Chapitre 7 : Le Lac (2)

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 Ils marchèrent jusqu'au pied des remparts. Le soleil se couchait derrière la falaise, de l'autre côté du château. Ainsi, il était parti depuis tout ce temps-là...

 Il sentait le regard intrigué de Pansy. Mais elle ne disait rien. Cassius en fut soulagé. Il put se lover dans ce silence si agréable. Tellement agréable qu'il fit quelque chose de complètement insensé. Il ne sut pas ce qui le poussa à le faire mais il sentit que c'était la bonne chose à faire. Il se confia au vent. Il lui raconta tout. À quel point Junia était douce, et gentille, et intrépide. À quel point Cassius l'aimait, et à quel point il n'avait pas su la protéger.

 Il savait que Pansy entendait tout mais c'était plus simple de parler au vent.

 — Et qu'est-ce qu'il s'est passé ? demanda-t-elle.

 Que s'était-il passé ? Pourquoi avait-il fallu qu'elle le comprenne, qu'elle l'entende dans sa voix, que quelque chose s'était passé. Comme si raconter Junia, son souvenir, était forcément lié à ce qu'il s'était passé.

 Pourtant, c'était vrai. Il n'y avait jamais Junia sans l'accident dans la tête de Cassius. C'est pour cela qu'il s'efforçait de ne pas y penser.

 — Je ne me rappelle pas de tout, dit-il. La dernière chose, c'était dans le lac. J'étouffais. Je ne pense pas que c'était seulement le manque d'air, c'était surtout le poids de l'eau. Il n'y avait que de l'eau, partout.

 Tandis qu'il parlait, il sentait l'air l'oppresser comme le lac autrefois.

 — La première chose dont je me souviens ensuite, c'est d'être recroquevillé sur la berge, dans une serviette. Puis, j'ai replongé dans un noir total et quand j'ai émergé à nouveau, mes parents étaient à mon chevet. Et ils avaient ce regard, le même qu'avec Aris. Le père de Junia nous avait retrouvé en train de nous noyer au milieu du lac. Je ne me souviens pas de ça.

 Cassius laissa au vent le temps de souffler.

 — J'ai survécu, pas Junia.

 Cassius avait toujours eu du mal à le comprendre. Au début, c'était la mort. Il n'y avait jamais été confronté aussi inévitablement. Puis c'était l'injustice. Au fur et à mesure des hivers qui l'avaient chacun vu grandir d'une année, il avait fixé le lac, auquel elle appartenait désormais, avec les mêmes questions, la même incompréhension, la même haine. Sa haine se heurtait toujours au vide pourtant, il ne pouvait pas déclarer la guerre à de l'eau. Ce point bleu qui se mélangeait parfois avec le reflet pâle de son iris. Et enfin, la culpabilité. Qu'avait-il fait ? C'était lui qui l'avait menée au lac. À sa mort. Il l'avait tuée.

 Cette pensée assassinait toujours une partie de son âme. Elle se reconstruisait à chaque fois pour être mieux détruite par la suite. Ne plus penser à Junia était la seule solution qui ait réussi à mettre fin à ce supplice prométhéen. Jusqu'à maintenant.

 — Je suis désolée, dit Pansy. Sincèrement.

 Elle le serra dans ses bras et Cassius reposa sa tête sur l'épaule de la jeune femme. Et cette étreinte en dit bien plus que tous les mots, si bien choisis soient-ils, qu'ils auraient pu échanger.

 Une pluie fine avait commencé à tomber. Ils restèrent ainsi un long moment tandis que leurs vêtements commençaient à se tremper. Quiconque les aurait surpris aurait trouvé cette scène bien étrange, eux-mêmes y compris. Mais en cet instant, cela semblait être la chose la plus naturelle à faire.

 Une larme tomba sur l'épaule de Pansy. Elle serra Cassius une dernière fois contre elle et s'en détacha.

 — On devrait rentrer, dit-elle. Ton ami, Adrian, il t'attend dans la salle commune depuis un moment. Et je ferais mieux d'aller retrouver les miens pour le repas, ils doivent se demander où je suis passé.

 Cassius acquiesça. Ils marchèrent silencieusement jusqu'aux portes d'entrée du château. C'était ici que leurs chemins se séparaient. Cassius ne savait pas exactement ce qu'il fallait faire à présent mais Pansy résolut ce problème en lui tournant le dos et en entrant dans la Grande Salle. Il se dit que les au revoir n'étaient sûrement pas de coutume dans un château où l'on vivait ensemble durant toute l'année.

 Cassius descendit à la salle commune des Serpentard. Tout le monde était parti manger. Seul Adrian était assis au bord d'un canapé, dos à Cassius, son bras appuyé sur l'accoudoir et sa tête posée contre sa main. Il se retourna dès que Cassius entra.

 — Tu veux en parler ? demanda-t-il doucement.

 Cassius secoua la tête et, après s'être excusé, monta se coucher. Il ne mangerait pas ce soir. En fait, il ne ferait rien. Il ne s'était jamais senti d'une humeur aussi morose. Il n'avait même pas envie de dormir. Il n'entendit pourtant aucun de ses camarades se coucher.

 Cassius avait l'impression que sa semaine ne pouvait pas devenir plus chargée et mouvementée qu'elle ne l'avait été jusque là. Pourtant, la journée du vendredi lui prouva qu'il ne pouvait pas avoir plus tort. Il se réveilla pour trouver une foule amassée autour du tableau d'affichage. Il trouva en effet, après s'être frayé un chemin entre les autres élèves, une note annonçant la tenue du Bal de Noël à Poudlard. Jusque là, la nouvelle ne le préoccupa pas plus que ça, il avait des choses plus importantes à penser. Puis il lut autre chose.

 Les champions du Tournoi des Trois Sorciers allaient devoir ouvrir le bal accompagnés de leurs partenaires. Durant une fraction de seconde, une image apparut dans l'esprit de Cassius, une image de lui-même en train de danser au bal, aux bras de Pansy Parkinson. Il se força immédiatement à l'effacer et ressentit comme une sensation de vide peser dans son estomac. Il fronça les sourcils. Il se trouvait stupide. Comment une quatrième année avait-elle pu devenir si importante ? Tête baissée, il s'extirpa de la foule.

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