Perdition

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Edward n'avait plus la notion de temps, il alternait les périodes de conscience et d'absence, désormais, les semaines et les mois s'écoulaient trop vite. La dernière fois, qu'il avait ouvert sa boîte aux lettres, un flot de courrier et de publicité s'en était échappé. Avec un détachement anormal, il avait découvert un recommandé lui annonçant son licenciement pour absences prolongées. Ed avait trouvé la décision de son employeur justifiée, car il n'était plus en mesure de travailler. Et puis sans lui, le monde continuait de tourner, les prélèvements bancaires s'additionnaient, mais ça ne l'inquiétait pas vraiment, car il avait mis toutes ses économies sur son compte courant. À ce rythme, il pourra tenir plus d'un an ! De temps à autre, en jouant à l'enfant modèle, il téléphonait à ses parents pour prendre de leurs nouvelles et les rassurer. Il leur racontait qu'il avait pris du galon et qu'il était envoyé en déplacements aux quatre coins de France sur des chantiers. Leur mentir, était difficile au départ puis c'était devenu la routine.

***

Hagard, Ed déambulait dans les rues d'une ville, il ne savait pas où il se trouvait. En prêtant une attention particulière à son entourage, le jeune homme essayait d'obtenir des indices sur sa localisation. Les gens ne parlaient pas français, il ne comprenait rien à rien, c'était ni de l'anglais, ni de l'espagnol. Les panneaux de signalisation arboraient des sigles étranges qui néanmoins lui paraissaient familiers. Mais oui ! Il les avait déjà vu au lycée pendant les cours de mathématique, c'était des lettres de l'alphabet Grec.

Avide de liberté, le jeune homme marcha sans s'arrêter. Il contemplait la nature et les constructions humaines. Son regard s'attarda sur un oiseau qui virevoltait en direction d'un olivier. Ce petit être de plumes, arborait des couleurs chatoyantes et il chantait formidablement bien. L'appel de la pierre vint gâcher cet instant de joie.

Exaspéré, Ed se mit à courir, il avait envie de fuir et profiter de sa vie. Bordel ! Il lui restait encore tant à accomplir. Jour après jour, happé par un quotidien banal et ennuyeux, il avait mis des projets de côté. C'était con parce qu'avec un peu d'organisation, de temps et de rigueur, il aurait pu faire des merveilles. Rageur, il poussa sur ses jambes aussi fort que possible pour accélérer sa foulée. Son souffle devint court, son cœur s'emballa et sa gorge le brûla, quel plaisir d'être lucide. Malgré la culpabilité et les remords, ces courts instants de répits étaient magiques. En sentant le pouvoir de la pierre s'insinuer en lui, Ed songea à Marianne et Gisèle ! Combien de temps tiendra-t-il ainsi ? Peut-être que son dernier voyage était venu ? En tout cas, il l'espérait de tout cœur, car les réveils étaient de plus en plus éprouvants. Impuissant, il découvrait à chaque fois l'ampleur de ses méfaits. Refusant de sombrer, le jeune homme redoubla d'efforts en traversant une ruelle, puis brutalement, il bascula dans le néant. Privé de support ses vêtements voltigèrent avant de s'effondrer au sol. Affairé, les badauds ne prêtèrent pas attention à la scène. Il y eu juste un bambin qui tira sa maman par la manche en criant :

— Mama, le m'sieur a disparu !

Bien évidement, il ne fut pas pris au sérieux ! Dans ce monde rationnel, qui serait prêt à le croire ?

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