver leur point d'équilibre, comme ils le faisaient déjà si bien en cuisine...

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