SANS SUITE 30/ Jour 5 : Nuit magique (1)

9 minutes de lecture

Nous sommes devant l'entrée d'un hôtel. J'aurais dû m'en douter. Le bâtiment est très ancien, mais parfaitement rénové et entretenu. Toutes les lumières sur la façade le font briller comme les palaces qu'on ne voit qu'à la télévision. Des marches immenses, telles celles de la maison des Madma, permettent d'accéder à l'intérieur.

Lukas me rejoint rapidement, me prend par la taille et dépose un baiser sur mes cheveux.

— Tu sais que je vais me venger.

— Tu ne seras pas à la hauteur, j'en suis sûre.

Un portier nous ouvre la porte.

— Tu me supplieras de te faire jouir.

— Jamais.

Nous nous arrêtons devant la réception.

— Je n'aime pas ce terme. Trouve autre chose.

Puis, s’adressant à l’hôtesse :

— Bonsoir. Sullivan.

— Votre suite vous attend, Monsieur Sullivan. Un chasseur s'occupe de vos bagages. À quelle heure souhaitez-vous être réveillés ?

Il me consulte du regard. Je fais la moue car je sais que je vais être extrêmement fatiguée demain. Enfin, tout à l'heure.

— Nous n'avons pas de bagages et pas besoin de réveil, merci. Il faudra une chambre pour mon chauffeur, également. Nous n'avons pas de vêtements de rechange. Une robe pour Madame et une chemise pour moi seraient parfaits. Vous vous en chargez ? Hum... Ce qu'on porte en dessous aussi, vous voyez ?

Il est gêné, je n'en reviens pas ! Lui, mal à l'aise ! Qui l'eut cru ? Comme un énorme fou rire menace de m'emporter, je me concentre sur le décor de ce fabuleux hall.

Un tapis rouge que nos pieds ont foulé recouvre le carrelage marbré et conduit à une fontaine, d'où il part soit vers la réception, à sa gauche, soit vers un espace d'attente à droite, soit vers les ascenseurs, en face. Les murs sont tous blancs et ornés de dorures, et les portes vitrées habillées de tentures rouges en velours. Les gouttes de cristal des nombreux plafonniers éclairent l'entrée majestueuse de leurs milles éclats. Les fauteuils aux tons tout aussi purs sont recouverts de coussins soyeux, et les tables basses aux pieds en fer forgé supportent des plateaux en verre. De larges escaliers en marbre revêtus au centre du même tapis rouge, mènent au premier étage où l'on accède au bar en acajou finement sculpté. De part et d'autre, il est entouré des mêmes tables et fauteuils qu'à l'étage inférieur et d'où je suis, je distingue à travers les balustrades dorées, quelques clients qui s'attardent sur les tabourets de bois et de cuir.

Impatiente, j'ouvre la première porte coulissante, à ma gauche. La chambre ! Gigantesque ! La largeur du lit est impressionnante. Tout comme la taille de la pièce, d'ailleurs. Il y a même une coiffeuse ! Et, oh ! La salle de bain, stupéfiante avec ses murs vitrés qui ne laissent aucune intimité. Je me jette sur le couvre-lit à l'air douillet, et apprécie le moelleux du matelas.

Je tourne la tête vers la salle de bains qui me déconcerte. Elle est composée de deux parties. La première contient un long meuble blanc laqué recouvert d'un plateau de marbre noir, et qui supporte deux lavabos en porcelaine. J'aperçois une baignoire d'angle, et incrustée dans le mur, juste à côté, la robinetterie d'une douche. Mes yeux cherchent l'éclairage et se posent sur une grosse pomme de douche, suspendue au plafond. Je n'en ai jamais vu de cette taille. Ça doit être agréable ! J’ai hâte de tester cet équipement. Quoique, je ferais bien un somme en attendant Lukas.

Que fait-il, d’ailleurs ? Il en met du temps. Je me lève à contrecœur et remarque une autre porte, face au lit, près d’un écran géant. Je l’entrouvre et reconnait un gigantesque salon. Lukas est là ; il fouille dans un buffet.

Il se redresse au moment où une douce musique emplit la pièce. Je suis en admiration, sous le charme. Il a ôté son nœud papillon et ouvert les premiers boutons de sa chemise. Je l’aiderais bien à l’ouvrir complètement…

— Ma surprise te plait ? me demande-t-il sans cesser ses recherches. J’ai pensé qu’il était tard pour faire la route jusqu’à la villa et que nous gagnerions quelques heures de sommeil si nous dormions ici.

— En fait, je ne connais pas ce conte de fée, car minuit a sonné depuis longtemps et je devrais être redevenue celle que j’étais hier, tout comme Cendrillon.

— Personne n’a encore écrit ce conte ; voilà pourquoi tu ne le connais pas. Il était une fois, une jeune femme qui se tuait à la tâche pour offrir le meilleur à ses enfants, et un jeune prince charmant qui avait envie d’elle à longueur de journée. Mais la jeune farouche avait un don très particulier.

Il s’interrompt pour remplir deux coupes de champagne, encore ! et trinquer. Puis il me prend dans ses bras et nous commençons à tourner sur l’air de « I’m Not The Only One » de Sam Smith. Il commence à fredonner, et bientôt, nous chantons en cœur, enlacés. D’autres titres suivent et nous restons ainsi, chacun perdu dans ses pensées. Ces douces mélodies ont l’art de me rendre nostalgique et je me demande encore une fois dans quel état je vais ressortir lors de la chute du conte de fée :

— J’aimerais entendre la fin de l’histoire, quémandé-je, la tête sur son épaule.

— Le don de la jeune farouche était de provoquer la colère de son prince ; ainsi, il s’emportait, et se pliait en quatre pour mieux se faire pardonner.

— Ils éprouvaient de nombreuses difficultés de communication, car il prenait un malin plaisir à la rabaisser, mais elle avait plus d’un atout dans sa manche.

— Et elle parvenait toujours à passer la nuit dans son lit.

— Rectification : c’est lui qui passait ses nuits dans son lit à elle.

— Pas cette nuit, ma biche. Cherche une autre musique, je reviens dans un instant.

Je me penche sur l’ordinateur posé sur le buffet. Un site dont je n’ai jamais entendu parler propose d’écouter toutes sortes de musiques. Je choisis « Stay », de Rihanna. Je plane, ma coupe à la main, en fredonnant les paroles, quand Lukas réapparait. Il se colle à mon dos, m’entourant de ses deux bras, ses mains jointes sur mon ventre. Nous nous balançons doucement, ma tête contre sa poitrine, son menton sur le sommet de mon crane.

— Tu n’as pas une Play List sur internet ? s'enquiert-il.

— Si, plusieurs. Tu veux voir, petit curieux ?

— Ouais, en attendant de voir autre chose…

J’ouvre mon compte Deezer et le laisse découvrir la musique que j’aime. Il met en route la playlist que j’ai nommée « doux », et la voix d’Hozier entame aussitôt « Take me to church ».

Lukas me débarrasse de ma coupe de champagne, m’enlace et m’embrasse en dansant. Nous reculons vers la chambre, trop lentement à mon gout.

Cette fois, je ne prends pas la peine d’ouvrir les boutons de sa chemise, je tire d’un coup sec sur le tissu et les arrache. Il lutte quelques instants avec ses boutons de manchettes, surement en or, parvient à se débarrasser des manches et laisse le vêtement tomber sur la moquette. Nous gigotons sans nous quitter des yeux en ôtant chaussures et chaussettes, puis recollons nos lèvres en gémissant. Ses mains caressent mes fesses, les poussent pour que je me frotte à lui. Ma bouche redécouvre ses épaules et sa poitrine pendant que mes mains se frayent un passage entre son pantalon et sa taille, jusqu’à ses fesses que je caresse, puis presse et finit par griffer. Il a défait sa ceinture, et s’écarte légèrement pour laisser glisser son pantalon.

Nous avons atteint la salle de bain, sans que je m’en rende compte. Il m’entraine en me tenant la main jusqu’à une marche qui mène à la douche et à la baignoire. Les hauts parleurs diffusent toujours ces chansons que j’adore, et à ce moment je reconnais Zazie et Axel Bauer, en duo pour « À ma place ».

Nous sommes arrêtés devant le bac rempli d’eau tiède, que les buses d’air font remuer et que de petits spots éclairent de toutes les couleurs. C’est magnifique !

Derrière moi, Lukas embrasse mon cou alors que ses mains froissent la robe pour la monter à hauteur de mes hanches. Il pose mes doigts dessus pour retenir le tissu et entreprend d’enlever mon shorty. Il caresse l’intérieur de mes cuisses et frôle mon intimité avec un râle d’appréciation. Au rythme de la musique, je remue mes fesses contre son érection. Il a déjà retiré son caleçon ! Je veux me tourner vers lui, mais il refuse en me maintenant fermement par les épaules. Puis il dégrafe mon soutien-gorge, qui va rejoindre les autres vêtements sur le sol carrelé.

Il enjambe la baignoire et me soutient pour m’aider à l’y rejoindre, avant de s’assoir et de m’inviter à m’installer sur lui, en lui tournant le dos. Ma chair n’attend plus que lui ; l’attente est d’autant plus insupportable que sa respiration irrégulière dans mon cou confirme son excitation.

— Attends.

Sous son regard de braise, je sors du jacuzzi et fouille les poches de son jean. Pas d’emballage carré ! Pas ça ! Pas dans l’état où nous sommes !

— Ne me dis pas que tu n’en as pas !

— On s’en passera, s'impatiente-t-il.

— Non !

— Carly, accorde-moi ta confiance comme je t’accorde la mienne.

— Non.

— Dans mon portefeuille, dans ma veste, capitule-t-il.

— Et elle est où ta veste ? je trépigne.

— Canapé, lâche-t-il avec un soupir de résignation.

J’ai parsemé la moquette de traces de pas humides que j’évite quand je me précipite jusqu’à la salle de bain. Lukas est toujours dans l’eau, sa coupe de champagne à la main. Avant de revenir me frotter à lui, je lui adresse un regard aguicheur, secoue le carré d’aluminium et le déchire lentement, laissant apparaitre en riant l’objet en latex. De nouveau assise sur les genoux de mon partenaire, mes doigts jouent avec son sexe dur, puis je l’aide à se relever, caresse encore son membre du bout de la langue et y déroule le préservatif. Il m’enlace encore, m’embrasse goulument et nous réinstalle au milieu des bulles, dans la position qu’il avait choisie avant que je ne l’abandonne. Les frissons me parcourent dès qu’il commence à s’immiscer en moi. Ces sensations, mêlées au parfum fruité du bain moussant, aux remous de l’eau qui vient rebondir sur ma peau, et à l’ambiance cosy procurée par les lumières et la musique enflamment tous nos sens.

— C’est trop bon, murmure-t-il dans un souffle.

— Laisse-moi me retourner, Lukas. Je veux t’embrasser, sentir tes lèvres, ta langue, l'imploré-je.

— Non. Je dois me venger, tu te rappelles ?

Son doigt vient caresser mes lèvres, puis mes seins et descend chatouiller mon clitoris. Nous sommes presque allongés dans l’eau ; il nous déplace jusqu’à une petite marche et les bulles d’eau viennent se jeter directement sur nos sexes. Il augmente la puissance des buses et je sens l’orgasme me gagner. Je voudrais remuer mes hanches, mais il les retient et soulève violemment les siennes, en râlant.

Après un profond soupir, il me permet de lui faire face et m’enlace à nouveau pour m’embrasser tendrement.

Il traverse le bac pour atteindre la bouteille de champagne et nos deux coupes. Je ne l’ai pas vu ramener le plateau.

— Un dernier verre, le temps de nous remettre et de délasser nos muscles.

— Tu dois avoir pleins d’idées de lieux où avoir des rapports, remarqué-je.

— Pourquoi ça ? rétorque-til, les sourcils froncés, alors qu'il revient s'asseoir à côté de moi.

— Avec tes nombreuses conquêtes.

— Où veux-tu en venir, Carlyane ?

Je l'agace, je m'en rends compte à cet instant, à sa voix sourde, ses traits fermés et son regard glacial. Ce n'était pourtant pas mon but.

— Ne t’énerve pas. Je me demandais juste si l’idée du jacuzzi venait de toi, si c’était une première pour toi aussi.

— Quelle importance ça a ? Ma vie à Las Vegas est une chose, les moments que nous passons ensembles en sont une autre. Ne mélange pas tout. C’est ma vie privée et ce que j’en fais ne regarde que moi. Je ne veux pas savoir où tu l’as déjà fait. Ni avec qui.

— Pourquoi détestes-tu Mickaël, dans ce cas ?

Il jette rageusement son verre dans le bassin, se redresse d’un seul coup et sort de la baignoire.

— Tu penses encore à lui !

Il allume le gros jet d’eau et s’installe dessous, laissant les gouttelettes rouler sur ses cheveux et sa peau.

Je sors et me glisse derrière lui. Je passe mes bras autour de sa taille et pose ma joue dans son dos.

— Je suis désolé, Carly. Il y a certains sujets que je préfère ne pas aborder.

— Pourquoi ? On peut se parler à cœur ouvert, puisque dans quelques jours nous oublierons tous les deux l’existence de l’autre.

— Je ne sais pas. Je ne veux pas. Ou je n’y arrive pas. C’est comme ça. N’insiste pas, Carly, tu veux ? Allons dormir.

À peine allongée, ma tête sur l’épaule de Lukas, son bras sur ma hanche, la fatigue m’emporte.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 6 versions.

Vous aimez lire Ysabel Floake ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0