Chapitre 4 - Matéo Di Angelo

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Mon visage se décompose et je détourne immédiatement le regard. Je l’ai reconnu mais j’ai vu dans ses yeux que lui m’a oublié. Des sentiments contradictoires m’assaillent et j’ai l’impression de tomber d’un nuage.

Ma tête tourne et mes oreilles bourdonnent. J’ai l’impression que le temps tourne au ralenti. Le serveur glisse des verres dans mes mains mais je le sens à peine.

Une main m’agrippe l’épaule et je croise le regard inquiet d’Irina. La chaleur des corps qui se déhanchent m’agresse et je me sens suffoquer. Irina s’en aperçoit et pousse les gens pour me guider vers la sortie.

Quand j’arrive dehors, je respire bruyamment et je m’effondre à terre les yeux ronds comme des soucoupes.

- Mon Dieu Tina, tu fais une crise de panique ! s’exclame mon amie.

Heureusement mon amie m’aide à me calmer.

- Tu es très pâle, remarque-t-elle. Que s’est-il passé au bar ? On s’amusait, tu étais détendue et puis ensuite tu t’es sentie très mal.

Décidément, j’enchaîne les mauvaises surprises en ce moment. Je n’arrive pas à expliquer la situation à mon amie.

Irina me conduit jusqu’au métro et décide une nouvelle fois de passer la nuit avec moi. Je suis vraiment désolée pour elle car je ne veux pas l’inquiéter. Je n’ai pas l’habitude que les gens se fassent du souci pour moi et je suis touchée quand c’est le cas. On ne peut pas dire que j’ai vécu dans l’amour de mes parents.

Une fois dans ma chambre, je fais les cent en tournant en rond, le cerveau en ébullition. Irina devient rapidement folle de mon silence.

- Parle-moi, me supplie-t-elle avec inquiétude.

Je me détourne vers elle et finis par m’asseoir à ses côtés sur le lit. J’ai envie d’aller me coucher mais je dois d’abord donner des explications à mon amie.

- Je n’ai jamais parlé de cette histoire à personne, je commence. Mais il est peut-être temps que ça change.

Irina me prend la main et m’invite à continuer.

- Quand j’avais neuf ans, j’étais amoureuse de mon voisin d’à côté, je poursuis en regardant dans le vide. Il s’occupait de moi comme sa sœur et je savais que notre histoire était condamnée parce que nous avons presque dix ans d’écart. Lui, il m’aimait comme un membre de sa famille. Un jour, il est partit et je ne l’ai jamais revu jusqu’à ce soir.

- Ça fait dix ans, comment peux-tu être sûre que c’est lui que tu as vu au bar ? intervient Irina.

- Je l’aurais reconnu entre mille, j’explique. C’était bien lui. J’ai mis presque dix ans à l’oublier parce que son départ m’a énormément affecté et je ne voulais pas cessé de croire qu’il reviendrait.

- Pourquoi est-il parti ?

- Je ne sais pas vraiment. Il se disputait souvent avec son père et un jour c’était la dispute de trop. Le lendemain, sa mère a dit qu’il n’était plus là.

- Que vas-tu faire maintenant ? demande mon amie.

- Je ne sais pas. Je vais faire comme s’il n’existait pas. Je suis en couple avec Alexandre donc…

- Tu n’as toujours pas rompu ! s’indigne Irina.

- Sa sincérité m’a touché et je veux lui donner une dernière chance.

Mon amie secoue la tête de désaccord avant de me prendre dans ses bras pour m’encourager. Nous nous mettons au lit rapidement et mes rêves sont perturbés par les images du passé.

***

Deux jours sont passés et il temps de conduire Irina à l’aéroport. Elle a deux avions à prendre pour arriver à Varsovie. Je viens la chercher en ville avec la voiture de ma mère.

J’ai passé toute la journée suivant la soirée au bar à regarder des séries Netflix car je ne voulais pas sortir de chez moi. Mes parents comme à leur habitude ne se préoccupent pas de moi. J’ai beaucoup discuté avec Maria qui est toujours très gentille avec moi.

Une fois à l’aéroport, j’ai beaucoup de mal à dire au revoir à mon amie. C’est la meilleure rencontre que j’ai faite et Irina est ma seule véritable amie. Je ne parle plus aux filles de mon lycée privée depuis l’université. Beaucoup de filles ne m’aiment pas car elles sont jalouses de mon physique qu’elles trouvent très avantageux.

Je suis une personne discrète et peu sociable contrairement à ce que l’on peut penser. Je n’aime pas me faire remarquer et je suis adepte des bons comportements en société.

- Tu vas me manquer, je confie à mon amie en la serrant dans mes bras.

- On va souvent s’appeler et s’écrire, ne t’inquiète pas, me rassure-t-elle.

- J’ai peur de ne pas réussir à supporter toutes les situations qui me tombent dessus.

- Tu es plus forte que tu le crois, m’encourage Irina. Tu peux me prévenir au moindre problème et je serais là pour t’aider.

Une voix mécanique annonce que l’embarquement de l’avion pour Paris va bientôt commencer. Elle va être en retard si elle ne passe pas la sécurité maintenant. Mon amie me serre une dernière fois contre elle avant de partir avec son gros sac à dos. Elle me fait un dernier signe avant de disparaitre dans le couloir.

Je prends ma voiture la tête basse, en imaginant les bouchons sur la rocade qui m’attendent. Je passe presque une heure bloquée sur la route.

Quand j’arrive enfin chez moi, je balance mes lunettes sur mon lit. Il fait tellement chaud depuis quelques jours que je décide de me rafraichir à la piscine.

Je porte mon bikini rouge et ma serviette bleu. Je pose le tout sur un transat avec mon téléphone sous un magazine pour ne pas qu’il prenne le soleil. Je n’ai pas pris la peine de retirer mon maquillage qui résiste à l’eau. Le jardin n’est pas très grand mais nous avons la chance d’avoir une piscine creusée.

Je plonge dans la piscine puis je nage quelques longueurs pour me détendre. J’ai la maison et le jardin pour moi toute seule. Il est vrai que je me plains de l’indifférence de mes parents mais je suis parfois heureuse de ne pas les croiser, surtout en ce moment.

Je n’ai pas envie de me disputer avec mes parents et Alex pendant les vacances. L’année scolaire est assez rigoureuse et je préfère être en bon terme avec tout le monde.

Mon téléphone sonne et je me sèche rapidement les mains pour répondre en espérant que ce n’est pas Alex. Je veux toujours être en couple avec lui mais je préfère l’éviter encore un peu car je ne suis pas totalement remise de l’incident à la soirée de Charlie.

Je décroche quand je vois qu’il s’agir d’Irina.

- Salut, je suis arrivée à Paris et j’attends mon prochain avion pour Varsovie, mais je ne suis pas encore arrivée car il y a une escale à Munich, m’explique-t-elle. Je veux savoir si tout se passe bien.

- Rien à signaler, je réponds. Je suis à la piscine et la solitude me permet de réfléchir. Pour le moment pas de tempête en vue.

- On se rappelle plus tard, dois y aller. J’espère que tout restera calme dans ta vie.

Je raccroche après avoir murmuré quelques mots. Je ne suis pas aussi optimiste qu’elle sur ma vie. J’avais prévu de passer un été calme mais je pense que je vais vivre le contraire.

Je regarde un message d’Anne-Lise qui m’invite à faire du shopping en compagnie de Laura. J’apprécie ces deux filles mais je n’ai pas lié une très grande amitié avec elles. J’accepte l’invitation parce qu’il faut tout de même que je garde des amies et que je ne passe pas toute la journée chez moi.

Je repose mon smartphone puis je me lance dans un nouveau plongeon. Je nage vers la bordure puis je m’appuie sur mes bras pour m’extirper de la piscine. J’entends un bruit de feuillage alors qu’il n’y a pas de vent.

Je me redresse et me rapproche des hautes plantes qui cachent la propriété des voisins. En écartant un bouquet de feuille je tombe nez à nez sur un torse musclé et dépourvu de t-shirt. Je lève le regard vers le visage et l’homme je rencontre deux yeux verts qui m’observent avec attention.

Pendant quelques secondes, je reste figée sur place en continuant d’observer Matéo qui me fait face.

Quand je reprends mes esprits, je lâche les feuilles et me précipite sur mes affaires avant filer à l’intérieur. Je m’arrête de courir qu’une fois dans ma chambre. Je me sèche rapidement avant de m’écrouler près de mon lavabo.

Je ne peux pas le voir sans que des sentiments étranges surviennent. Il faut que je l’évite et je pense en être capable.

Maintenant il doit savoir que je suis la fille du bar et que je l’ai reconnu ce soir-là. À moins qu’il pense que j’ai déménagé et qu’il me prenne pour une nouvelle voisine. Non, c’est absurde, il doit bien se douter de mon identité.

Je n’ai pas eu le temps de d’observer grands choses, mais d’après ce que j’ai vu, il taillait les branches des taillis. J’ai aperçu un sécateur et des gants de jardin dans ses mains.

Je ne sais pas quoi faire vis-à-vis de lui. Une partie moi veut fuir son passé et se concentrer sur l’avenir et une autre souhaite apprendre la vérité auprès de Matéo.

Mon cœur est tiraillé entre deux choix et la seule chose que je fais à ce moment c’est laissé des larmes couler. Cela fait si longtemps que je n’ai pas pleuré et la dernière fois c’était pour la même raison qu’aujourd’hui. Matéo. Il n’y en a que pour lui. Pourquoi faut-il qu’il revienne sans cesse dans ma tête et surtout dans mon cœur ? Le fait que Matéo revienne dans ma vie m’affecte plus que ça ne le devrait.

Je pars me changer avance de tomber sur mon lit et de faire une petite sieste pour éviter de penser à nouveau à lui.

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