Chapitre 6 – Lucie

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Chapitre 6 – Lucie


Lundi 3 mars 2014. Marché de Fort de France


À son réveil, Marcel trouva la maison vide. Lucie avait laissé un message plutôt sec sur la table de la cuisine, lui indiquant qu’elle se rendait au marché. Il n’était pas mécontent, au moins cette balade, animée par l’ambiance du carnaval, allait lui changer les idées.


Le Grand Marché* couvert de Fort de France valait le déplacement pour le seul plaisir des yeux. Sous sa grande et ancienne structure métallique, il y régnait en matinée une effervescence comparable à celle d’une ruche en plein été. Une véritable explosion de couleurs et d’odeurs qui en faisait le lieu incontournable de tous les acheteurs d’épices : cannelle, vanille, safran, curry, noix de muscade, girofle, bois d’Inde, piment, gingembre, gros thym, roucou, graines à roussir... La liste était longue. Sans oublier les fameuses plantes d'apothicaire comme le bois bandé, aux vertus réputées aphrodisiaques...


Elles étaient présentées dans de grands sacs mais aussi sur les étals des marchandes, revêtues pour l’occasion de leurs costumes traditionnels en madras. Peu farouches, elles avaient le verbe haut et l’assurance de celles qui n’ont pas eu une vie facile. Au détour d’une allée, le sourire aux lèvres, elles vous apostrophaient volontiers d’un familier : « Alors Doudou*, comment tu vas ? » ou « Doudou, qu’est-ce que tu m’achètes aujourd’hui ? » ou « Fais-moi vendre chéri (e) » avec un tel accent chantant que cela suffisait à ensoleiller votre journée.



On y trouvait aussi les alcools locaux, que vous étiez instamment invités à déguster sous l’oeil directif de la vendeuse : rhum, punch, planteur... Mais dont il ne fallait pas abuser, sous peine de vous retrouver rapidement titubant, en perte d’orientation, à moins « d’éponger », en vous régalant des succulents accras préparés dans les petits restaurants situés à l’étage. Pour cela, encore fallait-il parvenir à monter l’escalier !



Sur les étalages, à l’extérieur de la Halle, étaient regroupés les fruits exotiques et les légumes provenant des exploitations de toute l’île. L’artisanat local n’était pas en reste non plus, entre les marchandises confectionnées en madras et les articles en vannerie comme les chapeaux bakoua* , les confitures et les mixtures maison, les touristes et les habitués trouvaient toujours quelque chose à glaner.


La chose la plus importante étant surtout de ne pas être pressé. Il fallait savoir prendre son temps au pays des alizés.




* Un marché dont l'écrivain Patrick Chamoiseau a si bien décrit les couleurs et les cris dans un de ses livres, « La chronique des sept misères ».

*Chéri en créole.

*Fruits de la passion

*Chapeau traditionnel, tressé avec les feuilles de l’arbre ( issu de la canopée martiniquaise) dont il porte le nom.



























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