Chapitre 2 (huitième partie)

6 minutes de lecture

Dimanche 30 avril 2006

Après un brunch vite avalé, ils repartirent ce dimanche en début d'après-midi avec Sam. Dans la voiture, ce dernier ne cessait de faire l'éloge du projet de rachat du restaurant. Maureen se rendit compte alors que cela lui tenait très à cœur.

- Imagine, Micky ! On serait tous les deux ! Et on bosserait ensemble !

- C'est déjà le cas, Sam, sourit Mickaël. Bon, je le reconnais, nous ne sommes pas que tous les deux...

- Et puis, ça simplifierait les choses, continua Sam d'un ton enthousiaste.

- Comment cela ?

- Je n'aurais plus à m'embêter à faire la route pour voir Jenn. Et elle n'aura pas à se résigner à venir vivre à Glasgow, expliqua-t-il.

- C'est sûr que pour toi, pour Jenn, ce serait mieux, répondit Mickaël. Pour nous...

- Micky, ne me dis pas que tu n'as jamais imaginé t'installer un jour à Fort William. Que tu n'aimerais pas vivre dans les Highlands.

- Oui, bien sûr, reconnut Mickaël. Et c'est aussi pour cela que je suis venu vivre à Glasgow. Ce n'est qu'à deux heures de route.

- Et bien, là, tu n'aurais plus de route du tout, dit Sam avec logique. Et je suis certain que Maureen aimerait y habiter aussi, non ?

- Cela ne me déplairait pas, Sam, répondit-elle. Mais la question n'est pas là. La question est de savoir si, financièrement, c'est jouable pour vous deux et comment vous vous organiseriez.

- T'es raisonnable, Princesse !

- Et toi, très enthousiaste ! rit-elle.

- Oui, je le reconnais, mais... je pense qu'il faut savoir saisir sa chance, ajouta-t-il d'un ton soudain sérieux.

A ces mots, Maureen et Mickaël échangèrent un regard entendu.

Maureen avait conduit une grande partie de la route, Mickaël reprit le volant avant la passe de Glencoe. Le temps était brumeux, un fin crachin tombait. Maureen doutait qu'ils puissent profiter d'un beau coucher de soleil ce soir.

Après la traversée du Loch Leven, Sam dit :

- On passe chez Mummy d'abord ? Histoire que je la salue... et tu me descendras après chez John ?

- Ok, on fait comme ça, dit Mickaël. Ca permettra à Maureen de se reposer plus vite de la route.

- Tu es fatiguée, Princesse ? s'inquiéta le grand jeune homme maigre.

- Non, ça va. Mais je suis contente d'arriver, je le reconnais.

Ils firent ainsi, Mummy était heureuse de les revoir. Elle asticota Sam deux minutes, mais celui-ci coupa vite court. Il avait hâte de retrouver Jenn, et Mickaël le conduisit rapidement jusque chez la jeune femme. A peine la voiture avait-elle quitté la cour, que Maureen et Mummy prenaient place dans la salle. Mummy avait dressé la table et un délicieux fumet émanait de la cuisine.

- Alors, ma petite, comment vas-tu ? demanda la vieille dame après avoir pris place dans son fauteuil.

- Bien, Mummy, répondit Maureen en souriant. Vous voyez... je commence à prendre des formes.

- Tu n'es pas malade ?

- Non, j'ai eu quelques nausées, mais, franchement, c'était supportable. Par contre, j'ai de sacrés coups de pompe par moment, et de plus en plus. Le midi, je fais toujours une petite sieste, les premiers temps, je ne dormais pas trop, mais là, je dois mettre le réveil, sinon, je ne parviens pas à me réveiller de moi-même. Et le soir, je ne m'attarde plus à lire... Il arrive même que je ne me rende pas compte quand Mickaël rentre dans la nuit.

- Tu fatigues peut-être aussi à rester beaucoup debout... à piétiner. Ce n'est pas bon.

Mummy avait dit cela d'un ton très sérieux. Maureen la regarda, un peu interrogative :

- Tu sais, poursuivit-elle. J'ai perdu plusieurs bébés avant d'avoir Ingrid, à cause de cela. Il fallait travailler tous les jours à la ferme, être debout du matin au soir. C'était dur. Fais attention à toi, Maureen. Si tu fatigues trop, arrête-toi avant que tu ne sois obligée de rester allongée jusqu'à la fin.

- Je suis bien suivie, Mummy, je vous rassure.

- Oui, oui, dit la vieille dame en souriant. Bon, veux-tu boire quelque chose ? Je pense que Mickaël ne s'attardera pas, mais enfin...

- A moins que Sam ne le retienne encore un peu... fit remarquer Maureen avec malice.

- Vous venez de passer deux heures à faire la route ensemble et Sam aurait encore des choses à dire ? s'étonna la vieille dame.

- C'est fort possible, dit la jeune femme. Il n'a cessé de parler que lorsqu'il tirait sur sa cigarette, quand on a fait un petit arrêt pour que Mickaël prenne le volant.

- Qu'a-t-il donc à raconter comme cela ? Je le savais bavard, mais à ce point...

- Mickaël vous en parlera, Mummy, répondit Maureen. Enfin, j'espère qu'il vous en parlera.

- Ah ?

Mummy la regarda d'un air interrogatif, ajouta aussitôt :

- Bon, je ne te pose pas plus de questions. Mais je ferai parler Mickaël. Ce n'est pas un souci, au moins ?

- Non, je ne dirais pas les choses ainsi...

**

Au cours du repas qui s'ensuivit, Mickaël expliqua à sa grand-mère l'une des raisons qui les avait fait se déplacer tous ensemble. Elle l'écouta présenter le projet de Sam, sans l'interrompre. A la fin, elle dit :

- Je peux vous aider, Mickaël. Pour acheter le fonds de commerce. Quand j'ai vendu la terre et les moutons, j'ai donné une partie de l'argent à ta mère, tu le sais.

- Oui, bien sûr, dit Mickaël. Puisque papa et maman ont acheté la maison. Et tu en as gardé un peu pour toi...

- Oui, mais pas seulement, poursuivit Mummy. Je ne l'ai pas dit à ta mère à l'époque, mais j'ai mis aussi de côté pour Véra et toi. La même somme pour chacun. Que vous puissiez l'utiliser un jour, si vous aviez besoin, pour un projet, une maison, ou un souci... On ne sait jamais. Et puis, j'ai gardé les meilleures terres, tu sais. C'est John, mon neveu, qui les exploite, et il me verse toujours une petite rente dessus. Si nécessaire, je peux toujours les lui vendre. Mais j'aimerais les garder. Vous en ferez quelque chose, peut-être, plus tard. Enfin, toujours est-il qu'il y a une somme d'argent à la banque pour toi, et que tu pourrais l'utiliser pour acheter ce restaurant. Cela ne couvrira certainement pas toute ta part, mais ce serait déjà un apport.

- En effet. Je ne m'attendais pas à cela, Mummy. Merci, dit Mickaël, surpris de la nouvelle et touché.

- Tu n'as pas à me remercier. C'est normal de faire ce genre de choses. Et, dans un premier temps, vous n'auriez pas à vous préoccuper de trouver un logement. Vous pourriez habiter ici et chercher tranquillement, sans pression, un lieu qui vous conviendrait à tous les deux.

Mickaël hocha la tête. Maureen commençait à réfléchir de son côté, à imaginer les choses. Elle eut un petit sourire qui n'échappa ni à Mummy, ni à Mickaël. Il la regarda un peu interrogateur, alors elle dit :

- Le bébé pourrait naître ici...

- Si elle ou lui fait comme son père... commença Mummy.

- Tu vas raconter ça à Maureen ? fit Mickaël.

- Je me gênerais, sourit sa grand-mère.

- Ca fait partie des légendes familiales, rétorqua-t-il. Je te l'ai toujours dit : je ne voulais pas naître ailleurs, alors j'ai tout fait pour que cela arrive ici.

Ils finirent le repas tranquillement, puis Maureen alla s'allonger pour une sieste. Mickaël aida sa grand-mère à ranger, puis à préparer une soupe pour le repas du soir. Il rejoignit la jeune femme peu après, elle dormait profondément. Il s'allongea près d'elle, l'entourant de ses bras et caressant doucement son ventre. Elle vint se blottir contre lui sans se réveiller.

Il fut le premier à sortir du sommeil, après une courte sieste. Il retrouva sa grand-mère au salon et ils parlèrent encore sérieusement de ce projet. Mummy trouvait que c'était une bonne idée, qu'il fallait en effet qu'il rencontre d'abord le restaurateur et surtout qu'il voie les lieux. Sam avait déjà convenu d'un rendez-vous en toute fin d'après-midi, avant que le service ne commence. Après le thé et une part de tarte aux pommes, Mickaël passa chercher Sam et ils se rendirent tous les deux sur le port.

**

Mickaël devait bien le reconnaître, le restaurant était bien situé. Face à la mer, il offrait une belle vue sur le port et le Loch Linnhe. C'était aussi un lieu de passage, assez fréquenté par les touristes. Il y avait des travaux à faire, comme Sam le lui avait dit et comme lui-même l'imaginait bien. Il fallait refaire toute la décoration intérieure, et aussi redonner un coup de peinture à l'extérieur. Sam faisait remarquer qu'ainsi, cela ferait comprendre d'emblée qu'il y avait un changement de propriétaire. Enfin, en cuisine, au premier coup d'œil, Mickaël se dit qu'il fallait tout réagencer et mettre aux normes. Le patron en était conscient, lui-même n'avait pas voulu se lancer dans de grands travaux sachant qu'il arrivait en fin de carrière et qu'il avait ses habitudes. Il accepta de discuter d'un rachat possible avec Mickaël et Sam s'ils étaient intéressés. Le premier comprit qu'il allait leur falloir rapidement mettre Harris au courant.

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