Chapitre 22 : Inquiétudes et espérance (3e partie)

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 Rassurant d'un signe les jeunes, je badigeonnai généreusement la blessure de mon baume à la consoude avant de faire un pansement neuf. Ils partirent s'occuper du campement et confirmer que les alentours étaient sécurisés. Quelque chose lâcha alors en moi et j'éclatai en sanglots irrépressibles. Jaskier m'accueillit dans ses bras réconfortants, son émotion, bien que plus contenue, au diapason avec la mienne. Cette fois nous avions fait tout ce qui était en notre pouvoir. Restait à arriver jusqu'aux Dryade pour le leur confier. 


 Mes larmes finirent pas se tarir. Je m’excusai auprès de Jaskier pour l’eau salée et la morve sur son veston. J’étais un peu embarrassée mais il y répondit par un grand éclat de rire et une œillade appuyée :


– Bah, je vais prendre ça comme une marque de confiance et d’affection !


 L’eau fraîche de la source me fit du bien et me permit de reprendre visage humain. Les garçons avaient préparé un feu et mis à chauffer le repas en plus de la soupe pour Geralt. L’air commençait à embaumer. Je me sentais plus légère d’avoir enfin pu lui prodiguer un soin efficace et d’avoir lâché les émotions que je contenais depuis le moment où nous l’avions abandonné, seul face aux goules, pu quoi que ce fût, qui arrivaient. Une part de moi s’en voulait de l’avoir écouté et de n’être pas restée pour le seconder dans ce combat : avec mon arc j’aurais certainement pu infliger quelques dégâts à ces viles créatures ce qui lui aurait évité de telles blessures… Enfin… Comme il disait souvent : « ce qui est fait ne peut être défait ».


 Jaskier aussi semblait se sentir mieux : il retrouvait petit à petit son naturel expansif, plaquant des accords sur son luth pendant que le repas finissait de cuire. Sa voix chaude s’envola dans la nuit tombée, nous évadant dans une aventure joyeuse pleine de rebondissement et de pitreries. Cela nous fit beaucoup de bien à tous. Mon cœur s’allégea encore quand la voix de Geralt, éraillée mais audible, résonna à son tour depuis l'arrière de l'attelage :


– J’ai faim !


 C’était la première fois en deux jours qu’il s’exprimait normalement. Quand j’arrivais avec son bol de soupe, cette fois non diluée, à la main, ses yeux étaient entrouverts. Il me sourit faiblement, passant sa langue sur ses lèvres sèches à la vue du récipient. Jaskier et Wellan l’aidèrent à se redresser ce qui lui arracha un gémissement sourd auquel firent écho les regards désolés des deux hommes.


– Ça fait du bien de te voir en meilleure forme ! Nous avons vraiment cru te perdre…, lui indiquai-je en commençant à l’alimenter.


 Il ferma les yeux en savourant avec un soupir de contentement. Cuillerée après cuillerée, il parvint à avaler tout le contenu du bol avant de s’endormir à nouveau. Le temps de nous sustenter à notre tour, de nourrir et abreuver les chevaux et nous nous préparâmes pour la nuit, organisant un tour de garde en bonne compagnie de Karvill, rassurant par sa présence chaleureuse, son ouïe fine et sa stature imposante. 


 J’étais lasse. La libération de mes émotions avait achevé de me vider de ce qu’il me restait d’énergie après cette journée passée à chevaucher et à m'inquiéter. Je me proposai donc de prendre du repos immédiatement pour relayer celui qui serait de garde vers trois heures du matin. J’enchainerais ainsi sur notre nouvelle journée de voyage juste avant le lever du jour. Après une dernière décoction de saule et une vérification des pansements du Sorceleur, je me laissai glisser, contre lui, dans un sommeil sans rêves.

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