Chapitre 7 - Tyran et Justice (4/4)

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Denita avait devancé la petite fille et était retourné la première dans la salle principale. Sylfan discutait avec un aristocrate Taeil presque aussi gras que lui. Son visage était rouge et ruisselait de sueur. Il avait l'air complètement affolé et faisait de grands mouvements avec ses bras.

— Les pilleurs sont arrivés Sylfan ! Leur offensive est plus forte que la dernière fois, ils ont saccagé toute ma villa, j'ai failli y rester.

Sylfan écarquilla les yeux devant cettenouvelle. L'arrivée des pilleurs semblait chambouler tout ses plans.

— Mes esclaves ont donc bien fait de sonner l'alerte, dit-il en reprenant un air impassible, nous devons partir, et au plus vite.

Denita regarda l'aristocrate près de Sylfan et son visage sembla familié. Un flash de quelques secondes fit tituber la Swatrozi. Elle venait de le reconnaître.

Le Taeil devant elle était l'esclavagiste de ses parents. Son corps se mit à bouillonner en le voyant. L'homme se retourna et croisa le regard de la jeune femme. Il dut également la reconnaître car il détala aussitôt vers le couloir opposé au sien. Denita tenta de le courser, le reste du groupe venant de la rejoindre dans la salle, sans vraiment comprendre la situation, mais Sylfan gueula un « Abattez-les ! » à ses hommes qui leur barrèrent la route. Ces derniers saisirent leurs armes et commencèrent à viser. Mais Denita, la rage au ventre et la colère lui montant à la tête, n'allait pas laisser partir aussi facilement le bourreau qui avait détruit son enfance. D'un coup de pied, elle fit voler le pistolet de l'un des gardes et le récupéra de sa main droite. En un instant, elle avait abattu de deux balles les gardes qui menaçaient ses coéquipiers. La Swatrozi envoya son talon dans la tempe de celui qu'elle avait désarmé, le couchant à terre.

La petite Karin s'était réfugiée dans un coin de la salle et tremblait de peur. L'un des derniers soldats tira sur la Swatrozi qui liquéfia son bras avant que la balle ne l'atteigne. Il reçut un tir dans la tête en guise de réponse et s'effondra.

Entendant des coups de feu à l'extérieur de la maison, Denita poursuivit son chemin à toute vitesse, bien décidée à rattraper le Taeil et à le faire payer. Dans son dos, elle entendit Bergins dire à la petite esclave de venir avec eux, de ne pas rester là parce que c'était dangereux. Mais celle-ci était trop apeurée pour bouger. Un coup de feu retentit et la Karin hurla. Son cri résonna dans le couloir.

Denita finit par trouver une salle qui se révéla être un second hangar caché. Un dispositif biométrique était disposé sur le mur, mais la porte avait déjà été ouverte. La Swatrozi entendit des réacteurs de navette se déclencher. Elle s'activa et trouva un vaisseau de taille moyenne qui flottait au dessus du sol, prêt à partir. Sylfan allait monter pour rejoindre le Taeil qui se trouvait sur la passerelle hors d'atteinte. La Swatrozi arrêta l'aristocrate d'une balle dans le crâne. Alors qu'il était en train de grimper, il lâcha soudainement prise et s'effondra sur le sol.

Le Taeil sursauta et hurla au pilote de se dépêcher de tout fermer pour le décollage. Une partie du plafond s'était déjà ouverte pour permettre au vaisseau de partir. Denita courut mais la passerelle commençait déjà à se rétracter. Elle sut qu'elle ne pourrait pas prendre ce chemin et elle profita du virage de la navette pour sauter sur l'arrière.

Avec des mouvements discrets et précis, elle s'inséra d'un coup dans l'un des réacteurs qui n'avait pas encore commencé à chauffer. Elle se cacha dans un coin entre les deux étages de la navette et attendit le décollage de celle-ci. Le vaisseau ne tarda pas et des secousses indiquèrent bientôt à la Swatrozi qu'elle quittait cette planète désertique de malheur.

Elle eut une petite pensée pour son équipe restée à terre, mais elle n'y pouvait rien : La petite fille en elle avait une vengeance à assouvir.

Sven finit par défoncer la porte avec son fusil et réussit à entrer dans la villa. Toutefois, il n'y trouva pas ce qu'il cherchait. Les gardes étaient déjà morts et dispersés un peu partout dans l'immense salle, et seule une petite fille bougeait encore. Celle-ci avait été touchée par une balle dans la jambe et sanglotait sur le sol, la cuisse en sang. Sven s'approcha d'elle calmement.

— Petite, sais-tu où se trouve le gros aristocrate qui habite ici ?

— Je ne sais pas ! Hoqueta la fille entre deux sanglots, je n'ai rien vu, j'avais trop peur !

Son visage était mouillé de larmes tandis qu'elle essayait tant bien que mal de stopper l'hémorragie avec sa main, sans succès.

— Je pense qu'elle est encore sous le choc, dit Rupert, il y a eu des combats ici également.

— Pas avec mes hommes en tout cas, répliqua Sven.

— Peu importe qui était là avant nous, les aristocrates ont disparu. Allons chercher le gros poisson que nous sommes venus pêcher.

Sven acquiesça et tourna les talons. Après un moment d'hésitation, il arracha un bout de sa tunique et la noua autour de la jambe de la jeune fille.

— Ça marchera mieux comme ça, lui dit-il avec un sourire.

La fillette lui rendit difficilement son sourire entre deux grimaces de douleur et continua de masser sa cuisse.

Le groupe sortit de la maison et reprit la route en direction de la tour du Parfumeur. Cette tour qu'il avait construite de ses propres mains. Qu'ils avaient tous construits. Il était normal qu'ils la récupèrent.

Le chemin vers la Grande Place fit remonter des souvenirs à l'Humain. Lui et ses coéquipiers avaient dû faire un nombre incalculable d'aller-retour entre la carrière non loin de la ville et la place afin d'y transporter les pierres et de les assembler une par une. Un travail long et fatiguant, qui leur semblait pourtant nécessaire à l'époque.

Il avait été lui aussi, comme beaucoup d'autres, dupé par ce vent de changement qu'annonçait le Parfumeur. Ses discours mielleux et sa prestance lui avait valu un grand succès. Mais Sven n'avait pas mis longtemps avant de se rendre compte que les promesses de cet homme ne valait rien.

Il avait vu, lui, sa juste valeur, ses secrets. Il savait que le Parfumeur n'était qu'un malin qui avait de l'esprit pour faire tourner les têtes, mais que sa folie des grandeurs ne faisait avancer en rien la situation précaire du peuple.

Sven avait donc choisi de partir, de s'exiler, car il n'avait pas les moyens de combattre l'influence du Parfumeur.

Mais maintenant il sentait le vent tourner. Le destin lui réservait peut-être une meilleure fin que celle de finir sa vie dans un désert.

Le groupe de pilleurs avait atteint la Grande Place et arriva au pied de la tour. L'ayant construit, Sven connaissait cette dernière par coeur. L'Humain savait qu'il allait être désavantagé car, pour arriver au sommet, il lui fallait prendre les escaliers au pied de la tour.

Et avec le grabuge qu'ils avaient fait en ville, ceux-ci étaient sûrement bien gardés à l'heure actuelle.

Il tendit l'oreille près de la porte d'entrée mais n'entendit rien. Il décida donc de toquer. A sa grande surprise, un garde lui ouvrit.

— Coucou, fit Sven en tirant une balle dans la tête du garde, entre les deux yeux.

Il rechargea son fusil et indiqua à son groupe de le suivre. Ils grimpèrent les marches quatre à quatre, abattant à vue tous ceux qu'ils croisèrent sur leur chemin, garde ou non. Pour Sven, mieux valait éviter le pire et ne laisser aucune trace de leur passage.

Après une spirale d'escaliers interminable, le groupe finit par atteindre la boule au sommet de laquelle habitait le Parfumeur. Ils trouvèrent celui-ci dans une grande salle, en compagnie de plusieurs femmes dénudées. Il avait toujours de la peinture sur le visage, comme à son habitude, et une expression figée. Sven se doutait toutefois qu'il devait être surpris de leur arrivée si soudaine.

Ce n'était pas le cas.

— Bonjour Sven, Rupert, les autres, dit le Parfumeur d'un ton très calme, je vous attendais.

Sven sentit ses coéquipiers, dont le gouverneur de la capitale ne connaissait pas les noms malgré leur labeur pour construire sa tour, bouillonner derrière lui. L'Humain pointa son fusil presque automatiquement vers le Parfumeur et ce dernier prit une fille par le bras et l'assis sur ses genoux, pour lui servir de bouclier.

— Allons, allons, Sven, fit-il, comme déçu de la réaction d'un vieil ami, c'est comme ça que tu me salues après tout ce temps passé dans le désert.

Sven pourrait lire tout le sarcasme dans les paroles du Parfumeur, et cela ne faisait qu'accroître la haine qu'il avait pour lui. Il chargea son fusil.

— A cause de qui, hein ? Rétorqua le pilleur.

— Devrais-je répondre à cause de moi ? Répondit le Parfumeur avec un sourire, l'air innocent.

— Qui d'autre ? Qui nous a réduits à des moins que rien pour assouvir sa mégalomanie ?

— Mais enfin regardez ! S'exclama le Parfumeur en indiquant différentes parties de la pièce. Cette tour est une merveille. Et c'est le fruit de notre collaboration.

— Notre collaboration ?! Sven cracha aux pieds du Parfumeur. Ce n'est que le fruit de notre sueur et de notre sang.

Le pilleur mit le doigt sur la gâchette et s'apprêta à viser.

— Serais-tu prêt à verser ton propre sang ici ? Demanda soudainement le Parfumeur.

— Quel sang ? Rétorqua Sven.

Le Parfumeur prit le visage de la jeune fille assise sur ses genoux entre ses mains et le montra au pilleur. Celle-ci semblait terrifié et les larmes lui montaient aux yeux.

Sven regarda en détail le visage de la jeune fille et fut quelque peu surpris. Ses traits ressemblaient aux siens. Ses yeux étaient de la même couleur que ceux du pilleur. Sven réfléchit un instant et se rappela que le jeune homme abattu un peu plus tôt près de la ville avait également des traits similaires.

Mais il ne comptait pas se laisser manipuler de nouveau par cette vermine, et entre moins avec ce qui pourrait s'apparenter à du chantage.

— J'ai déjà versé beaucoup de mon sang ici, plus ou moins ne changea plus rien, dit-il avant de tirer.

Sa balle perfora la poitrine nue de la jeune fille qui s'effondra sur le sol. Cette action soudaine surprit le Parfumeur qui baissa sa garde. Sven en profita pour recharger son fusil.

Un deuxième coup de feu retentit.

Dicey finit par dénicher un modèle Swatrozi de taille moyenne, à peu près similaire à celui qu'ils avaient auparavant, parmi le bon nombre de modèles présents dans ce hangar.

Avec l'arrivée imminente des pilleurs, le groupe avait préféré fuir en prenant le même couloir que Denita avait emprunté avant eux. Celui-ci avait débouché sur un second hangar, plus petit que le premier, mais qui bénéficiait de vaisseaux prêts à l'emploi.

Denita était toutefois introuvable. Seul le cadavre de Sylfan gisait au milieu d'une place vide. Dicey ouvrit la passerelle pour faire monter Shad et Bergins. Ce dernier semblait dépité. Le colosse avait tenté de sauver la jeune Karin mais celle-ci avait été blessé à la jambe par l'un des gardes et avait été incapable de les suivre.

Dicey s'installa au poste de pilotage, identique à leur précédente navette, et démarra le vaisseau. Il trouva une poignée à actionner pour ouvrir le plafond puis décolla. Il eut également une pensée pour Edward, dont le ComDev avait subitement été coupé. La navette prit de l'altitude et la capitale devint de plus en plus petite, puis la planète...

Bergins partit se coucher sans un mot et Shad lança un regard au pilote avant de s'asseoir près de lui au poste de co-pilotage.

Dicey entra les coordonnées de la station mercenaire de Kentoria, puis s'étira en laissant le pilote automatique faire le reste.

Leur voyage était encore loin d'être fini...

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