18/ TRAHISONS : CLÉMENT

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Son regard se durcit encore lorsqu’elle se poste juste devant Lana qui ne recule pas. Elles sont nez à nez. Je suis prêt à intervenir si elle lève un seul doigt en direction de ma femme. Elle parle d’une voix, très calme, mais profondément sourde.

- Je t’avais prévenue ; tu n’as visiblement pas bien compris qui nous sommes puisque tu n’as pas écouté mon conseil.

Je sens la rage l’animer, elle ne va plus se contenir longtemps. Lana est beaucoup plus forte qu’avant, quelque chose a changé en elle, elle est différente. Néanmoins, je me rapproche pour pouvoir les séparer le cas échéant.

Un vacarme retentissant nous fait tous reculer et nous tourner vers la baie vitrée qui vient de voler en éclat. L’épais rideau bouge et laisse apparaitre un homme. Il est couvert de sang, de la tête aux pieds. Ses vêtements en sont maculés.

Un malaforme ? Personne ne réagit, pourquoi ?! Non, c’est au contraire un tueur de traqueurs ! Ce n’est pas un monstre !

Il survole tout le monde du regard, s’arrête sur ma femme, puis sur moi. J’ai l’impression qu’il est curieux de me connaitre mais désintéressé en même temps. Au moment où ses yeux me quittent pour retourner se poser sur Lana, je décèle une pointe de dédain, ou de haine. C’est ridicule, je ne connais pas ce type !

Elle vient de l’appeler Matt ! Je comprends mieux. C’est le frère des deux autres.

Je me reconcentre sur ce qu’il raconte quand je l’entends dire qu’il a vidé les humains de la plage de leur sang. Mais de quoi parle-t-il ?! Lana à l’air déçu, Sandrine profondément dégoutée. Clyselle et Bob sont comme moi, ils n’en croient pas leurs oreilles. Les enfants eux, sont terrifiés.

Il passe devant moi avec un regard assassin et s’éloigne dans un couloir. Tant mieux. Mais… Que fait Lana ?! Elle ne va pas le suivre ! Je n’ai pas le temps d’esquisser le moindre geste pour les rejoindre que Sandrine m’attrape doucement le bras.

- Laisse-la faire. Elle seule pourra le convaincre.

- Tu peux m’expliquer ce qu’il se passe ? Qui sont ces gens que tu nommes démons, ce que voulais dire ce type et pourquoi ma femme est la seule personne ici présente à pouvoir lui parler ?! Et aussi pourquoi tu voulais le tuer alors que tu as besoin de leur aide ?! Je ne comprends rien !

- Tu es Clément, c’est bien ça ? Je vais tout te raconter, dans le moindre détail. Mais assieds-toi, je t’en prie, tu vas avoir des surprises.

- Arrête Carole ! Si Matt reprends ses esprits, nous nous rassemblerons pour discuter. Choses que visiblement vous n’avez pas pris le temps de faire quand vous vous êtes retrouvés. Nous irons à l’essentiel, le reste ne nous regarde pas.

- Tu trouves que cela ne nous regarde pas ?!

- Carole, s’il te plait. Sois patiente.

Lana nous rejoint, seule et mal à l’aise face à nos expressions interrogatives.

- Il… Il est en colère. Mais il a écouté ce que je lui disais. J’ignore si cela changera quelque chose, mais je pense que le fait qu’il n’ait pas tenté de m’égorger est une preuve que tout n’est pas encore perdu.

- Mais de quoi tu parles ?!

- Il te doit l’état dans lequel il est !!!

Avant que je ne puisse réagir, Carole se jette sur Lana, la renverse, la cloue au sol. On entend tous sa tête cogner. Toujours avant que j’ai le temps d’intervenir, un courant d’air m’oblige à faire quelque pas en arrière. Quand mon équilibre revient, je vois la folle allongée sur le carrelage, dans les morceaux de verre, devant l’ex baie vitrée, Matt agenouillée sur elle. D’une main, il la maintient dans sa position. J’aperçois leurs visages ; ils sont face à face, luttant dans un duel de regards.

Lana s’est assise. Je l’aide à se relever. Elle va avoir une grosse bosse à la tête ; on va devoir surveiller ses réactions. Au moindre signe anormal, Sandrine pourra l’aider. C’est une sorcière après tout. Et si les habitants de cette maison étaient bien des démons, des vampires ?! Non, impossible. Pourtant…

Les deux autres se sont redressés, eux aussi.

- Je vais me rafraichir. Puis j’écouterai ce que vous avez à me dire et je déciderai ensuite si je vous aide. Car, je dois avouer que je me suis lassé d’aider les gens ; pour ce que cela me rapporte…

Il repasse la baie vitrée. Ouf, je crois que cet homme est plus dangereux encore que les traqueurs. Lana, non ! Elle se précipite à sa suite encore une fois !

Elle revient vite, me prend la main et m’entraîne dans le couloir. En bas d’un escalier, elle m’ordonne de ne surtout pas regarder les tableaux. Nous traversons de nombreux couloirs. J’ai l’impression que ce sont toujours les mêmes, mais les pierres au sol ou aux murs sont différentes et les portes disposées d’une autre manière. Enfin, elle s’arrête devant l’une d’entre elles.

- C’est ici que je me suis entraînée ; en grande partie. C’est Matt qui m’a enseigné. Ici et dans un champ, et aussi dans une maison voisine. Il est très fort.

- Je ne sais pas quoi penser d’eux. Une idée m’est venue, mais je n’arrive pas à y croire ; on dirait des vampires.

- Tu as raison, enfin, presque. Ce sont des enfants de vampires, des dhampires. Mais tu auras toutes les explications tout à l’heure. Pour en revenir à Matt, il n’est pas le monstre que tu crois. J’ai ma part de responsabilités dans son état d’aujourd’hui. Carole a raison.

Je la sens mal à l’aise, et je n’en mène pas large moi non plus. Je crois avoir saisis où elle veut en venir et on n’a pas besoin de ça ; surtout en ce moment ; on a d’autres soucis. Je comprends mieux les regards désagréables de ce type maintenant. J’aime ma femme, mais je me demande bien comment elle a réussi à mettre un vampire à ses pieds !

- Je ne suis pas sure de comprendre. Et j’en ai peur aussi.

- Il y a pourtant certaines choses que tu ne dois pas ignorer. Au tout début, nous nous disputions sans cesse car il m’empêchait de partir à votre recherche ; il m’empêchait d’aller me faire dévorer par ces créatures. Il m’a aidée à muscler mon corps, et appris à me battre. J’ai commis une erreur une fois qui a failli lui couter la vie. Pourtant il a continué à m’entrainer et m’a accompagnée partout où j’avais l’espoir de vous trouver. Il faut que tu comprennes que nous avons passé beaucoup de temps ensemble, seuls. Et que ça crée des liens. Nous avons fini par mieux nous accepter avec nos différences. Jusqu’à ce que nous retrouvions les enfants. Il m’a laissée récupérer ma vie.

Une question me torture, mais ça ne sert à rien de la poser car au fond de moi je connais la réponse. Les regards qu’il a posé sur nous, ses paroles, et cette conversation me reviennent à l’esprit et ne laissent plus aucune place aux doutes. Mon monde s’écroule encore une fois. Et pour une nouvelle raison. La première m’a provoqué peur et terreur, mais celle-ci lacère mon cœur. Pourrai-je pardonner ? Aurai-je la possibilité de rivaliser ? Lana aura-t-elle la force de lui résister et de faire le bon choix ? Je dois tout faire pour ça.

- Sa toilette doit être terminée. Nous devrions aller les rejoindre ; nous sommes plusieurs à avoir encore beaucoup de zones d’ombre et ils doivent nous attendre. Sandrine a des choses à dire, elle aussi.

Les deux frères et la sœur sont adossés contre un mur, et nous autres, profitons des canapés. Je suis près de ma femme, un bras autour de ses épaules. Ainsi propre et bien habillé, je comprends mieux que Lana se soit laissé amadouer par l’autre type. C’est un bel homme…

Carole semble s’ennuyer et surtout être contre l’idée des révélations à venir.

C’est Jonathan qui prend la parole.

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