Chapitre 5 (deuxième partie)

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Lundi 31 juillet 2006

Quand il arriva à Fort William, Mickaël eut la surprise de ne trouver que sa grand-mère et Maureen. Véra et Jimmy étaient parvenus à décider leur fille à aller à la plage, ne sachant pas à quelle heure son tonton arriverait. Les deux femmes étaient au jardin et discutaient tranquillement quand elles entendirent la camionnette se garer. Willy avait à peine coupé le moteur que Mickaël avait déjà ouvert sa porte et l'appel de sa grand-mère, ce "on est là !" le fit obliquer directement vers le jardin.

Maureen était à peine levée qu'il la prenait déjà dans ses bras, l'enlaçant et la serrant fort contre lui.

- Il a sacrément profité ! dit-il avant de l'embrasser.

- Il n'a que cela à faire… répondit Maureen quand il la lâcha.

Elle se recula un peu, bras tendus pour tenir les mains du jeune homme. Il la regardait, énamouré et émerveillé. Un grand sourire éclairait le visage de Maureen, heureuse de le retrouver enfin.

- Bonjour, Mummy !

La voix gaie de William les fit se retourner et déjà le jeune homme souriant s'avançait vers Mummy pour l'embrasser sur ses joues de pomme rouge.

- Bonjour, William. Tout va bien ?

- En pleine forme ! Mais content d'arriver. Tu vas bien, Mummy ? demanda-t-il.

- Très bien, tu vois, répondit-elle. Je me porte comme un charme. Il ne me viendrait pas à l'idée d'être malade maintenant que je vais être à nouveau arrière-grand-mère. Ce sont des choses qui ne se font pas.

William rit, puis se dirigea vers Maureen pour la saluer alors que Mickaël l'abandonnait pour embrasser sa grand-mère à son tour.

- Dis-moi au moins que c'est Will qui a conduit et pas toi, dit-elle d'un ton faussement sérieux.

- C'est lui, Mummy, répondit-il. Toute la route. Il n'a pas voulu que je prenne le volant sous prétexte que je risquais de manquer des virages. Comme si j'étais imprudent en conduisant…

- Hum... mais j'imagine que tu avais hâte d'arriver !

- Oui ! Et je vois que tu as bien poursuivi la tâche que je t'avais confiée. Maureen est rayonnante, sourit-il en reprenant la jeune femme dans ses bras.

- C'est surtout parce que tu arrives, moi, je n'y suis pour rien... fit remarquer modestement sa grand-mère.

- Mummy ! gronda Maureen en riant. Vous m'avez bichonnée… Je n'aurais pu être mieux !

- Bon, s'étonna Mickaël, vous n'êtes que toutes les deux ?

- La famille McNey est partie à la plage…

- Ah, ok... Je me disais aussi... J'étais étonné de ne pas avoir déjà une chipie dans les jambes ! Elle a été sage ? demanda-t-il.

- Bien entendu. Elle a été adorable quand elle est restée avec nous, répondit Maureen.

- Maman m'a raconté, oui… Et j'imagine bien la crise qu'elle a faite quand ils sont repartis…

- Elle voulait juste rester, expliqua Mummy. C'était tellement stupide de la faire rentrer à Glasgow pour trois ou quatre jours… Enfin, c'est passé et elle est enchantée d'être ici. Cette petite aime beaucoup les Highlands elle aussi, ajouta-t-elle avec malice.

- A croire que cela se transmet de génération en génération… dit Mickaël en caressant l'air de rien le ventre de Maureen.

- Bon, cesse de dire n'importe quoi, continua Mummy. Je suis certaine que Will est partant pour une bonne bière !

- Ca, Mummy, ce ne serait pas de refus ! Volontiers ! répondit celui-ci avec un grand sourire.

- Et une petite part de tarte aux fraises ? ajouta la vieille dame.

- Pourquoi une petite ? dit-il d'un ton moqueur.

- Ne me dis pas que tu es devenu plus gourmand que Sam ?

- Ah, ça non ! Je ne peux pas rivaliser avec lui… Cela dit, cela fait bien longtemps que je n'en ai pas mangé… répondit-il en souriant.

Quelques minutes plus tard, ils avaient pris place au jardin, Mickaël assis sur le banc aux côtés de Maureen, William et Mummy dans des fauteuils, celui de la vieille dame agrémenté d'un bon coussin. Une tarte trônait sur la table ronde et les bières suintaient sur les verres. Mickaël avait passé son bras par-dessus l'épaule de Maureen et caressait doucement ses cheveux, y déposant régulièrement de petits baisers. Elle s'était appuyée contre lui, heureuse de le retrouver enfin.

**

- Bon, c'est pas le tout, dit William, mais il y a une camionnette à décharger... On va commencer avec les cartons, le lit, on le sortira avec Jimmy.

- Tu as ramené des meubles ? s'étonna Mummy.

- Mon lit est quasiment neuf, Mummy, répondit Mickaël. On va le garder pour nous, et le mien, l'actuel ici, remplacera celui de la chambre de Véra. Jimmy se plaint à chaque fois qu'il vient dormir ici...

- Tu verras ça avec ta sœur. Tu as ramené beaucoup d'autres choses ?

- La cuisine était aménagée, je la laisse telle quelle, expliqua-t-il. Le canapé avait vécu, il a fini à la décharge. Et à part la chaîne HI-FI et le meuble dans le salon... La télé, Willy va la récupérer. De toute façon, je ne la regardais jamais. On a démonté les étagères de la chambre, ça nous resservira peut-être...

- Tu as mis en vente ? demanda Maureen.

- Non, parce que j'ai trouvé une locataire, répondit-il.

- Ah bon ?

Mummy et Maureen avaient parlé en même temps. William souriait doucement.

- Oui. Shana, la copine de Will, payait horriblement cher un studio minable. En attendant qu'elle trouve du boulot à Callander pour le rejoindre, elle emménagera chez moi. Elle me paiera l'équivalent de ce que je rembourse chaque mois. Ca me laisse du temps pour organiser la vente, expliqua-t-il.

- Je vois que tout est bien combiné... fit remarquer la vieille dame.

- C'est un peu le hasard, Mummy, intervint William. Je suis passé la semaine dernière avec elle chez Micky et en discutant... Shana n'est pas du genre à hésiter face à une bonne opportunité.

- La preuve, elle est avec toi ! lança Mickaël.

- Si Sam était là...

- Il aurait dit la même chose !

Maureen rit. Elle était contente de cet arrangement. Organiser la vente de l'appartement aurait obligé Mickaël à retourner à Glasgow, c'étaient des démarches en plus à effectuer alors qu'il allait être bien occupé ici. Reporter cette vente de quelques mois pouvait le soulager d'un souci.

**

Ils avaient à peine commencé à vider la camionnette, que Véra, Jimmy et Léony arrivèrent. La petite fille sauta dans les bras de son tonton, embrassa Will sur les deux joues. Jimmy comprit vite qu'il allait être embauché.

- Tu repars demain, William ? demanda-t-il alors que le jeune homme lui passait un carton sur lequel il était écrit "fragile whiskys".

- Oui, pour filer le coup de main à Sam, répondit-il. Lui et Jenn nous ont aidés à charger ce matin chez Micky, et j'ai eu droit à une supplique de Jenn me demandant de revenir expressément dès demain... De toute façon, il faut que je ramène la camionnette à mon père demain midi. Il a des livraisons à faire dans l'après-midi. Mais bon, je reviens avec Sam en fin de semaine...

- Je n'ose même pas imaginer le déménagement de Sam, intervint Véra qui aidait elle aussi en prenant un carton qu'elle devina destiné à la cuisine puisqu'il était écrit "thés" dessus.

- J'avoue très égoïstement que je suis bien content d'être occupé ici, dit Mickaël.

- Tu n'as pas proposé ton aide ? demanda encore sa sœur.

- Si, répondit-il. Mais j'ai essuyé un refus. Ou plutôt deux. Sam m'a dit qu'il n'avait pas besoin de moi... et Jenn m'a dit que j'avais mieux à faire ici, à m'occuper de Maureen. De toute façon, avec l'écho vendredi...

- Ouais, ça, on sait... dit Jimmy.

- On sait surtout qu'on ne saura rien, laissa tomber Véra avec un soupir à fendre l'âme.

Dans la maison, pendant ce temps, Léony aidait Maureen à vider les premiers cartons. C'était assez facile puisqu'il s'agissait des vêtements de Mickaël. Il y avait largement de la place dans l'armoire de sa chambre, Maureen avait veillé à ne pas prendre toutes les étagères avec ses propres affaires. Dans la cuisine, Mummy fronçait les sourcils en se demandant bien où elle allait ranger tout le "bazar" ramené par son petit-fils. Celui-ci entra dans la pièce en portant un nouveau carton de vaisselle et dit :

- Ne t'occupe de rien, Mummy. J'ai ramené toute ma vaisselle, mais il y a une partie qui ira au restaurant. Cependant... je vais garder des choses ici aussi. Des couteaux, notamment. Et quelques bricoles, pas grand-chose. Il me restait surtout des provisions, tiens, ce sont ces deux cartons, là. Le reste, on va mettre dans la buanderie et j'emmènerai cela au restaurant quand ce sera possible d'y stocker des choses.

- Tu me rassures un peu, dit la vieille dame. Avec Maureen, on a fait de la place pour tes boîtes de thé. Je ne pensais pas que tu aurais ramené autant de choses. Tu aurais dû en laisser à ta mère.

- Je l'ai fait. Bon, où est Maureen ? demanda-t-il.

- Dans la chambre, répondit sa grand-mère. La pitchoune l'aide. J'avais suggéré que vous changiez de pièce et que vous preniez la chambre d'en face qui est plus grande. Surtout si tu inverses le lit...

- Non, on garde ma chambre. Ca ira. C'est dans celle du bébé qu'on aura le plus besoin de place.

- On a fait un petit tour avec Maureen au magasin. Elle a repéré deux ou trois choses dont vous allez avoir besoin, dit-elle encore.

- Ok. J'irai demain avec elle.

Et il ressortit vers le couloir, laissant Mummy assez dubitative quant au "pas grand-chose" qu'elle avait à ranger dans ses placards...

**

- Pffiu... J'ai cru que la pitchoune ne me lâcherait jamais... soupira Mickaël en entrant dans la chambre.

Maureen le regarda, amusée. Elle était déjà étendue dans le lit, prête à dormir.

- Moi, je me demandais si j'allais avoir un lit pour dormir ce soir ou pas... Avec toutes les discussions que cela a occasionné... soupira-t-elle avec une pointe de regrets dans la voix.

- Vraiment ? demanda Mickaël alors qu'il ôtait rapidement son t-shirt.

- Tu ne t'es pas rendu compte ? s'étonna la jeune femme. Entre Mummy qui tient à ce qu'on dorme en face, ton beau-frère qui était ravi de récupérer un vrai lit, ta sœur qui ne voulait rien entendre et toi qui voulais installer le tien dès aujourd'hui, ici...

Mickaël s'approcha du lit, s'appuyant sur les avant-bras, de chaque côté des épaules de la jeune femme et dit très sérieusement en la fixant droit dans les yeux :

- J'ai juste voulu faire le plus simple et le plus efficace possible. Je suis désolé si cela t'a occasionné de la fatigue et du souci. Ca va ?

- Oui, ça va, répondit-elle d'une voix un peu émue. Juste un peu fatiguée de cette journée. J'avais hâte que tu arrives, j'étais en forme et là, je me sens un peu "down".

- On se reposera demain, dit-il d'un ton rassurant. Et je ferai la leçon à ma sœur. Ca fait du monde, aussi, d'un coup. Tu étais habituée à être juste avec Mummy...

- C'est vrai. Mais je sais que tu vas avoir besoin d'aide, et Sam aussi, durant les prochaines semaines. Et Jimmy te sera précieux, fit remarquer Maureen.

- Tout le monde nous sera utile, à sa façon. Mummy pour nourrir tout le monde, maman pour l'aider, papa, Jimmy et Véra pour donner le coup de main au restaurant, expliqua-t-il.

- J'essaye d'imaginer ton père avec un pinceau... sourit-elle.

- Il n'a pas l'air comme ça, mais il sera très efficace. Et, au pire, je lui confierai Léony.

- Ce n'est pas forcément la plus fatigante, tu sais. Les quelques jours que nous avons passés avec elle, juste toutes les trois, ça a été super.

- Ouais, elle fait un peu sa capricieuse parce que ses parents sont là. Il paraît que c'est toujours comme ça, dit-il avec malice en déposant un baiser sur le ventre rond.

- On y aura droit nous aussi, plus tard, dit Maureen d'un ton amusé.

- Forcément. Il bouge beaucoup ? demanda-t-il en caressant doucement le ventre rond.

- Il commence à bouger beaucoup... la nuit, répondit-elle avec tendresse en posant sa main sur celle de Mickaël. Je dors encore assez bien. Mais j'ai besoin de la sieste de l'après-midi, ça... Et je dois reconnaître que tout le monde a fait son possible pour que je la fasse sans être dérangée. Véra emmenait Léony très tôt à la plage, juste après le repas, ton beau-frère aidait Mummy au jardin, sans utiliser d'outils qui font du bruit... Non, vraiment, j'ai été bichonnée.

- J'ai pu le constater en arrivant, sourit Mickaël.

Il se redressa, finit d'enlever ses vêtements et la rejoignit en l'entourant de ses bras. Tout en passant une main dans ses cheveux, il poursuivit :

- J'étais curieux de voir comment tu avais pris... Tu es bien ronde, maintenant.

Maureen souleva le bas de la chemise de nuit ample qu'elle portait désormais pour la nuit et lui montra son ventre. Mickaël s'exclama :

- Tu as le nombril qui ressort !

- Oui, rit-elle. Ca fait une bonne semaine... Ca fait bizarre, hein ? Tiens... il bouge...

Mickaël déplaça sa main sur le ventre de Maureen, appuya un peu sur le côté. Un petit coup se fit sentir sous sa paume, il laissa retomber son visage contre l'épaule de Maureen, l'enfouissant dans ses cheveux. Elle perçut son émotion.

- Ca m'a paru tellement long, ces trois semaines sans vous deux... souffla-t-il à son oreille. J'avais l'impression de manquer plein de choses...

- Maintenant, tu es avec nous. Et tu n'as pas manqué beaucoup... à part à nous...

Elle prit son visage entre ses mains, pour l'écarter un peu de son cou et le regarder. Puis elle l'attira vers elle et l'embrassa longuement. Sous la main de Mickaël, d'autres petits coups se succédaient, comme pour approuver les dires de la jeune femme.

Quand Mickaël rompit leur baiser, il regarda Maureen avec gravité, puis dit :

- Tu as des cernes, ce soir. Dors...

Il s'installa sur le côté, elle vint se blottir contre lui, son ventre alourdi contre celui de Mickaël. Il l'entoura de son bras, le coude comme soutenant sa rondeur. De l'autre main, il lui caressait doucement le front, les cheveux. Maureen ferma les yeux, heureuse de retrouver sa présence, sa tendresse, sa chaleur, son odeur, tout ce qui était lui. Et, sans s'en rendre compte, elle sombra dans le sommeil.

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