34. Sentence

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Au petit-déjeuner, après une grasse-matinée bien méritée pour nos corps engourdis par une nuit d’amour, je prends plaisir à sourire, car cela agace mon frère. Marion chantonne comme vendredi, et donc même s’il gagne le cœur de la grande brune, à chaque petit-déjeuner où elle chantonnera, il saura qu’il n’a pas gagné son corps. Et il repensera sans cesse à la mélodie de gémissements qu’il a forcément entendus toute la nuit.

Maelys à qui la bonne humeur de sa mère n’échappe pas, se penche à l’oreille de Lucas et lui murmure en secret :

— A mon avis, elles ont encore dormi, toutes nues.

Mon oreille est trop fine et je ne parviens pas à retenir mon sourire. Lucas garde un visage neutre, mais il bouillonne intérieurement.

Le meilleur petit-déjeuner de toute ma vie.

Lorsque vient l’heure de repartir, après le café, j’embrasse tout le monde. Marion me dit :

— Je te raccompagne. Lucas, tu restes avec Maelys ?

Il entend bien l’ordre dissimulé. Marion et moi passons dans le couloir qu’elle partage avec les habitants de l’étage supérieur, puis elle passe ses bras de chaque côté de mon visage.

— Je suis un peu accroc, je ne peux pas te laisser partir, juste en te faisant la bise.

Ses traits s’inclinent et nos bouches se redécouvrent, amantes quasiment secrètes d’un week-end. Notre séparation est si dure que le baiser s’éternise deux minutes, sans qu’aucune de nous n’ose l’interrompre. C’est la porte du voisin qui nous arrête. Marion récupère le filet de salive qui tombe sur son menton. Les yeux humides, elle me sourit. C’était notre dernier baiser, mais il était génial. Le psychiatre va halluciner quand je vais lui raconter.

Le même soir, l’annonce tant redoutée est arrivée par un SMS de Marion : en couple avec Lucas. Pour célébrer les heures qui ont précédé leur union, j’ai torché une demi-bouteille de whisky.

Nous sommes mardi, la fin du cours de close-combat approche, nous transpirons tous, au point tel que les couleurs de nos t-shirts sont assombries. À part Barbara et Camille qui sont des princesses et qui n’ont que les aisselles et le dos auréolées, tous les élèves sont détrempés. Même l’italienne qui m’exècre cordialement est dans le même état que moi.

Benji est en train de nous faire nous affronter dans des combats d’une minute chacun, et nous tournons sans répit avec les uns contre les autres. Pour la première fois depuis que je viens au dojo, je me retrouve face à la grande brune. Toutes deux, nous cherchons du regard un binôme qui ne serait pas formé. Benji s’impatiente :

— Kira ! Giulia ! Combat !

Regard féroce échangé, tripes serrées, nos poings gantés partent. Ses défenses et ses contre-attaques gagnent une vélocité désordonnée par le stress. Ma main qui dévie l’un de ses gestes, rebondit sur son bras et heurte sa pommette. Aucun homme ici n’a jamais osé frapper fort son visage parfait.

— Kira ! Enchaîne-la !

Elle se ressaisit au cri et ses yeux se voilent de colère. Elle se jette sur moi, donc je frappe gentiment ses côtes dégagées… un peu trop gentiment. Ses ongles se plantent dans mon visage. Je l’emmène au sol en me blottissant contre elle pour lui mordre la joue. Elle m’envoie une frappe à la tempe qui me fait dégager sur le côté. Quand elle essaie de se relever, j’agrippe ses cheveux pour me tirer, grimper à califourchon sur elle et lui avoiner la tronche à grands coups de poings.

Cyril, le petit nerveux, me repousse un coup de pied pour m’éjecter sur le côté. Giulia se redresse, alors Benji lance :

— Okay ! C’est bon pour aujourd’hui, marchez, respirez !

Il aide la belle à se relever. Elle a les lèvres ensanglantées et la joue rougie par mes dents, mais rien de grave. Il l’emmène tout de même s’assoir sur une chaise à l’écart et me fait signe de venir.

— Allez, c’est rien. Vous vous êtes bien battues. Faite-vous la bise.

Résignée, elle me tend la joue gauche, pourtant celle marquée par mes dents. Mais elle ne veut pas toucher mon côté abimé. Je pose ma joue sur sa peau chaude, puis elle se relève pour éviter d’avoir le profil droit en contact avec ma chair calcinée.

Nous nous plaçons en rangs côte à côte. Sa poitrine se soulève encore au rythme de la frustration. Le salut rituel fait, elle retourne voir Benji. Camille et Barbara se précipitent vers moi :

— Trop bien ce que tu lui as mis à c’te pute !

Barbara éclate de rire aux mots de Camille. Je hausse les épaules, transpercée par l’idée de ne pas l’avoir humiliée comme j’aurais voulu. Je l’ai battue, certes, mais elle le vit bien. Ce n’est pas ça qui va lui faire ravaler ses regards méprisants ni le sobriquet dédaigneux de monstre qu’elle me donne.

La salle se vide, Giulia attend de pouvoir être seule avec Benji pour lui parler. Elle passe d’un appui sur l’autre, mettant ses hanches en avant, se recoiffe, essaie tout pour se faire remarquer de l’enseignant. Les filles pressées de rentrer chez elles filent. L’idée de pouvoir m’expliquer seule avec elle naît dans mon esprit, alors je dis à Mickaël lorsqu’il sort du vestiaire :

— Je vais rentrer plus tard, ne m’attends pas.

— T’es sûre, je peux t’attendre ?

— Non, si ça prend trop longtemps, ta femme va se poser des questions.

Il rit puis acquiesce avec son grand sourire affable.

— Bonne soirée, alors !

Je gagne le vestiaire puis m’assois sur le banc. Je n’ai jamais pris ma douche ici à cause du tatouage en formation. Mais je tiens cette fois-ci à ce que la belle déchiffre les positions de mes fées pour qu’elle cesse de me voir comme sa grande rivale dans la course à la séduction.

Elle finit par gagner le vestiaire, et sans un mot, les épaules droites, elle se dénude pour gagner le carrelage humide des douches. Elle roule moins de ses jolies fesses, maintenant que nous sommes seules, une tête de mort tatouée au plus bas de l’échancrure de ses reins. Une fois dévêtue à mon tour, j’arrive dans son dos et elle sursaute en se retournant :

— Qu’est-ce que tu veux ?

— Je voulais voir si ton visage allait mieux.

Elle chasse ma main qui vient caresser sa joue. Mes doigts saisissent ses poignets puis les plaquent contre le mur au-dessus de sa tête. Mon corps plaqué contre le sien, la situation m’électrise, éveille mes appétits saphiques. Ma bouche vient sauvagement s’emparer de ses lèvres esquintées. Ses muscles restent raides, donc je glisse un baiser sur son cou et lui susurre :

— Je te laisse Benji, ce n’est pas lui qui m’intéresse.

— Genre, tu veux vraiment me faire croire que t’es lesbienne !

Je libère ses poignets, un peu surprise par sa réaction, et recule d’un pas :

— Non, je me suis fait tatouer le Kama-Sutra lesbien par esprit de contradiction.

Ses yeux parcourent ma fresque, pendant que je réalise que malgré la raideur de son corps, elle n’a pas été dérangée par notre proximité. N’entendant pas de réponse, je souris :

— Tu veux que je te le prouve ?

— Non merci, ça ira.

Elle dit ça avec un détachement impudique, comme si nous étions vêtues et que je venais de lui proposer un café. On entend dans sa voix comme un refus émis uniquement par politesse. Mais à l’évidence ça ne semble pas être une fille dérangée par les relations saphiques. Donc je glisse ma main de bas en haut sur sa cuisse en murmurant :

— Mais ça ne te dérangerait pas ?

Ses yeux insolents ne décrochent pas de mon visage, ma main glisse sur son pubis glabre, puis elle répond juste après avoir frissonné :

— Non.

Voilà un aveu inattendu. En échange de son mépris, elle me doit bien ça, sinon prendre ça comme une compensation pour les coups qu’elle a reçus. Je redescends ma main pour la caresser à nouveau depuis le genou, en remontant toujours plus vers l’intérieur. Sa poitrine parfaite pointe de provocation, ne me laissant pas d’autre choix que de venir la prendre en bouche. Et tandis que sa jambe s’ouvre sous mes caresses, je passe mon index entre ses pétales huilés de sa liqueur. Je la pénètre, étroite et bouillante. Lorsque je veux y ajouter le majeur, elle m’arrête :

— Non, pas deux doigts, s’il te plaît.

J’hésite, m’interrompant dans mes caresses. Je devine qu’elle est vierge :

— Non ?

— Ne le dis pas s’il te plaît.

Pour réponse, je me jette contre elle et l’embrasse sauvagement. Cette fois-ci, pas de résistance, elle s’abandonne, engouffrant sa langue dans ma bouche sans pudeur. Mon majeur remplaçant mon index en elle, je la masturbe à haute cadence en, venant comprimer le haut de son sexe de la paume.

Son souffle s’approfondit, quelques notes nasillardes s’échappent. Puis sa main m’agrippe la nuque en couinant :

— T’arrête pas ! Par pitié, ne t’arrête pas !

Son corps se contracte, interrompt ses cris, alors la bouche entrouverte, elle lâche trois cris, brisés par trois spasmes fantastiques.

Sa main sur ma nuque m’oblige brutalement à pivoter et je me retrouve dos contre le mur. Avec une voix de lionne sicilienne elle me dit :

— Je ne laisse jamais une dette impayée.

Sa main glisse entre mes jambes et son majeur me pénètre. Je la préviens :

— Je suis vierge d’homme aussi.

Elle mordille ma lèvre inférieure tout en commençant ses mouvements. Comme en combat, c’est un jeu de dominante. Elle prend plaisir à me voir offerte à elle, complètement abandonnée. Il faut quelques minutes à peine pour que mon ventre se creuse.

— Pourquoi tu te retiens de crier, murmure-t-elle. Fais-moi plaisir, crie.

Sa bouche sur ma joue défigurée, sa main me comprimant avec force, je sens son majeur sortir pour brutaliser mon rubis. Je garde la bouche close pour gémir. L’orgasme me foudroie avant qu’elle ait replacé son doigt. Je crie comme elle me le demande en tremblant dans ses bras. Tout en me maintenant frissonnante contre elle, elle me confie :

— Tu deviens belle quand tu jouis, le monstre.

Je ne dis rien, elle me propose du gel-douche, et sans nous parler d’avantage, nous nous savonnons, et nous r’habillons, comme si rien ne s’était passé, comme si nous étions deux rivales partageant un même club. Je renfile mes vêtements trempés de sueur, n’ayant pas prévu les évènements. Elle a eu raison, personne ne nous a entendues, Benji est dehors en train de discuter avec des élèves. Elle me dit :

— J’ai faim. Ça te dit, un kebab ?

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