SANS SUITE 29/ Jour 5 : Les vautours (3)

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C’est sans compter sur la langue de vipère.

— Carly ! Tu es toujours là ? Il est plus de minuit, Cendrillon devrait déjà s’être enfuie.

— As-tu pu récupérer tous tes diamants ? Je ne voudrais surtout pas être la cause de ton suicide affectif.

— Vous êtes là toutes les deux, ça tombe bien. Angie, j’ai deux mots à te dire, fulmine Lukas, l'index pointé, menaçant, vers cette dernière.

Il ne manquait plus que Monsieur Sullivan !

— Vous allez me dire ce qu’il s’est passé.

— Je n’ai rien fait, Lukas. J’ai juste présenté Carlyane. Ce sont les autres qui ont abordé le sujet, se défend la jeune femme.

Je m'indigne :

— Tu aurais pu me prévenir, Lukas. J’ai passé la soirée à faire des courbettes à tous ces juges qui me prenaient pour une pute !!!

Il balaie le reproche de la main.

— Escort girl, ce n’est pas la même chose.

— Peu importe ! J’en ai assez de tes mensonges, je ne veux plus avoir affaire à toi ! Jamais ! Tu m’entends, Lukas ? Jamais !

Je sais que je crie, qu’encore une fois, les conversations se sont tues, que tous les visages sont tournés vers nous. Mais le vase déborde et il doit comprendre que je ne suis pas sa catin !

Indifférent à notre entourage, il conserve son calme lorsqu'il tente encore de se justifier :

— Quels mensonges ? Je ne t’ai jamais menti, Carly. Il y a seulement certaines choses que je n’ai pas jugées utiles de te révéler. À tort, peut-être, mais si je t’avais expliqué cette habitude, tu aurais refusé mon invitation. Je me trompe ?

— Je l’avais refusée, et je n’aurais pas dû t’écouter ! Tu es un beau parleur, bravo, mais voici une nouvelle habitude à laquelle tu vas devoir te faire, Lukas : je ne t’écouterai plus ; alors inutile d’essayer même de me parler ! Excuse-moi, je vais attendre mon taxi dehors.J’esquisse déjà un pas vers la sortie, mais sa main me retient fermement par le bras.

— À vous tous, qui nous écoutez. Oui, je fais régulièrement appel à des agences pour me faire accompagner lors des soirées de gala, diners de charité ou autres. C’est un choix personnel, et mes raisons ne regardent que moi. Cependant, je confirme la déclaration de mon amie, Carlyane. Notre amitié est justement la raison pour laquelle elle a accepté de se joindre à nous ce soir. Vous admirez en ce moment une personne aussi respectable que vous et moi, digne de confiance, honnête et humaine, en plus d’être forte et courageuse. Merci de lui réserver l’accueil auquel elle n’a pas eu droit.

Il se joint aux autres pour applaudir et j’en profite pour partir dignement dans la direction opposée, sans regretter de tourner le dos à leur fausse ovation.

Je n’ai toujours pas traversé toute la salle que deux mains se posent sur mes hanches, et me forcent à exécuter un demi-tour. Je me retrouve dans les bras de Lukas, dont les lèvres viennent se coller aux miennes. Étourdie par toutes les émotions qui me submergent, je capitule et réponds à son baiser.

— Je suis désolé, Carly. Je ne croyais pas qu’elles se montreraient toutes si odieuses. C’est toi qui avais raison. Je te demande pardon.

— Pourquoi applaudissent-ils toujours ?

— Je n’ai jamais embrassé qui que ce soit en public, et je suppose qu’ils encouragent notre réconciliation.

Voix douce et sourire charmeur qui me fendent le coeur, mais ma colère est plus forte.

— Ça ne change rien. Je m’en vais. Comme l’a fait remarquer ta sœur, Cendrillon n’a plus rien à faire ici.

— Ok.

Il me raccompagne jusqu’au perron. Le taxi n’est pas encore arrivé. Il en met du temps !

Monsieur Madma approche avec d’autres hommes ; ils ont tous un cigare à la main :

— Eloïse refuse que je fume à l’intérieur. Je vous offre un cubain, Lukas ? Je les ai achetés sur place.

— Merci, Patrice. Nous allons prendre congé. Pouvez-vous faire avancer ma voiture, s’il vous plait.

— Aura-t-on l’occasion de vous revoir avant votre départ ?

— Le temps va me manquer, j’en ai bien peur. Ah, Eloïse, vous pouvez annuler le taxi.

— C’est déjà fait, mon ami. Passez une bonne fin de soirée, tous les deux.


Elle sourit d’un air entendu. Que dire ? Je sais comment va se terminer la nuit. Il se collera à moi en m’adressant son regard charmeur puis il m’embrassera, de plus en plus insistant, et il me soulèvera pour que je l’entoure de mes jambes. Ce que je ferai car je suis incapable de lui résister. Je suis trop lasse pour tenter de me battre avec lui ce soir ; surtout qu’il est plus fort que moi à ce jeu et que je perds à chaque fois. De plus, après les évènements de cette soirée, je ne sais plus que penser. Pourquoi a-t-il refusé que je m’enfuies ? Que signifiait ce baiser en public ? Si mon départ l’indifférait, il m’aurait simplement laissée partir. Je ne comprends pas, et je n’ai pas envie de chercher à comprendre. Cet homme et son milieu sont beaucoup trop compliqués pour moi. Ma colère retombe déjà, sans doute apaisée par sa déclaration, notre étreinte et ses aveux publics.

La limousine nous attend. Il me laisse monter à bord la première et je l’entends dire quelque chose au chauffeur qui tient la portière. Sans doute un simple merci.

— Champagne ? me propose-t-il alors qu'il ouvre le frigo du mini bar.

— Non, merci. J’ai assez bu pour aujourd’hui.

— Il faut qu’on parle de ce qu’il s’est passé, Carly.

— Pourquoi ? Ça y est, c’est passé. C’est fini. Cela ne se reproduira pas. Alors inutile de nous prendre la tête encore pour ça. La migraine arrive, de toute façon.

— Je connais un bon moyen d’y remédier, dit-il avec un clin d'oeil. On en était où quand Angie nous a interrompu en début de soirée ?

— Lukas ! Ce n’est pas comme ça que nous règlerons nos problèmes ! Et je n’en ai pas envie. Je te l’ai dit, ils en sont tous témoins, plus jamais !

— C’est toi qui refuse de parler ! Tu es trop tendue, laisse-moi t’aider.

Il me demande de m'asseoir sur ses genoux et commence à masser mes épaules et la base de ma nuque. Mais je ne parviens pas à me détendre. Mes réflexions n'ont rien d'agréable ; bien au contraire, elles me font déjà mal. En effet, vu mes réactions en présence de Lukas et le pouvoir qu'il exerce sur moi, j'ai peur de souffrir quand viendra le moment des adieux. Me séparer de lui est ce qu'il peut m'arriver de mieux, mais ça me chagrine. Je dois être un peu maso. Beaucoup même.

— À quoi penses-tu ? me demande-t-il avec douceur.

— Au jour où nous nous dirons au-revoir.

— Tu n'aurais pas quelque chose de plus gai dans ton répertoire ?

— Pourquoi ? Cela vous chagrinerait-il aussi, Monsieur Sullivan ?

— Je n'y ai pas pensé. Carly, nous sommes tous les deux trop différents pour envisager quoi que ce soit. Tu connais mon point de vue. Je ne veux m'attacher à personne. Je suis navré si je t'ai laissé croire...

— Je ne crois rien, Lukas. Je n'attends rien. Nous nous sommes déjà disputés pour ça. Je parlais de nos parties de jambes en l'air qui me manqueront peut-être au début.

Menteuse, va ! Ton coeur se serre.

Lukas interrompt mon moi profond avant qu'il ne prenne le dessus :

— Dans ce cas, profites-en maintenant. Ton conte de fée n'est pas encore terminé. D'ailleurs, j'ai bien l'intention de te faire l'amour pour me faire pardonner cette dure soirée. Cependant, tu vas devoir attendre un peu, car je te réserve une petite surprise.

Cet homme me torture l'esprit. Il est tellement adorable en des moments comme celui-ci et pourtant capable de se montrer si hautain et autoritaire.

Sans m'en rendre compte, j'ai glissé de ses genoux pour m'asseoir sur la banquette. Son bras entoure mes épaules et ma tête repose contre lui. Il remue doucement pour chercher mes lèvres.

Je finis encore une fois sur ses cuisses, mes doigts dans ses cheveux, ses mains s'agitant dans mon dos. Ces simples contacts suffisent à provoquer mon désir.

Je défais un à un les boutons de sa chemise, lentement, laissant mes ongles caresser sa peau entre chaque boutonnière tandis que ma bouche s'attarde dans son cou. Le bout de ses doigts remonte sur ma jambe repliée et mise à nu par la fente de ma robe. Je dépose d'humides baisers sur son torse, dessine de petits mouvements circulaires avec ma langue autour de ses tétons pendant que mes mains s'acharnent sur sa ceinture et son pantalon. Je m'agenouille sur la moquette de la voiture pour permettre à mes dents de saisir un petit morceau de peau sur son ventre musclé.

— Carly, non, gémit-il. La vitre. Pas fermée.

— Occupe-t-en.

La vitre de séparation remonte, mais on entend le chauffeur juste avant qu'elle ne se referme complètement :

— Nous arrivons dans dix minutes.

— Carly, on n'aura pas le temps.

— On verra.

Mes doigts se promènent sur son caleçon, évitant son érection, avant de se jeter dessus, de presser légèrement de la paume de ma main, puis de glisser presque imperceptiblement vers le bas. Lukas pousse de discrets râles.

— Putain, Carly !

— Monsieur Sullivan ! Quel est ce vocabulaire grossier ?

J'ai droit à un bruit de gorge pour toute réponse, alors que mon index a trouvé son chemin entre tissu et peau pour picoter son gland. Ma main tire sur le caleçon pour s'y engouffrer, laissant son membre dépasser juste un petit peu. J'y dépose deux ou trois timides baisers, puis, du bout des doigts, j'encercle son sexe dur et entame une série de lents vas et viens, de bas en haut. Je vais le prendre dans ma bouche. J'en meurs d'envie. Oh non, la voiture s'arrête. J'accélère les mouvements de mon poignet et de ma main.

— Verrouille les portières, Carly.

— Non, je ne te lâche pas. À toi de faire vite.

Ma langue vient en renfort au-dessus de mes doigts pour lécher le bout de son membre. Lukas réagit immédiatement.

— Carly ! Écarte-toi !

La portière s'ouvre. Heureusement nous sommes près de la vitre de séparation, à l'abri des regards.

— Un instant, s'il vous plaît !

Je prends le paquet de serviettes en papier sur le bar et en propose à mon amant. Je m'approche de la sortie et accepte la main que me propose le chauffeur pour gagner le trottoir.

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