Le lendemain de l'autre fois

2 minutes de lecture

J'ai dû m'interrompre hier, car on me portait une soupe.

Comme je l'écrivais, ce jour-là, Gustav et moi avons rencontré l'une des diables-blancs. Il n'y a eu qu'à la voir pour le comprendre : sa peau n'était pas simplement pâle, mais blanche, comme la neige fraîche, comme la poudre de lessive, comme un cobaye de laboratoire. Ce teint lacté et son incroyable musculature la rapprochait davantage d'une statue de marbre antique que d'un être de chair et d'os ; elle dégageait quelque chose d'autre que l'humanité, de mystique presque, et j'ai tout de suite compris pourquoi les légendes parlaient d'eux comme d'esprits.

Pourtant, quand nous avons accouru à l'appel de détresse, la diablesse était en prise avec l'un des gigantesques bras de la plante, prise en étau comme ligotée par un python géant. Gustav ne m'a pas retenue, quand par réflexe je me suis précipitée pour lui porter secours. J'ai mutilé Dionaea venenosum à grands coups de machette, ce qui n'a pas eu l'air d'avoir beaucoup d'effet. Cependant, j'imagine que mon intervention a servi de diversion, puisque la diablesse a pu s'extraire de la tige enroulée, à force de coups de griffes et de dents. Je nous croyais sauves, et j’interpellais déjà mon second pour qu'il vienne m'aider à trancher une portion de liane encore frétillante, quand un puissant dard s'est enfoncé dans ma nuque. J'ai senti tout mon sang se transir dans mes veines, avant de perdre connaissance.

J'ai émergé du coma, hier, sans savoir où je me trouvais ni combien de temps a duré ma léthargie. Il se trouve que la diablesse m'a portée jusqu'à son village, où les siens m'ont soignée. Je ne comprends pas leur langue, un dialecte guttural que je ne saurais identifier, mais ils me témoignent beaucoup d'égards, et je crois comprendre qu'ils me sont reconnaissants d'avoir aidé l'une des leurs. Ils m'ont revêtu d'une tunique de leur confection, admirablement tissée, et m'apportent deux repas chaque jour. Celle qui m'a sauvée veille à mon chevet, j'ai quelques souvenirs d'elle penchée sur ma natte durant ma convalescence. Il semble qu'elle m'ait accueillie chez elle, dans une sorte de grotte aux murs ornés de fresques.

Malgré l'allure archaïque de leur environnement, les diables-blancs ne sont pas des sauvages. Ils sont des artisans doués, des thérapeutes aguerris et leur communauté semble régie par une organisation précise. J'espère en apprendre davantage une fois sur pieds.

Annotations

Vous aimez lire Opale Encaust ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0