Prologue

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Le port de Corak était animé. Les commerçants fourmillaient dans les allées avec leurs marchandises, les matelots transportaient vivres et munitions à bord des navires. Les voiles ondulaient au gré de la brise marine ; les cordages s’entrechoquaient par moment. Des voix s’élevaient, certains hommes étaient heureux de fouler la terre après des mois passés en mer, d’autres impatients de reprendre le large.

Sur le quai, un vaisseau de la marine royale de Manhal attirait l'attention des passants. À son bord, un groupe de soldat effectuait des allers et retours entre le pont et le port, emportant avec eux provisions, rêves d'un nouveau voyage. Un homme s’approcha du bastingage et jeta un regard sur la foule qui s’amassait sur le débarcadère. Le capitaine à n'en pas douter : costume rouge, tricorne sombre et posture droite.

Des claquements de sabots contre la pierre détournèrent son attention. Une voiture fit son entrée sur les pavés du port, tirée par deux chevaux à la robe noir jais. L’attelage se frayait un chemin à travers ce rassemblement pour seulement s'arrêter devant le navire. Le cocher descendit de son siège et ouvrit la porte latérale de la calèche.

Des regards insistants surgirent de la foule. Ils souhaitaient perversement connaitre l’identité de l’inconnu. Et les exclamations fusèrent lorsqu’ils aperçurent la silhouette d’un garçon. Mince et frêle, une tenue noble l’habillait. Sa peau claire comme la porcelaine ne faisait qu'amplifier la fragilité suscitée. Ses cheveux coulaient sur son front, à la lisière de ses sourcils, d’un brun noisette sur lequel les rayons du soleil s’amusaient à laisser quelques reflets dorés.

— C’est le garçon de la famille Jaybo.

— Earl, il me semble ?

— Oui, c’est lui.

Ses yeux, d’un bleu royal, se tournèrent vers le cocher, qui comprit sa demande muette. Il se mit en branle et fusa à l'arrière de la calèche pour y descendre une valise brune. Le vieil homme se dirigea vers les soldats et incita son jeune maître à le suivre. Un soupir s'éleva de l'habitacle avant d'être emporté par la galerne.

Le récalcitrant sortit malgré tout. D'un pas calme et mesuré, il navigua à travers la foule afin de rejoindre le Capitaine. Il s’inclina poliment et se redressa sans tarder. Les regards jugeurs de ce banc de curieux démangeaient sa nuque, mais l’hemmage du capitaine ne lui laissa le temps de s'en soucier.

— Je suis le capitaine de l’Isenor. Je serai en charge de votre sécurité durant ce voyage.

L’invité ne répondit rien. Il connaissait déjà son identité au sein de l’armée, à quoi bon se présenter. Le cocher confia la valise à un membre de l’équipage, et abandonna le jeune homme à son sort.

Le gouverneur invita son convive à monter à bord. Après quelques secondes d’hésitation, il grimpa sur le pont. Le brouillard humain se dissipa, rassasié du spectacle qui s’était offert à eux. Un soldat tendit la main pour aider le garçon à monter, mais l’invité n’accepta pas son aide. Le capitaine ordonna d’un ton ferme qu’on l’installe dans une cabine à l’écart du pont, et que sa porte soit gardée pour sa protection.

Un rictus prit le jeune homme. De qui voulaient-ils le protéger ?

Il fut escorté à travers la cale du bâtiment. Après quelques minutes de marche à travers de longues coursives, ils s’arrêtèrent face à une porte close. L’un des soldats l’ouvrit et le fit entrer. Il déposa la valise qu’il transportait sur le lit, et sortit pour laisser le garçon s’installer.

Une fois la porte fermée, il se permit d’inspecter sa cabine. Elle n’était pas très grande, meublée d’une simple couchette contre le mur, surplombée d’un hublot, une armoire et un bureau. Le strict nécessaire sur un vaisseau. En particulier pour la cabine d’un invité. Il soupira, invité n’était pas un mot approprié à sa situation. Il s’assit sur le matelas et jeta un coup d’œil par sa maigre fenêtre. Telle une fourmilière, les marins finissaient de monter les marchandises à bord.

Le voyage risquait d’être long, il n’avait pris que le nécessaire pour sa personne ; autant dire que l’ennui allait être sa plus grande amie durant cette traversée. Il ouvrit sa valise, déposa ses vêtements dans l’armoire, ses livres sur le bureau. Ses livres : un trésor qu'il chérissait plus que tout. Histoires, mystères et connaissances acquises depuis l'enfance.

Un sifflement retentit dehors, alerte du départ. Sa curiosité l’incita à monter sur le pont pour observer ce spectacle. Après tout, il n’était pas prisonnier de sa cabine, simplement surveillé. Il ouvrit la porte et longea le couloir qu’il avait emprunté plus tôt, escorté par un soldat ; un chemin qu'il n'oublierait pas, car sa mémoire était son atout.

Il frissonna lorsque le pont du bateau accueillit son arrivée. Le vent marin parcourut sa nuque. Son regard bleuté fixa la côte qui s’éloignait lentement. Les voiles se gonflèrent, et le navire prit de la vitesse. Ils quittaient les terres du nord pour voguer sur des eaux plus mouvementées. Ses cheveux dansaient au gré de la brise marine tandis que ses mains se posaient sur le bastingage.

Le voyage commençait.

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